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  • : Le blog de Jean-Loup
  • : Engagé, depuis plusieurs décennies dans une démarche visant à lutter contre tous les processus d'exclusion, de discrimination et de ségrégation socio-urbaine, je suis persuadé que si nous voulons « construire » une société reposant sur un véritable Vivre Ensemble. Il nous faut savoir, donner du sens au sens, prendre le temps de la concertation et faire des propositions en adéquation avec les besoins de nos concitoyens.
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5 août 2015 3 05 /08 /août /2015 09:36

Les attaques contre le libéralisme ne datent pas d’aujourd’hui. À la fin du XIXe siècle, un des derniers représentants de l’école classique française, Frédéric Passy, invité à Genève, y faisait une conférence où il plaidait la cause de ce qu’il appelait l’école de la liberté : c’était le 9 avril 1890. En voici un extrait qui reste toujours d’actualité et qui mérite d'être analysé voire médité

« C’est un accusé qui paraît aujourd’hui devant vous. Il sait qu’il n’a pas seulement à se défendre personnellement lui ou ses idées, mais qu’il a à défendre avec lui, avant lui et plus que lui, ses amis, ses collaborateurs et ses maîtres, c’est à dire tous ceux dont l’ensemble constitue l’école à laquelle il s’honore d’appartenir, l’école de la liberté.

Oui, messieurs, je crois à la liberté, à cette liberté sans laquelle on n’aurait pu, ni lui faire son procès, ni plaider pour elle et qui est, comme l’a dit si bien Bastiat, « le tout de l’homme, son moteur, son professeur, son rémunérateur et son vengeur. »

J’y crois par ce que je crois que la société humaine est autre chose qu’une collection d’automates attendant d’une main étrangère le mouvement et l’illusion ; parce que je crois que ce monde n’a point été livré au hasard et qu’il y a, dans les sciences de l’ordre moral comme dans les sciences de l’ordre matériel, des lois qu’il n’est point en notre pouvoir de changer, mais qu’il est de notre pouvoir d’étudier pour nous en servir en nous y conformant, parce que, comme l’a dit admirablement Boisguilbert, « la nature ne respire que liberté ; elle ne demande pas que l’on fasse des miracles, elle demande seulement qu’on cesse de lui faire une perpétuelle violence. »

C’est pourquoi j’estime que ce qui est en cause devant vous ce n’est pas seulement un système économique, mais le fond même de la vie politique et de la morale. C’est en même temps l’éternelle querelle de la réalité et de l’hypothèse, de la science et de l’empirisme, du possible et de l’impossible, de l’observation qui éclaire et de l’imagination qui égare.

On a reproché avant tout à cette école classique, ce qu’on a appelé son indifférence, son optimisme, son impassible et béate résignation à toutes les imperfections et toutes les misères du présent. On l’a accusée de n’avoir pour les douleurs et pour les aspirations de l’humanité, ni consolation, ni espérance, et de se borner à répondre à ceux qui souffrent comme à ceux qui désirent : « les choses sont comme elles sont, et tant pis si elles ne vous conviennent pas ainsi ; nous ne pouvons rien pour vous, frappez à côté. »

Cette doctrine n’est point une doctrine d’insensibilité et d’indifférence ; c’est une doctrine d’humanité et de progrès. Mais c’est en même temps parce que en dehors de la raison, il n’y a ni humanité ni progrès, une doctrine de la raison. C’est la doctrine de gens qui, au lieu de refaire le monde à leur fantaisie et de faire miroiter devant les yeux de leurs semblables la vaine fantasmagorie d’une perfection impossible, bonne tout au plus à surexciter leur souffrance en faisant naître en eux des prétentions irréalisables, cherchent, en étudiant la nature humaine et ses lois, à déterminer ce qui se doit et ce qui se peut, et enseignent aux hommes, non pas à se révolter contre ce qui est, mais à tirer de ce qui, par l’emploi intelligent et raisonné de leur activité, le meilleur parti possible.

L’école de la liberté n’est ni l’école de l’approbation, ni l’école de la condamnation. Elle ne dit pas que tout est bien dans la société ; elle ne dit pas non plus que tout y est mal. Elle dit que le corps social, comme le corps humain a ses imperfections et ses maladies ; mais aussi que le corps social, comme le corps humain, a sa constitution naturelle, ses organes nécessaires qui ne peuvent être supprimés sans porter atteinte à l’ensemble, que pour l’un comme pour l’autre, la première condition de toute médecine utile, c’est la connaissance de cette constitution fondamentale, l’étude du jeu de ses organes, le respect de cette force vitale, sans laquelle on ne peut rien, et que toute la science du vrai médecin consiste à dégager des influences ou des gènes qui le contrarient.

Elle n’est, en un mot, ni optimiste, ni pessimiste. Elle croit au mal parce qu’elle le voit et elle le combat. Elle croit au bien parce qu’elle le voit aussi et parce qu’elle en a le besoin, et elle travaille à l’augmenter. »

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3 juillet 2015 5 03 /07 /juillet /2015 14:42

Cela faisait longtemps qu’on n’avait plus entendu les gémissements plaintifs de l’actuel président de l’Assemblée nationale. Heureusement, l’actualité lui donne enfin l’occasion d’émettre ces petits couinements stridents sans lesquels il n’existerait pas vraiment : en pleine forme, Claude Bartolone revient donc nous entretenir sur la météo, la télé, la politique, la vie, la grande, la belle, celle qu’il mène et qu’il nous fait partager dans un entretien radiophonique pulsant de cuistrerie.

C’est France-Info qui aura eu les bonnes grâces du fier Marquis de Seine-Saint-Denis, et qui nous propose donc une interview à bâtons rompus, cassés, mâchonnés et découpés. Et sur le sujet de l’actuelle canicule estivale, il n’y a pas que l’asphalte et l’air qui soient chauffés à bloc : Claude, à peine le gros micro mou saisi, s’embarque dans l’habituelle propagande climato-réchauffiste, à laquelle il ajoute sa célèbre Magic Touch™ de n’importe quoi aspergé avec vigueur :

« On voit bien que lorsqu’on parle de transition énergétique, eh bien là on voit ce que pourrait redonner ce dérèglement de la planète avec heu des pics de heu chaleur de plus en plus importants, une dérèglementation du climat avec toutes les conséquences que cela peut avoir. »

Et voilà, nous sommes à peine à 30 secondes d’échanges qu’il envoie déjà une bordée de 155mm de son Yamato personnel à l’attention des journalistes et des auditeurs à peine réveillés. Ce type n’a aucune pitié et nous inflige donc une dérèglementation du climat qui l’enquiquine beaucoup et justifie amplement, selon lui, qu’on oblige les véhicules à contourner Paris, voire toute sa banlieue, pour assurer à la métropole une léthargie paisible dans une atmosphère virginale.

Le journaliste en face de lui, passablement amoindri par l’impressionnante salve de conneries débitées à rythme soutenu, ne parvient pas à lui faire comprendre qu’une nouvelle sanction des véhicules polluants revient à pénaliser les moins riches ; Claude, chaud boulette, embraye sur les miyons de réfugiés climatiques (35, mon brave monsieur, 35 !) qu’il y aura inévitablement à la fin de l’année – il tient sans doute ses chiffres de l’ONU – et que ce sont les plus pauvres qui ont des maisons passoires et qu’il faut donc agir contre le réchauffement, voilà voilà, circulez.

Apparemment, l’angle choisi est de les tabasser de taxes et d’interdictions, donc. Subtil. On comprendra surtout qu’en malaxant avec vigueur tous les mots-clés actuels sur le climat, la chaleur et les efforts qu’il faut tous faire pour un avenir riant, Bartolone prête ici allégeance à son patron François dont l’hippopoconférence de fin d’année ne peut surtout pas foirer. C’est un bon soldat, le Claude.

En outre, s’il a daigné venir parler au peuple, ce n’est pas pour s’entretenir de ces broutilles climatiques ni même des enquiquinements passagers de la SNCF avec ses horaires qui se ratent et ses voies qui se dilatent au point d’embrouiller le politicien dans le nom des stations, mais bien de sa campagne électorale pour les régionales, puisqu’il entend bien devenir le prochain patron de la Région Île-De-France.

Petit souci, cette campagne débute avec la parution d’un rapport de la CRC, la Chambre Régionale des Comptes, particulièrement accablant sur sa gestion du département de Seine-Saint-Denis entre 2008 et 2012.

Et lorsqu’on épluche le rapport, on comprend qu’il va être compliqué pour le candidat à la présidence de région de faire oublier sa gestion calamiteuse.

