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  • : Le blog de Jean-Loup
  • : Engagé, depuis plusieurs décennies dans une démarche visant à lutter contre tous les processus d'exclusion, de discrimination et de ségrégation socio-urbaine, je suis persuadé que si nous voulons « construire » une société reposant sur un véritable Vivre Ensemble. Il nous faut savoir, donner du sens au sens, prendre le temps de la concertation et faire des propositions en adéquation avec les besoins de nos concitoyens.
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30 avril 2016 6 30 /04 /avril /2016 12:55

Le recul de l'espoir communiste porté dans le « Tiers monde » de jadis par la force de l'Union soviétique, a laissé la place à des espérances religieuses, dans un monde bien plus difficile à comprendre pour les populations les moins formées de la planète, que l'affrontement Est-Ouest d'autrefois.

Deux riches états alliés, ont préparé de longue date ces idéologies d'affrontement d'abord, puis de substitution ensuite, au communisme, les USA et l'Arabie saoudite.
Voici un article synthétique et éclairant sur les éléments qui ont participé au succès de ce grand renversement :

L'islam sunnite et le protestantisme évangélique sont les deux courants religieux qui progressent le plus rapidement et qui gagnent le plus grand nombre de nouveaux convertis aujourd'hui dans le monde. Ainsi par exemple, en Amérique du Sud, continent d'origine du pape François, le catholicisme perd de très importantes "parts de marché" face à l'évangélisme. Et il est inutile de rappeler que les différents courants chrétiens qui ont connu une présence bimillénaire au Proche et au Moyen-Orient sont en passe d'être quasiment tous éliminés de la région par les extrémistes sunnites - à l'exception notable des 8 millions de Coptes sous protection de l'Etat égyptien laïc.

Pourquoi ce succès mondial de l'évangélisme et du sunnisme? Par delà l'alliance historique, économique et géopolitique nouée entre les USA et le royaume Saoudien ayant permis d'assurer leur succès conjoint au cours du XXe siècle, il convient de souligner que ces deux courants religieux sont les plus "en phase" avec le processus actuel de la mondialisation néolibérale depuis les années 1980, processus dont les deux grands principes fondamentaux sont: l'individualisme et le rejet de toute autorité institutionnelle surplombante - en particulier celle de l'Etat. L'évangélisme et l'islam sunnite offrent ainsi l'avantage d'être deux idéologies universalistes de masse, lesquelles peuvent s'étendre sans limite, sans distinction et sans exclusive à tous les humains sur toute la surface de la planète. Les conditions d'entrée dans la communauté universelle des croyants ou des "frères" y sont minimales (sinon minimalistes!), et les exigences spirituelles et rituelles y sont facilement accessibles à chacun - y compris depuis son ordinateur! Ce sont en quelque sorte deux universalismes "low cost"...

En regard de ces deux idéologies, les autres idéologies universalistes disponibles sur le marché peuvent sembler dépassées et ringardes, voire "archaïques" à un grand nombre de gens, mais aussi élitistes, voire "discriminatoires" ou même "racistes" (sans doute leur plus grave défaut au regard des normes sociales actuelles!), particulièrement aux yeux des jeunes générations plongées dès leur naissance dans le grand bain mondialisé: que ce soit le républicanisme, le socialisme ou bien encore le catholicisme - et même le sionisme (je ne parlerai pas ici du "césaro-papisme" de la Russie orthodoxe de Poutine qui sert principalement de repoussoir aux Occidentaux). Car ces idéologies qui ont pris leur essor au XIXe siècle (à l'exception notable certes du catholicisme, lequel a néanmoins connu au XIXe siècle un durcissement de sa doctrine face aux idéologies modernes qui lui faisaient concurrence), sont toutes liées à l'existence d'institutions particulières dont l'autorité surplombante est censée s'exercer sur une communauté dont les limites sont fixées a priori (tout le monde n'y est pas admis d'office!): l'Etat exerce son autorité sur la communauté des citoyens en République, le parti-Etat exerce son autorité sur le "peuple" ou le prolétariat en régime socialiste, l'Eglise catholique et apostolique romaine exerce son autorité sur la communauté des fidèles, et enfin l'Etat sioniste est conçu dès l'origine comme l'Etat des Juifs par Th. Herzl. Autrement dit, ces idéologies ne disent pas à chacun, à l'instar de Ronald Mac Donald: "venez comme vous êtes", mais plutôt: "faites un effort ou un travail sur vous mêmes, afin de vous conformer à un certain idéal ou un certain modèle de vie". De là à considérer que ces idéologies "exigeantes" seraient l'apanage des "Blancs", il n'y a qu'un pas ... que certains ont déjà sauté depuis belle lurette!