Ainsi, prétextant en 2010 un « budget de révolte » (cf 4:00 dans la palpitante interview) pour rouspéter contre une dotation plus faible de l’État aux fastes de son département, il n’hésite pas à engager les dépenses à hauteur de ce qu’il estime être du et non à celle de ce qu’il a reçu. Comme c’est mignon et tellement dans l’air du temps que de dépenser bien plus que ce qu’on a en se présentant comme un héros de la lutte anti-austérité (qu’on n’aura donc pas subie). En définitive, ne vous inquiétez pas, ce « budget de révolte » ne sera payé que par le contribuable (national ou départemental, Bartolone s’en fout).

Et tant qu’à parler d’austérité, n’oublions pas le petit personnel. Bien qu’un cabinet de président du Conseil ne puisse en théorie excéder 11 personnes, la CRC a découvert à la suite d’une enquête minutieuse (historique des recrutements, fiches de paie, organigramme sur l’intranet, …) que le cabinet a compté jusqu’à 14 personnes. Et cette petite entorse aux règlements au niveau du cabinet se retrouve, sous une autre forme, à tous les étages de l’administratif local : on apprend ainsi que les agents départementaux de la Seine-Saint-Denis ont un temps de travail réduit (28 heures par semaine pour les assistants sociaux, environ 27 h 30 pour les éducateurs, un peu plus de 27 heures pour les agents des collèges). Si Bartolone ne fait, en l’espèce, qu’hériter d’une situation précédente ultrafavorable, il n’a rien fait non plus pour ramener toutes les équipes aux 35 heures légales. Quant à la facture de l’écart représenté aux 35 heures (évaluée à 22 millions d’euros par la CRC), elle restera à la charge de … devinez qui ? Du contribuable, évidemment.

Les exemples s’accumulent dans le rapport, comme celui d’emplois qui, s’ils ne sont pas fictifs, semblent bien douteux et dont la portée effective, en terme de productivité, laissent songeur. En définitive, cette liste de reproches assez longue brosse un tableau bien sombre d’une gestion qui « manque de fiabilité et de transparence » selon la CRC, aux bidouilles comptables qui ont pu altérer « la sincérité des budgets ».

Pour un élu comme Claude Bartolone, c’est finalement sans surprise lorsqu’on se rappelle qu’il est directement responsable d’avoir contracté des emprunts toxiques dont le département n’est toujours pas dépatouillé (et loin s’en faut). Faut-il rappeler qu’à ce titre, et malgré les dénégations consternantes de l’élu, le département qui avait attaqué Dexia s’était retrouvé débouté de ses demandes ? Faut-il rappeler que tout montre que les élus qui ont contracté ces emprunts délétères étaient parfaitement au courant des catastrophes potentielles dans lesquelles ils engageaient leurs collectivités territoriales ?

Et tant qu’on y est, comment ne pas dresser un parallèle (que certains trouveront, soyons certain, hardi) entre la situation financière catastrophique dans laquelle il laisse son département, laissé des années aux mains inaptes de communistes pour tomber dans celles, moites et dispendieuses, d’un socialiste sans honte, et la situation d’un pays européen en pleine tourmente, passé de communistes en socialistes divers et qui ont accumulé les déficits et les gabegies ? Alors que le Grexit (la sortie de la Grèce de la zone euro) n’a jamais été aussi proche, comment ne pas voir se profiler comme un « 93xit », ou, au moins, une faillite retentissante d’un département aux abois ? Décidément, cela présage d’un avenir rebondissant pour la région Île-de-France si elle tombait dans l’escarcelle du frétillant Claude.

La réalité n’est décidément pas bisou pour le candidat à l’élection régionale : sa gestion complètement approximative, ses décisions basées sur l’émotionnel et non le rationnel, quitte à tortiller le sens des mots et des lois pour parvenir à ses fins politiques personnelles, tout ceci lui revient maintenant dans le pif avec une vigueur presque réjouissante. Le timing est impitoyable puisqu’on est précisément au moment où le personnage s’élance à l’assaut du niveau de pouvoir supérieur, mais il est aussi nécessaire puisqu’il permettra de rappeler ce que valent vraiment nos « hommes de responsabilité » lorsqu’on leur fournit le pouvoir et les robinets à pognon. On peut raisonnablement douter que ceci aura un effet quelconque dans la mémoire de l’électeur, particulièrement fugace, mais le rappel reste toujours utile.

Notons que pour finir son interview, Bartolone, probablement frappé d’une rare lucidité, explique vouloir sauver « Les Guignols ». Faut-il y voir enfin un désir de reconversion à sa portée ?

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29 juin 2015 1 29 /06 /juin /2015 11:25

"En France, quand il pleut, c’est à verse et quand ça dévisse à l’extérieur, ça part en vrille à l’intérieur. Logiquement, alors que la situation internationale se fait chaque heure plus tendue, entre les énièmes péripéties grecques et le spectre de plus en plus présent d’une bulle financière sur le point d’éclater, on devait s’attendre aussi à une détérioration record de la situation économique purement nationale. Rassurez-vous : c’est aussi le cas.

Et c’est d’autant plus inquiétant que les informations suivantes n’ont pour ainsi dire pas été relayées par la presse nationale, trop occupée à regarder les sorties lapidaires de M.Valls ou les dernières âneries de JC.Cambadélis. Pourtant, la nouvelle méritait sans doute qu’on s’y attarde même si l’actualité chargée justifie sans doute qu’il faille un peu de temps pour la faire revenir à la surface.

En substance, on découvre une inquiétude croissante des départements devant la croissance incontrôlée des prestations sociales.

Autrement dit, les départements n’ont plus une thune. Ce ne serait pas vraiment problématique si l’État, de son côté, disposait de quelques réserves. Mais ce n’est pas le cas et on commence à comprendre qu’en cette période de disette financière, il va falloir faire des efforts pour joindre les deux bouts, et ce d’autant plus que nous ne sommes qu’en juin. Or, si avoir des problèmes de trésorerie en octobre, c’est enquiquinant, alors en juin, cela devient franchement problématique.

D’autant que la raison principale du manque de trésorerie n’est pas liée à une dépense incontrôlée des fournitures de bureau qu’il serait facile de calmer, mais bien des prestations sociales au bout desquelles se trouvent des individus qui n’ont bien souvent pas vraiment d’alternative solide si celles-ci devaient s’interrompre, même momentanément.

Le constat, pourtant, ne laisse aucun doute et part d’une lettre de l’ODAS, l’Observatoire national de l’Action sociale, qui note il y a quelques jours que, je cite, « sans évolution du mode de financement de leurs compétences obligatoires, les Départements ne pourront plus, dans leur grande majorité, équilibrer leur budget dans un proche avenir. » Autrement dit, la distribution d’argent public continue de plus belle, son débit a même nettement augmenté (1.4 milliard de dépenses en plus en 2014 par rapport à 2013), et l’État, à sec, ne pourra bientôt plus du tout garantir l’équilibre des finances départementales.

Ce constat est partagé tant à droite qu’à gauche. Le bureau de l’ADF (Assemblée des départements de France), classé à droite, s’est alarmé de « la croissance incontrôlée des allocations individuelles de solidarité (AIS) qui conduira à l’asphyxie mortelle des départements » pendant que de son côté, « le groupe de gauche insiste sur l’urgence de la situation des finances départementales ».

Dans ces dépenses sociales, le premier poste des allocations versées est clairement le RSA (à 58%) dont les dépenses ont progressé de 9,2% en 2014. Les autres postes (l’APA – Allocation personnalisée d’autonomie – et la PCH – Prestation de compensation du handicap) sont aussi concernés par ces problèmes de trésorerie. Or, à moins bien sûr d’une inversion de courbe du chômage que bien peu espèrent encore, la situation devrait continuer de s’aggraver. Le plus gênant étant qu’on ne sache absolument pas à quoi s’en tenir ; d’après Claudine Padieu, directrice scientifique de l’ODAS,

« Contrairement aux autres postes, les économistes ne parviennent pas à réaliser des prévisions fiables pour le RSA. La hausse de ces dépenses est d’autant plus préoccupante qu’elle est imprévisible »

Zut, il va être délicat de planifier quelque chose (ce qui est une horreur pour nos amis les planistes), et tout indique que ça ne va pas aller mieux tout seul. Zut et zut.

Dès lors, on ne s’étonnera pas de retrouver quelques gémissements de conseillers départementaux, pour le moment discrets dans la presse locale, constatant, effarés, que la source d’argent gratuit des autres, qui tombait jusque là avec une belle régularité, commence à s’assécher. Zut, zut et rezut, il va falloir supprimer certaines subventions. Zut, zut, et rezut, tout ceci donne un parfum de déroute aux finances locales et pousse même certains à évoquer, sans ambages, un « krach budgétaire territorial ».