En somme, la mondialisation nous confronte, en ce début de XXIe siècle, à des questions théologico-politiques que la plupart de nos gouvernants se gardent bien de poser publiquement car ils seraient bien incapables non seulement d'y répondre, mais même seulement d'en saisir le sens et la portée - engoncés qu'ils sont dans un économicisme étroit et à courte vue ("seule la croissance nous sauvera") qui les empêche de pouvoir seulement comprendre ce qui nous arrive collectivement. A moins qu'ils n'aient déjà pris leur parti des évolutions en cours...?

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29 avril 2016 5 29 /04 /avril /2016 07:05

Quand…on ne mesure pas « l’efficacité » de la dépense publique !!!

Quand l’État lève un impôt, il supprime la dépense qu’aurait faite le contribuable au lieu de payer cet impôt. Mais personne ne mesure la performance de l’État par rapport à celle du contribuable.

Il existe deux volets dans la dépense publique. Le régalien (armée, police, justice, diplomatie, fisc, législateur, …) constitue l’armature de la nation et assure l’ordre public, plus ou moins bien, depuis des millénaires. Sans ces institutions et les dépenses qui assurent leur fonctionnement, pas d’État ni de Nation. On constate que ces dépenses… baissent depuis des décennies.

Le second volet, largement développé au XXe siècle, rassemble toutes les dépenses de l’État ou para-étatiques qui « aident » au développement économique. Aides aux entreprises, aux individus, en particulier les « pauvres » ou réputés tels, ou encore financement des « services publics » ou considérés comme tels (énergie, éducation, santé, routes, …). Ces dépenses augmentent depuis des décennies.

L’effet d’éviction : chaque euro dépensé par l’État ne l’est pas par le contribuable

Or, quand l’État lève un impôt ou s’endette et dépense ou investit cet argent, il supprime la dépense ou l’investissement qu’aurait fait le contribuable au lieu de payer l’impôt ou de rembourser la dette. On notera que le problème est exactement le même si l’État réussit à recouvrer de l’impôt non acquitté à la suite d’une « fraude fiscale ».

Si ce point n’est pas pertinent pour le domaine régalien, la question pendante, parce que jamais posée ni mesurée, est celle de l’efficacité de la dépense publique du second volet. Cette « efficacité » économique se juge objectivement, à condition de la définir. Le but de l’activité économique est clairement de fournir à la population de la nation, au moindre coût, tout ce qu’il faut pour manger, se soigner, se loger, s’habiller, s’instruire, se distraire. L’« efficacité » se mesure alors par le volume des ventes de biens et de services à ladite population. Encore faut-il que ces biens et services soient achetés librement par des clients. Un sous-ensemble du PIB est une mesure, très approximative et biaisée, de ce résultat.

Personne ne mesure la performance de la dépense de l’État par rapport à celle du contribuable

La question clé est donc la suivante : hors dépenses régaliennes, quelle est la production finale de biens et de services achetés résultant de l’injection de 1 000 € de dépenses de l’État par rapport à 1 000 € de dépenses ou d’épargne des contribuables citoyens ou entreprises ? Accessoirement, quand le gouvernement s’endette, en quoi cette dette supplémentaire va-t-elle concourir à produire au moins assez de richesses pour la rembourser, avec ses intérêts ?

Il est clair que l’un des « grands principes » de la comptabilité nationale (la « non affectation des recettes aux dépenses ») est loin de contribuer à assainir le débat … D’autre part, aucune loi se voulant « économique » ne porte jamais la moindre évaluation de ses résultats attendus en termes de ventes de biens et de services. Encore moins la mesure de ces résultats dans le temps.