Eh oui, le problème, d’habitude pourtant simple, devient rapidement insoluble. Jusqu’à présent, il suffisait en effet de réclamer des sous à l’État. Lorsque celui-ci renâclait, la collectivité territoriale, jamais à court d’imagination, trouvait l’une ou l’autre taxe à augmenter, l’un ou l’autre impôt à retailler vers le haut, et, magiquement, l’argent rentrait. Malheureusement, ce temps de cocagne est révolu. Comme l’explique Jean-Louis Sanchez, délégué général de l’ODAS,

« Les conseils départementaux ne peuvent plus augmenter les impôts et, à ce rythme, ils ne pourront plus financer leurs dépenses sociales dans trois ans. »

Vous me direz : oh, trois ans, c’est encore une belle et longue période qui donnera certainement l’occasion à nos éternels dépensiers d’exprimer toute leur créativité, n’en doutons pas. Je me permets cependant de pointer que les dettes s’empilent, les expédients possibles s’amenuisent et les marges de manœuvres, déjà fort étroites il y a trois ans, risquent bien, à l’approche des élections et de l’impératif évident de ne pas tabasser l’électeur, de s’évanouir complètement. Autrement dit, tout ce petit monde, lentement mais sûrement, est coincé : ne pouvant plus augmenter les impôts, ne pouvant plus guère augmenter la dette, il va leur falloir diminuer les dépenses.

Comme explicité en introduction, depuis que François Hollande a récupéré le pays des mains du précédent, lorsqu’il pleut, c’est à verse. Alors que les tensions internationales n’ont jamais été aussi fortes, que les marchés financiers affichent tous une situation bullesque et que le moindre événement imprévu risque bien de déclencher des mouvements de panique mémorables, la situation économique nationale est inextricable. L’État, endetté jusqu’au cou, ne peut même plus faire mine d’aider les départements, eux-mêmes confortablement installés dans les dettes. Et ce ne sont pas les prochaines élections régionales qui vont inciter les uns et les autres à apurer la situation".

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28 juin 2015 7 28 /06 /juin /2015 08:15

Le public se moqua de lui pendant des années. Lors de ses premiers discours, il fut chahuté et humilié… Puis les Athéniens se mirent à l’écouter, reconnurent en lui un véritable orateur… Et plus de 2000 après, il est toujours cité comme un modèle d’éloquence.

La vie des grands orateurs est une source riche d’enseignements et d’inspiration pour quiconque souhaite éprouver son leadership. Parlons du plus célèbre d’entre eux : Démosthène.

Démosthène vécut au IVe siècle av. J.-C., de -384 à -322. Souvent cité par Cicéron comme un modèle d’éloquence, il fut l’un des plus grands orateurs de la Grèce antique. Pourtant, ce n’était pas gagné…

À ses débuts, Démosthène était en effet peu doué. Son premier contact avec la tribune et le public fut un échec. On raconte que sa voix manquait de force, que son articulation était peu soutenue, et que sa prononciation était mauvaise (il avait notamment du mal avec les « R »)… En plus de cela, le trac et le trouble le paralysaient, ses gestes étaient maladroits, et il soulevait sans cesse une épaule, par une sorte de tic.

C’est ainsi que, lors de sa première intervention en public, il se fit carrément huer. Les gens se moquèrent de lui et critiquèrent violemment sa façon de s’exprimer. Malgré cela, il continua d’intervenir en public, entre autres pour défendre ses idées politiques. Et finit par devenir l’un des meilleurs et des plus célèbres orateurs de l’Antiquité. Voici comment Démosthène s’acharna à remédier à ses défauts…

Les fameux « cailloux de Démosthène »

Démosthène avait des soucis d’articulation et de prononciation. Pour délier sa langue, il s’entraîna à parler avec des galets dans la bouche. Cette technique, désormais appelée « les cailloux de Démosthène », est encore utilisée par certains orthophonistes pour améliorer la diction. En voici le principe :

En plaçant quelque chose dans votre bouche, vous gênez les mouvements de celle-ci ; et si vous voulez vous mettre à parler dans ces conditions, vous êtes alors obligé d’articuler exagérément pour que vos paroles soient un minimum compréhensibles. Ce travail d’articulation permet d’exercer les muscles buccaux, ce qui améliore nettement votre expression orale.

Faites le test ! En remplaçant les cailloux ramassés par terre par des bonbons au miel par exemple. Ou encore en vous coinçant simplement un léger cure-dent entre les dents de devant. Choisissez quelques formules et prononcez-les à voix haute deux ou trois fois en vous efforçant de parler de la façon la plus correcte possible malgré cette gène. Enlevez ensuite les bonbons ou le cure-dent, et reprenez vos formules : vous serez surpris de voir à quel point votre expression se révélera aussitôt bien meilleure, plus fluide et plus agréable…

Démosthène avait également une méthode originale pour travailler le volume de sa voix. C’est sur la plage qu’il ramassait les galets, qu’il mettait ensuite à la bouche. Et il profitait d’être face à la mer pour s’exercer à parler fort face au bruit des vagues (cf. le tableau de Jean-Jules-Antoine Lecomte du Nouÿ, Démosthène s’exerçant à la parole, réalisé en 1870 – détail ci-dessus). De façon similaire, mettez votre radio à fond, et essayez de couvrir le bruit en haussant le ton !

La préparation physique

L’art oratoire est une discipline bien plus physique qu’on ne le pense. Le talent d’un orateur ne dépend pas seulement des mots qu’il emploie, de ses idées et de sa façon d’argumenter : encore doit-il exécuter les bons gestes, occuper l’espace, manier des objets, s’exprimer avec force et clarté sans s’essouffler, tenir dans la durée… Parler face à une assemblée devient vite un sport à part entière.

Pour jaillir avec énergie, la parole doit être soutenue par un corps solide et entraîné. La voix de Démosthène était faible, et seul un souffle puissant peut porter une voix forte. Pour cultiver son souffle, il se mit donc à faire de la course à pied…

Pour nous, le vélo est aussi un excellent moyen, plus contemporain. D’une façon générale, le sport permet d’améliorer notre posture et notre allure. Par exemple, un bon gainage au niveau abdominal, combiné à un fessier et des lombaires renforcés, permet de maintenir une posture bien droite et assurée. La pratique physique et sportive devrait être le complément indispensable des études en rhétorique !

L’épée sous l’épaule

Pour son tic à l’épaule, Démosthène se résolut à travailler devant un miroir. Il coinça une épée le long de son corps, la pointe sous l’aisselle : il était ainsi renseigné sur la discipline de son épaule par les piqûres douloureuses qu’elle lui occasionnait quand son tic le reprenait…

Bien sûr, vous n’avez peut-être pas d’épée chez vous, et vous ne voudriez de toute façon pas tenter une technique aussi violente. Voici donc un autre moyen, moins agressif, pour apprendre à contrôler votre gestuelle et limiter vos mouvements involontaires :

Remplissez un bol d’eau, à ras-bord, au point que la moindre secousse devrait le faire déborder ; prenez alors ce bol entre vos deux mains, en coupole, de telle façon que vous ne pouvez en détacher une pour tenir le bol avec l’autre seulement. Puis… commencez à parler, à raconter une histoire, ou à répéter un exposé ! En veillant bien sûr à ne pas tout renverser par terre ou sur vous.

Remarques : cet exercice est à faire debout, dans votre cuisine, ou un endroit avec du carrelage de préférence… Pour les plus entraînés, vous pouvez risquer quelques déplacements, pas trop brusques ni trop rapides : cela vous obligera à vous tenir bien droit même en marchant. Enfin, plutôt que de travailler devant un miroir, ce qui vous contraint à rester concentré sur votre reflet tout en parlant, il est préférable de se filmer ou se faire filmer, et découvrir ensuite son image.

L’isolement et l’entraînement

Comme tout processus d’apprentissage et de perfectionnement, devenir un bon orateur peut se révéler long et fastidieux. Il est donc important de rester concentré, et de garder intacte sa volonté. On raconte que Démosthène s’obstina à progresser en s’isolant dans un bâtiment souterrain pour mieux travailler. Il se rasa même le crâne et la barbe pour s’empêcher de sortir (ne voulant être vu de la sorte).

Dans votre cas, inutile d’aller vous enfermer dans la cave pour vous adonner à l’art oratoire… Mais il est important que vous ayez un lieu dédié à votre pratique. Pourquoi pas votre chambre, votre salon, où encore une salle de formation. L’espace doit vous être réservé, si possible spacieux et dégagé, et vous ne devez pas craindre de déranger qui que ce soit en élevant la voix.