Qu’est-ce qui nous empêche de mesurer cette performance, outil de pilotage de la politique économique ?

Nous disposons pourtant par l’INSEE de très nombreuses statistiques en tous genres, fort précises, dont pour le moment on se garde bien de « sortir » les agrégats mesurant cette efficacité de la dépense publique. C’est pourtant cette efficacité concrète qui légitime, ou pas, l’action des pouvoirs publics, l’impôt et la dette de l’État … plutôt que les arguments actuels qui relèvent davantage de l’idéologie ou de l’incantation.


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26 avril 2016 2 26 /04 /avril /2016 11:19

Un détail dans la dernière déclaration d’impôt est venue raviver la polémique concernant l’intérêt exclusif que porte le gouvernement français aux publics dits fragilisés, au détriment des classes moyennes… qui ne le sont plus vraiment à force d’être ponctionnées de tous les côtés.

On le sait, la politique gouvernementale de ces dernières années est définitivement orientée vers l’aide aux plus défavorisés. En effet, presque toutes les recettes fiscales semblent mobilisées pour compenser, directement ou non, les inégalités de revenus des Français. En soi, c’est une excellente chose car il est inconcevable pour un pays économiquement performant comme le nôtre qu’une partie de sa population ne puisse bénéficier des fruits de sa réussite. Pour autant, on est en droit de s’interroger sur la méthode employée, qui semble privilégier la répartition des richesses sur un plus grand nombre de têtes plutôt que d’essayer d’accroître la richesse globale (quitte à ce que soit en priorité au profit des moins fortunés).

Mais non, en France, on préfère payer et combler les trous plutôt que de s’attacher à comprendre ce qui a pu les creuser. Et l’impôt, dans sa fonction théorique d’outil de redistribution, est donc assez révélateur de cette habitude bien française qui consiste à panser les plaies plutôt qu’à mener des actions de fond autrement plus utiles pour trouver des explications, voire des remèdes, à ces inégalités.

Un détail qui veut dire beaucoup

Citons un exemple, un simple détail de rien du tout, mais qui reflète bien le peu de considération qui est accordé à ceux qui travaillent quotidiennement pour créer la richesse du pays. Les premières déclarations de revenus pour 2015 sont arrivées dans les boîtes-aux-lettres et, une fois encore, un point précis suscite l’incompréhension chez certains contribuables. Car pour Bercy, les demandeurs d’emploi sont censés avoir plus de frais professionnels que les personnes en activité.

Vous pourrez vérifier : le montant de la déduction forfaitaire de 10 % pour frais professionnels des salariés ne peut être inférieur au minimum prévu par l’article 83-3° du CGI, soit 426 € pour 2015. Or, les chômeurs inscrits auprès de Pôle emploi depuis plus d’un an bénéficient d’un montant minimum de déduction différent, qui s’élève, pour l’imposition des revenus de l’année de 2015, à 937 €. Ne soit plus du double de frais professionnels minimum pour des personnes qui ne travaillent pas depuis plus d’un an.

Une politique inefficace de nivellement par le bas

Difficile de croire à une incohérence. On y verrait plus facilement un effet supplémentaire de cette politique complaisante de nivellement par le bas, qui tend à entretenir une certaine forme de sous-prolétariat là où, au contraire, il faudrait trouver des solutions pour sortir plusieurs millions de personnes de la précarité. Récemment encore, on apprenait que le gouvernement allait étendre l’attribution du RSA aux personnes de moins de 25 ans, alors qu’il faudrait au contraire réfléchir à un moyen pour que tous ces jeunes de 18 à 25 ans accèdent plus efficacement au marché du travail. Jeunes ou moins jeunes d’ailleurs, les gens n’ont pas besoin d’une aumône de 400 ou 500 euros par mois, mais bien d’une véritable perspective d’avenir.