Gardez également en tête que se former à l’éloquence exige du temps, et vous devez pour cela être prêt à y consacrer au moins une heure d’affilée, un ou plusieurs jours par semaine. Prenez cette activité au sérieux, au même titre que vos autres activités, professionnelles, sportives ou familiales, et réservez-vous un moment spécial pour cela. Travailler sa voix est un rendez-vous avec soi-même. Notez-le dans votre agenda comme tout autre rendez-vous important, et organisez votre emploi du temps en fonction.

Ce qu’il faut retenir de l’histoire de Démosthène, c’est que son talent en matière d’art oratoire ne tient pas à un quelconque « don », à une prédisposition ou à une qualité innée. Il était mauvais, et a travaillé dur pour devenir le meilleur. On s’est moqué de lui pendant des années, lors de ses premiers discours, il a été chahuté et humilié… Puis on s’est mis à l’écouter, on a reconnu en lui un véritable orateur… Et plus de 2000 après, on parle toujours de lui comme d’un modèle d’éloquence.

C’est en ce sens que Démosthène occupe une place à part parmi les grands orateurs de l’Antiquité. Il a marqué à jamais la rhétorique et l’art oratoire. Il nous a laissé de nombreux et ingénieux exercices de perfectionnement à l’oral, qui font encore leurs preuves aujourd’hui. Il demeure une source d’inspiration pour toutes celles et tous ceux qui souhaitent s’exprimer avec brio, porter leurs idées avec force et conviction, et remporter l’adhésion de leur public.

V Becmeur

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26 juin 2015 5 26 /06 /juin /2015 08:56

Aujourd’hui, je vous propose un billet prompt à susciter le recueillement, voire la componction : le quinquennat Hollande aura en effet été parsemé de nombreux enterrements, tragiques comme ceux liés aux attentats sur la rédaction de Charlie Hebdo, ou solennels comme le déplacement de résistants au Panthéon. À chaque fois, on aura multiplié les pompes, grandioses, les mobilisations du public ou des médias, mais décidément, les plus coûteux ne sont pas ces occasions-là. De loin, les enterrements les plus coûteux furent ceux des logiciels dont l’État voulait se doter pour simplifier sa tuyauterie administrative. C’est donc à une petite rétrospective que je vous convie ici.

Et si les grandes entreprises privées modernes sont, informatiquement parlant, à la pointe du progrès, n’hésitant jamais à dégoter des idées géniales, à faire appel à du big data et à parfois claquer des millions en technologies avant-gardistes, en centres de calcul surpuissants et en méthodologies de développement agiles et souples, lorsqu’on parle d’informatique et de services de l’État, il sera difficile de se débarrasser de cette idée d’un marécage boueux et collant de technologies disparates, dépassées, de tubulures complexes et fragiles et d’une immonde série de processus antédiluviens que personne n’osera remettre à plat tant les connaissances attachées à ces processus ont disparu avec le départ en retraite des fonctionnaires à leurs origines.

De ce point de vue, on aura même tendance à confirmer cette impression avec les expériences plus ou moins douloureuses d’informatisation dans certains domaines, comme le RSI par exemple, à tel point que certains parlementaires en sont à demander une remise à plat complète, ou plus général encore, Pôle Emploi lorsqu’il s’est agi de fusionner l’ANPE avec les ASSEDIC. À chaque fois, le résultat fut rocailleux, pour le dire gentiment, et les usagers en subissent encore les conséquences, parfois graves, de nos jours.

Difficile aussi de passer sous silence l’incroyable aventure de Louvois, l’applicatif dont l’objectif était au départ de gérer l’ensemble des soldes des militaires français, et dont le développement aura rapidement dépassé toutes les prévisions budgétaires pour aboutir à une facture finale de plus de 480 millions d’euros, dénoncée par une Cour des Comptes frôlant l’apoplexie. Un petit demi-milliard d’euros auquel devront s’ajouter une ribambelle de millions d’euros pour les trop-perçus, les erreurs de soldes, les coûts de corrections et de dysfonctionnements qui ont coûté à la Défense entre 150 et 200 millions d’euros par an, c’est-à-dire peu ou prou l’équivalent des économies permises par les réductions d’effectifs que le logiciel aurait dû permettre. Et pompon de l’affaire, Louvois étant déclaré incorrigible, le ministre de la Défense a finalement jeté l’éponge et enterré, purement et simplement, le monstrueux logiciel. Ce n’est pas grave, c’est l’État qui paye, n’est-ce pas.

Bien évidemment, le problème initial (celui du calcul des soldes militaires) n’étant donc pas résolu, il a fallu remettre en chantier un nouveau logiciel. Rassurez-vous, la facture s’établit pour le moment à 128 millions d’euros (ce n’est pas grave, c’est l’État qui paye), et la nouvelle application sera réalisée par SOPRA, qui vient de fusionner avec STERIA, la fine équipe qui avait produit la précédente performance artistique. Forcément, tout va bien se passer.

Et puis tant qu’on est dans les logiciels de paie, il serait dommage de ne pas mentionner l’Opérateur National de Paie (ONP), développé par le consortium Accenture-Logica-SOPRA. Ce progiciel fabuleux devait gérer la paye de 2,5 millions de fonctionnaires à partir de 2017. Je dis « devait » parce qu’après avoir investi des centaines de millions d’euros depuis 2007, l’État a décidé, là encore, d’enterrer ce projet, en l’annonçant le 4 février dernier aux 500 personnes mobilisées à temps plein sur le dossier. L’objectif de l’ONP, qui était de réaliser 190 millions d’euros d’économies par an, se traduira donc par un trou. Et quel trou ! Le naufrage de ce logiciel-ci s’établit mollement autour de 346 millions d’euros, en pure perte donc. Ne vous inquiétez pas, ce n’est pas grave, c’est l’État qui paye.

Décidément, l’État semble abonné aux catastrophes informatiques majeures, et ce, dès qu’il s’emploie à nettoyer, remettre à plat et fusionner ses systèmes afin de faire des économies. Tout se passe comme si, justement, la simple velléité affichée de faire des économies se traduisait immédiatement par des dérapages proportionnellement plus grands que les économies espérées. Ces économies, toujours présentées comme majeures, aboutissent donc de façon paradoxale à des poubellisations de logiciels et des dépassements budgétaires bien supérieurs.

Dès lors, peut-on être rassuré lorsqu’on apprend que le ministère de la Justice s’est lancé à son tour dans une refonte de son logiciel de gestion des détenus, baptisée Genesis ? Son objectif affiché est de remplacer le fichier national des détenus et le logiciel Gide, qui recensent les décisions concernant les détenus. Malheureusement, les blocages, bugs, dysfonctionnements et anomalies s’empilent doucement au point de ralentir tout le petit monde de la Justice en France, déjà assez peu suspect d’alacrité compulsive. Pire, ce nouveau logiciel devait permettre de connaître le montant déposé sur le compte nominatif où sont inscrites les valeurs pécuniaires de chaque détenu, et d’effectuer ses virements vers les parties civiles selon les règles prévues à l’article D320, avec une « quote-part » obligatoire, versée automatiquement aux victimes comme dommages et intérêts. Las : cette opération n’est plus possible par le logiciel, ce qui pénalise les victimes, et les détenus (leurs remises de peines dépendant aussi des montants versés en dédommagement, montants devenus impossibles à connaître dans la nouvelle usine à gaz). Le logiciel, produit par SOPRA (pure coïncidence), ne fonctionne donc pas du tout.

Combien ce logiciel va-t-il (nous) coûter à l’État, en développement, en maintenance corrective, en cris, en grincements de dents, et surtout, en enterrement lorsqu’on verra qu’il n’est finalement pas récupérable ? Plus à propos, compte-tenu de l’actualité et compte-tenu de l’historique global des grands projets informatiques gérés par l’État, peut-on raisonnablement attendre une bonne réussite du basculement de l’impôt actuel au prélèvement à la source planifié en plein milieu d’élections présidentielles ?

Pour ma part, mon avis est fait : forcément, tout ça va bien se …..

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22 juin 2015 1 22 /06 /juin /2015 15:08

Une page est à tourner sur le dialogue social à la française : il est urgent de passer à des modes de relations totalement différents.

Les économistes s’accordent unanimement pour considérer que la qualité du dialogue social est un facteur clé de la compétitivité de l’économie d’un pays, tout particulièrement dans le contexte de cette économie mondialisée dans laquelle nos entreprises se trouvent plongées. Les pays où le dialogue social fonctionne bien, c’est-à-dire où les débats entre les représentants du monde des salariés et ceux du monde patronal se mènent dans un esprit constructif, procurent à leurs entreprises, et tout spécialement à celles exposées à la concurrence internationale, la possibilité d’être flexibles et de s’ajuster, en permanence, aux nécessités du marché. Avec un bon dialogue social, patrons et salariés parviennent à s’accorder sur l’analyse des difficultés auxquelles les entreprises de leur pays se trouvent à un moment donné confrontées, et ils sont alors à même de s’entendre sur les dispositions à prendre pour assurer le succès de celles-ci. Le dialogue social doit bien fonctionner, à la fois au niveau des branches d’activité et, aussi, évidemment, au niveau des entreprises elles-mêmes, chaque entreprise constituant en fait un cas particulier avec des problèmes spécifiques à régler.