De la même façon, fixer à 937 euros le seuil de déduction des “frais professionnels” pour les demandeurs d’emploi ne contribue qu’à envoyer un message doublement négatif aux contribuables. Aux chômeurs d’abord, à qui on fait comprendre implicitement qu’ils auront fiscalement peu d’intérêt à trouver un emploi salarié leur rapportant moins de 10 000 euros de revenu imposable par an, ce qui exclut d’emblée quasiment tout emploi à mi-temps (ou même à temps plein au SMIC pour ceux qui ont charge de famille) qui leur aurait pourtant permis de reprendre contact avec l’emploi après plus d’un an d’inactivité. Mais le gouvernement envoient également un signal défavorable aux salariés, à qui il laisse entendre qu’ils ont finalement moins de droits que ceux qui ne travaillent pas, tout en leur demandant par ailleurs de contribuer toujours un peu plus à l’impôt. En effet, les recettes fiscales de l’impôt sur le revenu ne cessent d’augmenter d’année en année (76 milliards d’euros en 2015 contre 50 milliards en 2011) tandis que le nombre de contribuables imposables, lui, ne cesse de baisser pour atteindre aujourd’hui 46% des ménages français, alors qu’ils étaient plus de 52% il y a encore 3 ans.

Alors à quand une politique fiscale efficace ET respectueuse de chacun ? Comme d’habitude, on va nous la promettre à l’occasion des prochaines élections, mais force est de constater que, depuis 40 ans, elle continue de diviser les différentes composantes de la population alors qu’elle devrait au contraire contribuer à renforcer le sentiment d’équité face aux besoins de la nation tout entière.

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18 avril 2016 1 18 /04 /avril /2016 10:38

Ça va mieux ? Non, mais surtout ne changeons rien !

Jeudi 14 avril dernier, le Président de la République a tenté de partir à la « reconquête » des Français dans la nouvelle émission de France 2 Dialogues citoyens et il leur a dit : « Ça va mieux. » Quelques heures auparavant, Julien Dray, député de l’Essone et membre du Bureau national du Parti socialiste, préparait le terrain en assurant sur la chaîne parlementaire LCP que grâce à ses mesures clairvoyantes, le gouvernement « est en train de réussir économiquement. » D’après lui, la France bénéficierait même de « résultats macro-économiques remarquables. » Seul petit problème, « visiblement, personne ne s’en rend compte. »

Son collègue Cambadélis, premier secrétaire du PS, a la solution : il y a des résultats, mais il faut procéder à quelques ajustements mineurs d’ordre communicationnel. « Le temps de la pédagogie est arrivé » a-t-il déclaré. Hélas pour le PS, les Français ne semblent plus guère décidés à écouter sagement le Professeur Hollande.

On peut créditer Julien Dray d’une bonne analyse sur au moins un point : à supposer qu’il y ait quelque chose de positif à voir, les Français ne s’en rendent très visiblement pas compte. Il n’est que de considérer le dernier sondage de popularité disponible, réalisé par l’institut Yougov pour le Huffington Post les 30 et 31 mars derniers. La cote globale du gouvernement atteint son plus faible score jamais enregistré dans ce baromètre, soit 12 %. François Hollande tombe à 13 % d’opinions favorables et le Premier ministre Manuel Valls atterrit à 20 %. Ce dernier garde cependant la majorité chez les sympathisants PS-EELV, ce qui n’est plus du tout le cas du chef de l’État. Cruel désaveu pour la méthode Hollande.

De fait, au sein de l’exécutif, la situation de François Hollande est particulièrement douloureuse. C’est assez logique dans la mesure où il est à la tête du pays et où le changement de majorité survenu en 2012 s’est fait sur son nom, sa personnalité, son programme et ses promesses. Interrogés par l’institut de sondages Odoxa quelques jours avant sa prestation sur France 2, les Français sont 71 % à déclarer ne pas être intéressés par cette émission, 76 % pensent que François Hollande devrait renoncer à se représenter en 2017 (pour laisser la place à un meilleur candidat socialiste, ce qui en dit quand même long sur la sympathie viscérale pour le socialisme), 83 % pensent qu’il ne réformera plus et 53 % prédisent même qu’il ne s’engagera dorénavant que dans des mesures électoralistes.