Un dialogue social français inexistant

L’économie française, depuis l’apparition au milieu du XIXème siècle de la révolution industrielle, souffre d’un handicap sévère : l’absence de dialogue social, du moins d’un dialogue social s’effectuant dans un climat de bonne entente entre salariés et patrons, et ce en raison du succès particulier qu’ont eu dans notre pays les thèses de Karl Marx, avec la publication en 1848 du « Manifeste du Parti Communiste ». Cette absence de dialogue social qui caractérise la France a fait classer ce pays au 137ème rang, sur 144 pays examinés par le Forum de Davos, pour ce qui est de « La qualité de la coopération dans les relations de travail ». Et un sociologue connu, comme Alfred Grosset, qui a enseigné à Sciences Po Paris, n’a pas hésité à affirmer dans le journal Libération du 29 janvier 2015, à propos des tentatives faites par François Hollande pour dynamiser le dialogue social en France : « Il ne faut pas renouveler le dialogue social en France, il faut simplement le créer ».

On en est donc là ! La France présente, en effet, la caractéristique particulière d’être une société où les partisans du marxisme déterminés à modifier l’ordre social par la voie révolutionnaire ont, dès le début de la création des syndicats, tenté de prendre le pas sur ceux qui, tout en adhérant aux mêmes thèses, ont opté pour la voie réformatrice. En sorte que très tôt on a eu d’un coté les partisans de la voie tracée par la Troisième Internationale avec les thèses de Lénine, et de l’autre les « socialistes », conduits par des leaders comme Jaurès, puis ensuite Léon Blum, partisans d’un combat à mener par des voies démocratiques. Mais toujours, dans l’un et l’autre cas, il s’est agi, et c’est ce qu’il est important de prendre en compte, de faire triompher les thèses marxistes de la lutte des classes.

Une histoire du syndicalisme fortement marquée par la lutte des classes

Il faut se remémorer, en effet, pour bien comprendre les raisons pour lesquelles le dialogue social fonctionne mal en France, les éléments fondamentaux de la thèse développée par Marx, philosophe qui a affirmé dans son manifeste que : « L’histoire des sociétés humaines jusqu’à nos jours n’est rine d’autre que l’histoire de la lutte des classes ». Pour le marxisme, la lutte des classes est ainsi une vérité historique. Il s’agit de lutter contre le patronat pour parvenir à une société idéale où l’on se sera débarrassé du travail salarié, ceci en passant par une dictature du prolétariat.

Le droit syndical fut reconnu en 1884, et la Confédération Générale du Travail, la CGT, fut créée en 1895 par une unification du mouvement syndical français. Cette grande organisation syndicale a été fortement influencée, dès l’origine, par les anarcho-syndicalistes. Au Congrès de Limoges, ville où naquit la CGT, il a été affiché que le syndicalisme avait vocation à « préparer l’émancipation intégrale qui ne peut se réaliser que par l’expropriation capitaliste ». Il y eut, ensuite, au Congrès confédéral de la CGT, en 1906, la Charte d’Amiens, dont l’article 2 dit explicitement que la vocation de cette organisation syndicale est « la lutte à mener pour la disparition du salariat et du patronat ». Cette charte a toujours constitué la référence théorique du syndicalisme en France. Elle est, en somme, son ADN. Elle a assigné au syndicalisme un double objectif : défense des revendications immédiates des travailleurs et lutte pour une transformation d’ensemble de la société, et ce en toute indépendance des partis politiques, avec comme moyen d’action la grève générale. Cette prise de position à l’égard des partis politiques est demeurée par la suite l’une des caractéristiques qui a différencié le syndicalisme français du syndicalisme des pays du Nord de l’Europe, et tout particulièrement du syndicalisme allemand qui, lui, est un syndicalisme où s’est opérée dès les origines une étroite symbiose entre le parti socialiste, le SPD, et le mouvement syndical. Une différence donc tout a fait fondamentale par rapport au syndicalisme français.

Ensuite, en 1919, se créa la CFTC, syndicat chrétien fidèle à la doctrine sociale de l’Église catholique. Puis, avec les très importantes grèves de 1920, l’opposition entre réformistes et révolutionnaires se développa, en sorte qu’en 1921 s’opéra, à Tours, une scission au sein de la SFIO qui donna naissance au Parti Communiste Français. Et, au sein de la CGT, se produisit alors une séparation entre le courant communiste qui prit son indépendance en créant la CGTU (CGT Unitaire), et le courant plus modéré, d’obédience socialiste, qui resta fidèle à la charte d’Amiens.

Par la suite, en 1948, au lendemain de la seconde guerre mondiale, il y eut une nouvelle scission au sein de la CGT, les adhérents refusant la mainmise du parti communiste sur ce syndicat, créant la CGT-FO. Et, en 1960, intervint aussi, au sein de la CFTC, une scission qui donna lieu à la création de la CFDT.

Ainsi donc le mouvement syndical français se trouva-t-il progressivement morcelé. Néanmoins, les influences marxistes demeurèrent toujours très fortes, partout : en 1936 il y eut fusion entre la CGT et la CGTU puis le Front Populaire prit corps avec une alliance de toutes les forces de la gauche, ce qui valut au monde du travail bon nombre d’avancées sociales importantes. Le gouvernement de Léon Blum dut négocier avec le monde ouvrier l’évacuation de toutes les usines occupées par les grévistes, et il y en eut un nombre considérable, contre l’octroi d’avantages sociaux extrêmement importants : semaine de 40 heures, congés payés, et mise en place des Conventions Collectives….. C’est ce que l’on appela les accords de Matignon.

Et une influence toute particulière du communisme

Il y eut, ensuite, du fait du rôle important que joua le parti communiste français dans la résistance, et de la victoire éclatante de l’URSS sur l’Allemagne nazie, une influence très forte du PCF sur toute la vie politique française. Au 26ème Congrès de la CGT, en 1946, cette organisation syndicale, qui comptait 5 millions d’adhérents, se trouva dominée par les communistes. Et les premiers gouvernements constitués au lendemain de la guerre comptèrent des ministres communistes. Par la suite, on vit l’influence des communistes décliner régulièrement, mais, néanmoins avec François Mitterrand et son Programme commun de la gauche, les communistes en 1981 revinrent à nouveau au pouvoir, quatre ministères leur étant concédés dans le gouvernement Mauroy.

Ainsi, depuis la Révolution bolchevique de 1917 jusqu’à une période relativement récente, les communistes ont-ils joué un rôle important dans la vie politique de la France et tout particulièrement dans les luttes menées par le monde ouvrier contre le patronat. Les thèses marxistes pénétrèrent profondément les esprits, non seulement dans le monde ouvrier, mais aussi dans une bonne partie de la société y compris dans l’intelligentsia française.

Avec la chute de l’Union Soviétique, en 1991, l’influence des communistes dans la vie politique française déclina, évidemment, au point qu’elle s’est à présent fortement restreinte. Mais le tissu social français n’en reste pas moins sourdement imprégné par le marxisme, les patrons étant vus davantage comme des exploiteurs des salariés que comme des créateurs de richesses. Et l’on sait que, dans leur tréfonds, les Français, généralement, n’aiment guère les riches. Les syndicats français ont ainsi toujours refusé de prendre de quelconques responsabilités dans la gestion des entreprises, préférant limiter leur rôle à s’arcbouter sur la défense des acquis sociaux et à revendiquer, en permanence, de nouvelles avancées sociales.

Tout est à reprendre

On se retrouve ainsi, aujourd’hui, en France dans une situation particulière : un mouvement syndical éclaté entre plusieurs organisations qui se font en fait concurrence, des syndicats très peu représentatifs du fait que le taux de syndicalisation est extrêmement faible dans notre pays, de l’ordre de 3% à 4 % seulement dans le secteur marchand, alors que l’on a des taux de 70% à 80% dans les pays nordiques, des syndicats par trop portés par des idéologies et incapables de fonctionner avec les seules cotisations de leurs adhérents, des syndicats bénéficiant, par conséquent, de financements importants de la part de la collectivité, et des dirigeants syndicaux qui sont des permanents par trop soucieux de leur propre carrière. Aussi, pour compenser les insuffisances du dialogue social, l’État s’est-il octroyé au cours du temps le rôle d’animateur du dialogue social, et aussi de partenaire, au titre de ses responsabilités en matière de cohésion sociale et de sauvegarde de l’intérêt général.