Même Sarkozy n’a jamais fait l’objet d’une telle déconsidération empreinte d’une sorte d’indifférence teintée de mépris agacé. Dans ces conditions de rejet qu’aucun autre Président de la Vème République n’a jamais expérimentées, on comprend que le terme « reconquête » vienne spontanément à l’esprit des observateurs de notre vie politique. Certains n’ont pas manqué de remarquer que le format de l’émission de France 2, comme les quatre membres de la société civile conviés spécialement pour faire remonter leurs préoccupations, avaient été taillés sur mesure afin de lui permettre de retrouver à coup sûr le coeur des Français. Au lieu de quoi nous avons eu droit à l’ennui de plus en plus tenace que le radotage compulsif du Président ne manque pas de générer à chaque nouvelle prise de parole.

À le croire, la France expérimente avec bonheur un contexte économique porteur dans lequel il y a « plus de croissance, moins de déficits, moins d’impôts et plus de compétitivité. » Quant au chômage, dont la fameuse inversion de la courbe reste d’actualité pour son avenir politique, il est sans doute plus élevé qu’en 2012, mais finalement, vu dans l’ensemble européen, on aurait tout lieu de se réjouir :

N’en déplaise à MM. Dray et Cambadélis, si les Français s’obstinent à ne rien discerner de positif dans les accomplissements du gouvernement, c’est peut-être tout simplement parce qu’il n’y a justement rien à voir. Du Monde à Metronews en passant par Le Figaro, la presse s’est largement fait l’écho des petits arrangements avec la réalité auxquels le Président, précédé de ses thuriféraires, s’est livré sans vergogne jeudi soir. Pour reprendre une expression fréquemment utilisée par les anglo-saxons, François Hollande s’est montré « économe avec la vérité », mais c’est bien le seul domaine où l’on pourra le taxer de parcimonie.

Non, M. Hollande, le chômage que nous connaissons n’a rien à voir avec ce qu’il devrait être dans un pays européen comme le nôtre. Non seulement il a énormément augmenté depuis 2012 alors que la crise de 2008 commence à s’éloigner, mais les comparaisons dans l’Union européenne sont loin d’être flatteuses. Si, avec plus d’à propos, on s’en tient à nos voisins anglais et allemands, dont l’économie est d’une taille comparable à la nôtre, nous sommes purement et simplement au double d’eux (5 % environ au Royaume-Uni et en Allemagne contre 10 % en France). Rappelons que la France avec son outre-mer comptait 4,6 millions de chômeurs en catégories A, B et C en mai 2012, et que ce chiffre est maintenant de 5,8 millions à fin février 2016. Rappelons également que le taux de chômage des jeunes est de 25,9 % contre une moyenne de 19,7 % dans l’UE et 22 % pour la zone euro seule.

Non, M. Hollande, les comptes publics ne prêtent nullement à la gloriole. Si le déficit public creusé en 2015 est légèrement inférieur à celui de 2014, il ne faut y voir que le jeu des taux d’intérêt maintenus bas par la BCE et les prix du pétrole en baisse, toutes situations qui ne doivent rien à la lucidité de vos politiques publiques. Ces dernières, élaguées de l’effet taux d’intérêt et de l’effet prix du pétrole, se sont au contraire vautrées comme d’habitude dans la croissance des dépenses, des impôts et des cotisations sociales. Vu le niveau de la dette publique, qui augmente toujours, vu la faible croissance de l’activité et la faible confiance en l’avenir des agents économiques, la remontée des taux ainsi que celle des prix du pétrole seraient simplement catastrophiques pour notre économie.

François Hollande n’a jamais parlé plus justement que quand il s’est objecté à lui-même par pure rhétorique :

« Quand le Président dit que ça va mieux quand il y a tant de difficultés, on se demande s’il voit bien, s’il écoute bien, s’il a bien pris conscience des réalités. » Dialogues Citoyens, le 14 avril 2016, France 2.