On a abouti, ainsi, à un code du travail de quelque 3.600 pages, fait d’une accumulation de textes législatifs et réglementaires pour les salariés sous contrat de travail de droit privé. Ce code constitue pour les entreprises un corset d’une rigidité extrême. Sa complexité et son ossification constituent un frein très puissant à l’embauche et au développement des entreprises, tout particulièrement des jeunes entreprises encore très fragiles au plan financier, et dont les dirigeants ont à consacrer toute leur énergie à se forger des avantages compétitifs plutôt qu’à se plier à des réglementations paralysantes et très chronophages, qui, s’ils ne les respectent pas scrupuleusement, peuvent leur coûter très cher.

La situation dans laquelle se trouve la France en matière de dialogue social est donc à la fois absurde et intenable. Les syndicats sont dans une culture de confrontation, une confrontation « rarement dénuée d’arrières pensées politiques » nous dit le journaliste Gabriel Vedrenne dans une chronique récente d’Europe 1. Il serait donc urgent de pouvoir y remédier car il y va du bon fonctionnement de nos entreprises dans un monde devenu on ne peut plus concurrentiel.

Les pouvoirs publics en ont d’ailleurs pris conscience. Ainsi Nicolas Sarkozy avait-il déclaré, au début de son mandat en 2007 : « Je souhaite que les cinq prochaines années soient celles d’une revitalisation profonde du dialogue social ». Et François Hollande a mis en œuvre dès son arrivée au pouvoir un processus dit de « modernisation », ou encore de « dynamisation », du dialogue social, consistant à organiser chaque année un grand rendez-vous entre les partenaires sociaux pour les contraindre à négocier sur des thèmes déterminés, dans le cadre de « Grandes conférences sociales » qui se tiennent chaque année au Conseil Économique et Social à Paris. La dernière Grande Conférence s’est tenue les 7 et 8 juillet 2014. Elle a réuni quelque 300 personnes invitées à débattre sur sept grands thèmes différents. Il s’en est suivi, selon la procédure fixée par la loi Larcher du 31 janvier 2007, une note d’instruction adressée par le ministre du Travail aux 8 partenaires sociaux autorisés par l’arrêté du 31 mars 1966 à débattre (cinq organisations salariées et trois patronales), leur fixant les trois thèmes sur lesquels allait porter cette année la négociation : renforcer la qualité du dialogue social, améliorer l’effectivité du droit à la représentation des salariés, et valoriser le parcours des délégués syndicaux. Il fut fixé aux partenaires sociaux un délai de quatre mois pour aboutir à des accords précis, ceux-ci devant donner lieu à la promulgation d‘une nouvelle loi par le Parlement en début d’année 2015. À défaut d’entente entre les parties, le gouvernement indiquait qu’il s’autoriserait à déterminer lui-même le contenu de la loi à promulguer.

Comme la presse l’a révélé, la CGT et FO quittèrent dès le second jour les bancs de la Grande Conférence de juillet, et les négociations entre les partenaires sociaux qui durèrent quatre mois débouchèrent, en décembre 2014, sur un échec. Le gouvernement tint donc ses engagements et le ministre Rebsamen entreprit de préparer un projet de loi qui fut soumis à l’examen de l’Assemblée Nationale le 26 mai dernier. L’intitulé de ce projet de loi choisi par le ministre fut le suivant : « Ameliorer l’efficacité et la qualité du dialogue social au sein de l’entreprise ».

Toutes les améliorations apportées de cette manière au dialogue social en France, au fil des années, ne résolvent en rien le problème : ce ne sont jamais que des améliorations de détail, des ajustements à la marge qui laissent la situation du dialogue social en France en l’état. Des lois se rajoutent indéfiniment aux lois, et le caractère des relations existant entre les représentants du monde salarié et ceux du patronat ne s’en trouve en rien modifié.

L’Allemagne et les Pays Bas, deux exemples pour nourrir notre réflexion

Il est donc urgent de passer à des modes de relations totalement différents : une page est à tourner sur le dialogue social à la française, un système qui n’est ni le modèle travailliste à l’anglaise ni le modèle social démocrate à l’allemande. Pour ce faire, on pourrait soit s’inspirer de l’expérience des Allemands où le dialogue entre représentants du monde salarié et représentants du patronat a toujours bien fonctionné, soit copier le modèle néerlandais.

Comme on le sait, les Allemands en sont arrivés à ce que l’on dénomme la « cogestion » dans les entreprises, en 1951 : dans ce système, les représentants des salariés et ceux du patronat, dans les entreprises de plus de 2.000 personnes, se trouvent représentés à égalité dans un « Conseil de surveillance », le président, obligatoirement issu des actionnaires, ayant une double voix. Et c’est ce Conseil de surveillance qui nomme les membres du directoire. Ainsi, les représentants des salariés disposent-ils de pouvoirs sur la détermination de la stratégie de l’entreprise, sur les décisions d’investissement, sur les projets de restructuration, etc. Ce système qui associe étroitement les représentants du personnel à la gouvernance des entreprises modifie totalement la nature des relations existant dans un pays entre les salariés et les patrons. Ceux-ci œuvrent, en somme, en commun pour créer de la valeur ajoutée et ils décident, ensemble, de la manière de se répartir les profits.

Le système hollandais est tout différent. Il fonctionne parfaitement depuis l’accord de Vassenaar de 1982, car il est fondé sur un principe de confiance entre des partenaires animés du souci de trouver des consensus. Ce dispositif fonctionne avec deux structures différentes : la Fondation du Travail (STAR) d’un côté, et le Conseil Économique et Social de l’autre (SER). La Fondation du Travail est un lieu de concertation bipartite où se mènent des travaux en vue de conclure des arrangements et des accords collectifs : elle formule régulièrement des recommandations qui sont faites au gouvernement. Le Conseil Économique et Social, le SER, est, lui, un organisme tripartite dont le rôle est de conseiller le gouvernement. Il est constitué de 33 membres : 11 côté employeur, 11 côté salariés, et 11 experts indépendants nommés par la Couronne. Les recommandations formulées par le Star sont soumises pour avis au SER et ces avis sont pratiquement toujours suivis par le gouvernement. On est donc avec le système néerlandais dans un processus efficace de recherche en permanence de compromis.

Il faudrait donc qu’à l’occasion d’une prochaine élection présidentielle il soit dit qu’en France on va enfin tourner la page sur la manière de faire fonctionner le dialogue social. Le futur président proposerait aux syndicats de salariés et aux syndicats patronaux d’abandonner le Code du travail actuel en échange de la mise en place, soit du système allemand soit du système néerlandais : en somme, un deal « donnant donnant ». Le nouveau code du travail se bornerait à fixer par la loi quelques principes fondamentaux en matière de droit du travail, laissant les partenaires sociaux fixer eux-mêmes par des accords bipartites les dispositions qu’ils adoptent ensemble pour régir les relations de travail dans les entreprises, au niveau tant des branches que des entreprises elles-mêmes.

Cette révolution est à faire si possible à l’occasion des futures élections présidentielles de 2017. L’économie française, si ces réformes pouvaient se réaliser, s’en trouverait totalement métamorphosée

C.Sicard

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19 juin 2015 5 19 /06 /juin /2015 09:18

Eh oui !!! le Baccalauréat 2015 a bien commencer avec la traditionnelle épreuve de philosophie. Comme les années passées, on trouve bien évidemment le lot habituel de sujets « bateaux » (« Suis-je ce que mon passé a fait de moi ? ») ou qui caressent gentiment le chaton mignon qui sommeille en chacun de nous (« Respecter tout être vivant, est-ce un devoir moral ? »). Plus intéressant cette année, on découvre une question piquante dans l’actuel contexte gouvernemental : « La politique échappe-t-elle à l’exigence de vérité ? »

Facétie d’un corps professoral particulièrement agacé par l’actuelle réforme du Collège, passée avec la délicatesse d’un gouvernement en mode Panzer (49/3) ? Désir de vouloir réveiller des centaines d’élèves en les faisant réfléchir sur l’incroyable écart entre ce que le politicien promet et ce qu’il délivre, mandat en poche ? On ne saura pas trop ce qui a abouti à poser une telle question dans les sujets du bac 2015, mais reconnaissons un certain courage aux enseignants pour avoir osé un tel sujet.