À ce stade, on comprend même les yeux fermés que si personne ne se rend compte des bons résultats de la politique de François Hollande, c’est uniquement parce que ces résultats n’existent que dans la propagande gouvernementale, laquelle est totalement dépendante de la trouille électorale qui commence à saisir les socialistes aux tripes. Méthode Hollande ou pas, cela ne marche pas.

Prenons Anne Hidalgo, par exemple. Une socialiste en bonne et due forme, quoique un peu frondeuse, au moins par alliance (son mari est le député des Hauts-de-Seine Jean-Marc Germain, membre des Frondeurs). Eh bien Anne Hidalgo est terriblement inquiète et a fait part de ses émotions à VSD, repris par Le Figaro :

« L’échéance 2017 sera difficile pour ma famille politique parce qu’on ne peut pas dire qu’on a démontré une grande efficacité dans les réalisations et on a un peu tourné le dos aux engagements. »

Voilà qui est parler clair et sans chichis, quoique de façon un peu trop portée sur la litote. La grande efficacité qu’on n’a pas démontrée est en fait un goût prononcé pour la faillite, tandis que les engagements auxquels on a un peu tourné le dos ne sont rien d’autres que des promesses de campagne qui n’engagent que ceux qui les croient. Toujours est-il que pour Anne Hidalgo, la grande erreur du gouvernement tient à ce qu’il s’est montré :

« conservateur sur les questions de société et ultra-libéral sur les questions économiques. »

Comme quoi, des goûts et des couleurs politiques ! Parce que si je devais résumer l’action du gouvernement en m’en tenant aux réalisations actées dans les livres et les chiffres, je dirais 1. qu’il a légalisé le mariage homosexuel, ce qui n’est pas particulièrement conservateur sur le plan sociétal, et 2. que la part du public dans le PIB atteint 57 %, ce qui éloigne à jamais la France de tout libéralisme, même ultra-mini.

La vie politique française est entièrement faite de ces semi-lucidités contradictoires, qui n’épargnent ni les hommes politiques ni les citoyens. J’en arrive ainsi à ce que souhaiteraient les Français pour 2017. Bien formatés par la propagande marxiste qui sévit chez nous depuis l’après-guerre, bien convaincus par les cadres collectivistes qui marquent notre politique économique depuis la même époque, et complètement accros à l’État-providence qui scella l’indispensable union nationale consécutive à la victoire sur l’Allemagne nazie, ils restent pour la plupart convaincus qu’un socialiste, par construction, est un être hautement moral doublé d’un gentil et triplé d’un généreux.

Les autres, ceux qui se disent de droite, s’alarment en plus de la façon dont les socialistes conçoivent leur « déficit » de politique sociétale. Mais tous, des notaires à la syndicaliste recalée de l’émission Dialogues citoyens, partagent le goût national pour la « protection » de l’État, depuis la réussite garantie au Bac jusqu’à la couverture sociale des actifs et la retraite, jusqu’à, pourquoi pas, des revenus minimum universels garantis, en passant par les politiques de santé et les recommandations diététiques.

C’est ainsi que nos candidats présidentiels, déclarés ou pas, de gauche ou de droite, Hollande ou Juppé, nous le promettent tous : on va réformer, mais sans remettre en cause notre modèle social et notre service public. Eh bien ça, mes amis, ce n’est pas possible, tout simplement parce que c’est le poids toujours croissant de l’État qui nous empêche de réformer, qui creuse jour après jour le chômage et plombe la croissance.

Cet empêchement prend deux formes. La première est directe : tout l’argent consacré à la survie de l’État-providence et à l’embauche de fonctionnaires, argent qui vient des cotisations sociales et des impôts, est autant de moins pour l’investissement privé seul à même de générer la valeur ajoutée qui entraînerait de la croissance, des revenus supplémentaires et des emplois supplémentaires. La seconde est indirecte mais terriblement pernicieuse car elle est philosophique : chaque jour qui passe renforce l’idée que cet État-providence est un acquis éternel, chaque homme politique qui répète sans la moindre remise en cause qu’il n’est pas question d’y toucher accrédite l’idée que ça vaut le coup de le garder en l’état, que ça vaut le coup de se battre pour en conserver tous les éléments.

Vu comme cela, de Juppé à Hollande et de Hollande à Mélenchon, les manifestations contre la loi Travail ou la Loi Macron, aussi minuscules et aussi faiblement libérales soient ces lois, ne sont jamais que l’expression populaire de cette mortifère idée répétée en boucle sur tout l’échiquier politique de ne pas toucher à notre modèle social, que le monde entier nous envie sans avoir jamais tenté de le mettre en place.

À peine vocalisées, à seule fin d’afficher un réformisme de façade pour quelques bénéfices à court terme vis-à-vis de l’Union européenne, les lois libéralisantes sont proprement évidées et la promesse de ne toucher à rien est promptement remise sur le devant de la scène, au grand soulagement de presque tout le monde. « La France est irréformable » entend-on soupirer de-ci, de-là. Il est d’autant plus facile de soupirer d’un air faussement entendu, qu’on est sûr que rien, absolument rien ne se passera, jusqu’à ce qu’une vraie catastrophe (remontée des taux, par exemple) ne nous laisse plus aucun choix.

Nathalie MP.

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17 avril 2016 7 17 /04 /avril /2016 12:50
Ce matin je lisais deux billets d'un ami sur Facebook, ils m'ont interpellé. Il m'a semblé intéressant de les soumettre a votre sagacité 

Premier Billet 

Ce soir, je suis allé à la Nuit debout, Place de la République.
Je ne pensais pas y découvrir grande chose de neuf.
Mauvaise évaluation, j'ai pris une grosse leçon d'anthropologie et de sociologie.
J'arrive, un débat est en cours. Des centaines de gens sont assis, preuve que la nuit debout ne l’est qu’au sens figuré. Une dame s'exprime avec beaucoup de fougue en anglais, avec un traducteur, Elle exprime aux gens qui sont là qu'ils sont le seul vrai pouvoir et que ce qui est vraiment décisif c'est que chacun d’entre eux, ne parle que pour lui-même, il ne défend que ses propres intérêts, le parterre applaudit après une incitation par l'interprète : « Vous pouvez tout de même vous applaudir ».
Puis on passe aux affaires sérieuses.
La Commission médias vient s'exprimer devant l’Assemblée générale. Tout d'abord elle exige qu'on aille plus loin dans la démocratie directe et demande que le mandat qui lui est confié soit absolument impératif de façon à trancher avec la vieille politique.
On vote. Désormais cette commission média qui est chargée de faire des communiqués de presse ne les écrira plus que sur mandat impératif. Le vote est unanime. On sent bien que c'est un peu compliqué d'écrire à plusieurs centaines un communiqué de presse, mais la commission va écrire toute seule avec un mandat impératif.
Puisqu’ qu'il est impératif, elle ne peut pas trahir la pensée des centaines de personnes qui sont là, C'est une évidence.
Après ce vote enthousiaste la représentante de la commission vient exposer le mandat impératif qu'elle voudrait obtenir de l'assemblée : « Les médias font pression sur nous pour avoir une réaction sur les violences » et de proposer d’écrire un communiqué pour dire que « la Nuit debout dénonce la pression des médias pour obtenir une réaction sur les violences, alors que la violence, c’est celle de l'exploitation capitaliste ». « Comme nous l'avons toujours dit »  ajoute-t-elle. J’entends bien qu'aujourd'hui le temps médiatique va très vite mais entendre parler de « toujours » dans un mouvement qui n'a encore que quelques jours, m’a rendu rêveur.
Et là, la dame détaille un point de vue classique des anarchistes sur la violence légitime des opprimés, que j'avais déjà entendu à la cafétéria de l’université de Vincennes dans les années 70.
Elle annonce donc que le communiqué racontera tout ça et sollicite un vote pour lui donner un mandat impératif qui l’obligera à le faire.
Las ! Ce n'est pas l'idée du parterre. L'idée de ne pas répondre à la presse par un communiqué de presse qui dirait qu'on ne lui répond pas, suivi d'un discours très compliqué sur la violence, cela n'accroche pas. On préfère ne pas répondre du tout…
On fait un premier vote, elle n'obtient que 10 % de l’assemblée, son compère déclare alors que ce n'est pas clair, que la salle est partagée. Certes la salle est partagée, 90% contre et 10% pour. Dans la démocratie bourgeoise ça s'appelle un échec cuisant.
Mais nos jeunes amis ne vont pas s'arrêter là, comme Madame a échoué c'est Monsieur qui va s'essayer, et la discussion va recommencer puisque « la salle est partagée ». Avec la même rhétorique les mêmes « jamais » les mêmes « toujours », Monsieur a beau être un peu plus long que Madame, avoir la voix plus forte, il ne convainc pas plus, Pire, il décourage la minorité qui les suivait.
Un vote a lieu de nouveau cette fois-ci il est pratiquement unanime, les minoritaires ayant préféré baisser le nez.
Et bien, que croyez-vous qu'il arriva ?
On annonça à l'assemblée médusée, mais impuissante et grognante, que, comme si elle avait refusé un Traité constitutionnel européen, on allait lui refourguer dans quelques instants le mandat impératif qu'elle ne pourrait pas ne pas voter pour un Traité de Lisbonne, et qu'elle en mangerait qu'elle le veuille ou non.
Grosse leçon : au temps du numérique, il ne faut que quelques heures pour que s’installe la bureaucratie la plus insouciante de ses mandants, dans un mouvement spontanéiste aux exigences ultradémocratiques de mandats impératifs. Il ne lui faut que quelques jours pour qu'elle arrive à refaire, en plus rapide, les plus mauvaises séquences de la « démocratie bourgeoise » des dernières années.
Nuit debout a de l’avenir.
La commission média est prête, en tout cas…