Courage d’abord parce qu’il faut bien le reconnaître, poser la question, c’est un peu y déceler la réponse d’un corps enseignant réputé pour avoir voté massivement pour l’actuel président et qui doit trouver sa pilule bien amère à avaler, si tant est que ce ne soit pas carrément la socratique ciguë : entre la pluie drue d’impôts tous azimuts, la douche froide de la non-création de postes réclamés pourtant à cor et à cri par certains syndicats enseignants, l’introduction pour le moins chaotique de nouveaux rythmes scolaires ou la fameuse réforme des collèges, difficile pour le gouvernement de trouver grâce auprès d’un groupe qui a longtemps compté dans son électorat.

Dans ce contexte, les dénégations répétées de la ministre en charge du dossier n’ont absolument pas aidé à apaiser les tensions et peut-être la question du sujet répond-elle, en creux, aux allégations de « mensonges éhontés » qu’elle a proférées ces dernières semaines.

Par extension, ce courage se retrouve dans le traitement d’une question qui rappelle de façon lancinante l’état réel de la politique en France actuellement, où, précisément, tout lien avec la vérité semble avoir été perdu.

Et il n’est même pas besoin de rappeler la longue suite d’affaires scabreuses, financières ou phobico-administratives que la République aura endurées ces dernières années pour étayer le point en question, tant l’actualité nous envoie, telle une tarte à la crème béhachélesque, une réponse toute faite à la figure. D’ailleurs, nulle autre que Ségolène Royal ne pouvait espérer présenter ainsi une si magnifique exemplification de l’échappatoire politique à toute exigence de vérité.

Apparemment déjà bien remontée dans les tours suite à sa décision d’interdire le Roundup au premier janvier prochain (en réalité, une interdiction de sa vente libre en rayon pour une vente encadrée), Mamie Ségolène ne voulait pas s’arrêter là et s’est donc lancée dans une énième diatribe à l’encontre de Nutella, abominable création qui provoquerait, outre d’énormes bénéfices absolument pas compatibles avec la morale socialiste, des déforestations, de l’obésité mondialisée et une sensation pleine de noisette sur les tartines des petits et des grands, ce qui n’est pas le moindre des scandales (on en conviendra aisément).

Invitée au Petit journal de Canal+, la ministre socialiste évoquait benoîtement l’attrape-nigauds climatique de fin d’année, le COP 21, quand elle a décidé de flanquer quelques claques à la pâte à tartiner :

«Il faut replanter massivement des arbres parce qu’il y a eu une déforestation massive qui entraîne aussi du réchauffement climatique. Il faut arrêter de manger du Nutella par exemple parce que c’est l’huile de palme qui a remplacé les arbres. Et donc il y a eu des dégâts considérables. »

On passera très vite sur l’huile de palme qui remplace des arbres en supposant charitablement que notre ministre voulait dire en réalité qu’on a remplacé une forêt tropicale par des plantations de palmiers huiliers, de même qu’on ne s’attardera pas trop sur les exagérations concernant la déforestation, monnaie courante de nos jours.

En revanche, on pourra se demander ce qui a poussé la ministre à sortir une telle charge sur un produit qui, s’il a peut-être des défauts, demeure une production industrielle assez bien maîtrisée et plutôt respectueuse de l’environnement (huile de palme certifiée durable), et dont l’impact économique est particulièrement important : sa production bénéficie directement aux exploitants de palmiers dont plus de la moitié ne sont pas des multinationales, mais bien des petites entreprises familiales ; quant à la pâte elle-même, pour la France, elle est produite … en Seine-Maritime, à Villers-Ecalles, à 15 km de Rouen.

Autrement dit, les bêtises de Royal menacent directement la vie de dizaine de milliers de petits exploitants dans le monde (dont c’est la seule ressource) ainsi que les 330 salariés de Ferrero France à Villers-Ecalles qui sont probablement ravis de voir ainsi leur production clouée au pilori.

En outre, on se perd en conjecture sur la pertinence de rattacher encore une fois le réchauffement climatique sur cette attaque idiote contre un produit qui, si l’impact anthropique était significatif, n’y contribuerait de toute façon pas le moins du monde.

L’énormité de la déclaration ministérielle aidant, la polémique a pas mal enflé au point de déclencher un début de crise diplomatique. On se souvient que fin 2014, les idées aussi sottes que grenues de Sapin et Touraine, visant à stigmatiser l’huile de palme, avaient particulièrement agacé le gouvernement malaisien qui s’en était ouvert par écrit auprès du gouvernement français. Cette fois-ci, c’est l’Italie qui n’a pas goûté aux petites piques idiotes de la ministre française. À Rome, les autorités italiennes s’en sont indignées dans un tweet acide du ministre de l’écologie italien, Gian Luca Galletti, qui a violemment rembarré Mamie Ségolène :

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Gian Luca Galletti @glgalletti

Segolene Royal sconcertante: lasci stare i prodotti italiani. Stasera per cena... pane e #Nutella

19:30 - 16 Juin 2015


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« Que Ségolène Royal laisse les produits italiens tranquilles. Ce soir au menu : pain et Nutella »

Eh oui : en l’occurrence, la vérité, M’ame Royal, c’est que vos petites idées sur la déforestation sont grandement exagérées. Et ouvrir son bec pour sortir des âneries peut provoquer des effets très indésirables auprès d’individus qui ne vous ont rien fait et qui travaillent certainement bien plus dur que vous pour assurer leur existence.

Cependant, si d’habitude, il semble assez clair que la politique échappe à l’exigence de vérité, il en fut cette fois-ci autrement : puisqu’il était question de courage quelques paragraphes plus haut, reconnaissons-en même un peu à Ségolène qui aura fini par s’excuser devant la tempête provoquée, ce courage, ou, plus probablement ce petit éclair de lucidité étant d’autant plus à souligner qu’il manque cruellement à d’autres ministres.

Cette histoire de pâte-à-tartiner montre finalement que si la politique n’échappe pas toujours à l’exigence de vérité, elle échappe en tout cas de plus en plus à toute exigence de pertinence.

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17 juin 2015 3 17 /06 /juin /2015 08:29

Dépassant les clivages partisans, le socialiste Arnaud Montebourg et l'ex-ministre de Sarkozy, Yves Jégo, s'associent pour promouvoir les produits fabriqués en France.

Il débarque, tonitruant : «Montrez-moi les machines! J'adore! Je like! Tout est fait à Paris? I love Paris.» Arnaud Montebourg virevolte dans cet atelier de maroquinerie du Ier arrondissement parisien. Il est là pour lancer avec Yves Jégo, député de Seine-et-Marne (UDI) et maire de Montereau-Fault-Yonne, Vive la France, une association de promotion du made in France. Ce dernier arrive : « Tu as mis un Smuggler? » demande-t-il à l'ancien ministre de l’Économie. Les deux retournent leur veste et montrent le sigle Origine France garantie, qui certifie les produits fabriqués en France, dont font partie ces costumes coupés à Limoges. Jégo est à l'origine de ce label, lancé il y a trois ans et déjà porté par 400 entreprises en France, soit 1500 gammes de produits : «Du biscuit à la voiture en passant par des sacs à main», dit-il. Montebourg avait fait du made in France sa marque de fabrique quand il était au gouvernement. Il avait, à l'époque, soutenu l'association de Jégo. Quand il a quitté son ministère, ce dernier lui a envoyé un message privé sur Twitter, ils ont déjeuné et l'idée de s'associer a fait son chemin. «On a pensé que ce combat devait être sorti du champ politicien, confie Jégo. Quand Montebourg tient ce discours, il est qualifié de protectionniste par sa famille politique, et la mienne me traite d'hurluberlu. Il nous fallait le dire ensemble.»

Un ex-UMP devenu UDI, un socialiste en rupture de mandat, « deux anciens ministres, l'un de Nicolas Sarkozy, l'autre de François Hollande », dixit Jégo, réunis pour promouvoir le made in France en dehors des partis. Jégo détaille : « La machine étatique est lourde. On peut faire plus de choses dehors qu'en étant aux responsabilités. On est plus libre. » Montebourg renchérit : « Ne pensez pas que la politique appartient à une caste. Cela appartient à tous les citoyens. Il n'y a pas d'un côté ceux qui font de la politique et de l'autre ceux qui regardent.» Il porte des rouleaux de peaux aux couleurs du drapeau français. Jégo lui lance : « C'est quoi le message? C'est pour tous ceux qui ont voulu notre peau? » Le chantre de la démondialisation attrape un marteau et entonne : « Si j'avais un marteau...»

Montebourg fait du Montebourg. Il amuse son public entre deux tirades sur son sujet de prédilection : « Le message, c'est le rassemblement des forces du fabriqué en France. Il est partout dans notre société, mais inorganisé. Pour nous, il doit être une grande cause nationale. Quand j'étais au ministère, j'ai lancé cette bataille. » Il refuse de dire si, depuis son départ, ce combat a été abandonné. D'ailleurs, ne l'interrogez pas sur sa récente tribune cosignée avec le banquier Matthieu Pigasse critiquant l'action du gouvernement. « Vous nous ramenez toujours à la politique politicienne! » s'agace-t-il... Officiellement en retrait de la politique, il a pourtant l'art de toujours se rappeler au bon souvenir des siens. Mais aujourd'hui, le seul sujet dont Montebourg est disposé à parler est le made in France. Pour le reste, passez votre chemin. Il avance sur une crête, entre deux vies, ne sachant pas toujours sur quel pied danser. « Je ne sais pas où je vais », fanfaronne-t-il. De son porte-monnaie dépasse une carte de Vélib. « J'adore ça! » cabotine le compagnon d'Aurélie Filippetti. Un porte-monnaie pas made in France : « Que voulez-vous, c'est un cadeau de l'amour! »

Les 10 et 11 septembre, il organise avec Jégo les Assises du produire en France, à Reims. Un rendez-vous qui abolirait les frontières partisanes en rassemblant « politiques de droite et de gauche, chefs d'entreprise et syndicalistes, consommateurs et producteurs », annonce Montebourg. Son « faites l'amour pas la guerre » à lui en quelque sorte. Son credo d'aujourd'hui.

Caroline Fontaine

C’est entre deux sacs cousus main, dans l’atelier de maroquinerie parisienne laContrie, qu’Yves Jégo et Arnaud Montebourg lancent leur association Vive la France. © Kasia Wandycz

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16 juin 2015 2 16 /06 /juin /2015 15:53

Manuel Valls utilise le 49.3 pour faire passer la loi Macron : politiquement audacieux, économiquement lamentable.

Pour la seconde fois du quinquennat, le gouvernement va utiliser l’article 49-3 pour clore le débat sur la loi Macron. Rappelons rapidement que le célèbre alinéa de l’article 49 de la constitution inverse les rapports de force entre l’exécutif et l’Assemblée : en effet, il permet au gouvernement d’imposer un texte immédiatement et sans discussion sauf à remettre en cause son autorité par une motion de censure.

Bien évidemment, si le gouvernement démissionne, l’Assemblée nationale (enfin, la majorité présidentielle surtout) trinque aussi : la cinquième république, et encore plus avec la réforme du quinquennat, fait des députés majoritaires les éternels suiveurs de l’exécutif, à qui ils doivent postes, réputation et émoluments. Les députés socialistes et plus largement de gauche « frondeurs », dans la majorité mais pas trop quand il s’agit d’assumer les réformettes de la loi Macron, étaient dans une position douloureuse. Qu’ils soutiennent un gouvernement impopulaire ou votent avec la droite, ils risquaient dans les deux cas de perdre leurs sièges aux prochaines élections, et cela au plus grand bénéfice de la gauche de la gauche. Du point de vue de Manuel Valls, il fallait à la fois éviter de voir s’effriter la majorité, de se faire encore plus d’ennemis au sein du parti et surtout de montrer des signes de faiblesse politique sur des réformes attendues avec impatience par Bruxelles.

Maintien de la mascarade socialiste en état

Le choix du 49.3 était donc un choix politique stratégique certes abrupt mais intelligent : il permet de maintenir la mascarade politicienne socialiste en l’état pour quelques temps encore, quitte à passer pour autoritaire, ce qui n’est pas pour déplaire à un certain public lassé de l’image de mollesse du gouvernement.

La situation n’est pas sans rappeler Rashomon (1950), le célèbre film de Kurosawa, dans lequel plusieurs personnes voient la même scène tout en l’interprétant de diverses manières. En jouant sur le 49.3, Valls fait montre de son inflexible réformisme devant Bruxelles, la gauche du PS peut apparaître la tête haute devant son électorat, puisqu’elle n’aura pas à justifier sa « trahison » face au pseudo-libéralisme de la loi Macron, et le gouvernement sauve sa peau jusqu’à la prochaine catastrophe majeure en poussant une réforme mi-chèvre mi-chou. En d’autres termes, contrairement à ce qui a pu s’écrire ici ou là, Valls a fait en quelque sorte une fleur à l’aile gauche du PS en la lestant de toute responsabilité dans cette histoire, lui permettant de mimer une opposition interne au parti présidentiel tout en offrant à l’Allemagne l’image d’un social-libéralisme de carton-pâte.

Seulement, si l’équilibre au sein de la majorité semble sauf, le grand perdant reste tout de même l’État et ceux qui devront supporter sa faillite, c’est-à-dire les citoyens ordinaires : le brouillard médiatique savamment entretenu par les affidés du gouvernement autour du pseudo-libéralisme de la loi Macron permet sans doute d’enfumer nos partenaires européens, mais ne doit pas tromper sur son profond conservatisme : cajoler les clientèles électorales et lancer quelques idées en l’air ne suffiront pas, hélas, pour éviter la faillite du modèle social français.

F MAS

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11 juin 2015 4 11 /06 /juin /2015 08:36

"Haaaa, là, c’est pile-poil un sujet économique… Oui, puisque notre mamamouchi de Matignon a coûté 15 000 euros aux con-tribuables, d’après les estimations, avec sa petite escapade en Allemagne pour voir un match de foot.
Est-ce une honte et un scandale ? Non dans l’absolu. Oui dans la pratique. Voici les éléments de réflexion que je voulais partager avec vous au sujet de cette polémique bien plus importante que ce qu’elle peut sembler être.

Le ridicule de Hollande faisant Paris-Tulles en voiture aller-retour…

J’avais, il y a quelques temps, dénoncé le ridicule de notre Président faisant l’aller-retour Paris-Tulles dans la journée pour ne pas prendre l’avion et ne pas risquer le courroux populaire sur les coûts engendrés, le tout pour aller voter dans sa région.
J’avais trouvé cela totalement stupide. Soit le Président vote par correspondance, soit il prend l’avion présidentiel dont c’est l’objet et assume sa fonction.

Il ne faut pas tomber dans la démagogie consistant à exiger de nos responsables qu’ils aillent forcément au camping et fasse de l’auto-stop pour leurs déplacements. Le problème vient aussi du fait que nombre de politiciens… veut faire peuple… et quand on veut faire peuple ou que l’on s’arroge le droit de décerner des prix de vertu, il faut être irréprochable.

Le problème n’est pas tant donc que Valls soit allé voir ce match avec ses gamins que le fait que son gouvernement a une dérive de plus en plus totalitaire servant à masquer une absence de résultats durables sur globalement l’ensemble des grands sujets qui préoccupent les Français.

Disons-le, le bilan de ce gouvernement, au sens large en y incluant le président de la République, est globalement nul et tend vers le zéro absolu.

L’exigence d’exemplarité née de l’austérité imposée et des leçons de morale permanentes…

On ne peut pas demander aux Français de faire des efforts, d’avoir sans cesse moins de droits, moins de possibilités et de payer de plus en plus d’impôts pour un service rendu de plus en plus mauvais, et de l’autre côté donner l’impression de se gaver aux frais de ces mêmes personnes.

Thévenoud est toujours à l’Assemblée nationale. Valls prend l’avion pour un match de foot qu’il avait sans doute très envie de voir… Cela n’est pas un drame, ce n’est même pas forcément illégal… mais ce n’est pas exemplaire.

Le problème de la vertu et des limites c’est où les met-on ? Comment les pose-t-on ? Quand peut-on utiliser l’avion et quand ne peut-on pas le faire ?

Car finalement, dans tout cela, ce qu’il manque cruellement à nos dirigeants et ce, quelle que soit leur couleur politique, c’est le bon sens de la simplicité et de l’exemplarité.

Comment Valls peut-il me parler de « justice sociale » en prenant un avion à 15 000 euros qu’il n’aurait sans doute pas dû prendre ? En réalité, notre Premier ministre n’aurait jamais dû se trouver dans cette situation car le fait même se retrouver pris dans une telle polémique montre qu’il commence tout simplement à perdre le sens des réalités quotidiennes que vivent ses concitoyens.

Être exemplaire sera une qualité indispensable pour nos prochains et futurs dirigeants. Exemplaires, honnêtes, intègres et aussi, disons-le, altruistes. Notre époque de vénalité ne peut pas engendrer ce type de dirigeants et nous ne devons pas être étonnés de ce que nous avons.

Mais les choses changent, et les époques aussi. Leur temps est désormais compté et bientôt d’autres viendront, aux valeurs profondément différentes".

Avec des femmes et des hommes redonnant du Sens au SENS, des hommes et des femmes se préoccupant de l'intérêt général, des hommes et des femmes voulant réunir ceux qui veulent un société plus JUSTE

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