Deuxième Billet 


J'ai appris, en rentrant chez moi, qu'au même moment que moi, se trouvait, place de la République, celui dont pendant deux ans j'ai eu la chance d'être le voisin horaire sur France Culture, et ainsi eu l'occasion de rencontrer et connaître, et apprécier personnellement, après l'avoir, auparavant, apprécié intellectuellement, Alain Finkielkraut.
J'ai aussi découvert, inquiet, non seulement ce qui lui est arrivé, mais la façon dont certains s'en flattent.
En politique, Il faut toujours essayer de se mettre à la place de l'autre, essayer de comprendre ce qui se passe dans sa tête, car on ne peut pas considérer que l'autre lui-même se considère comme un « salaud ».
Ces jeunes intériorisent tellement la violence symbolique du déluge médiatique qu'ils reçoivent – dont tel ou tel d'entre nous peut faire partie, parce qu'il s'exprime un jour sur les antennes, sans en être nécessairement le deus ex machina – qu'ils ont le sentiment d'une « violence légitime » lorsqu'ils peuvent s'en prendre physiquement à lui.
Car ils sont incapables de l'affronter intellectuellement, et lui reprochent amèrement leur impuissance à le faire. Ils n'ont pas la réaction immédiate de l'affrontement politique, qui consisterait à lui ouvrir la tribune et à lui demander de s'adresser à l'auditoire, puis lui répondre et engager un débat politique avec lui, loin des idée et commentaires préformés du média. Ils auraient là toutes leurs chances de l'emporter, puisque ce sont leurs amis qui constituent la salle, et que ce n'est pas Frantz-Olivier Giesbert qui décerne les bons et les mauvais points à la fin de l'émission. Par ressentiment ou autre passion triste, ils ne peuvent qu'appliquer une démarche d'exclusion et de violence physique à un de ceux qui leur semble, confusément, car tout chez eux est confus, participer à la confiscation de la parole.
Mais, on sent bien dans leur mouvement passionnel, que si celui-ci les rapprochait du pouvoir, c'est une solution totalitaire vengeresse, qui leur semblerait indispensable pour rééquilibrer la chose. Puisqu'il n'acquerraient jamais par leur méthode, la capacité intellectuelle de se confronter à qui n'est pas d'accord avec eux.
Car tout se passe comme si la demande réelle de chacun d'entre eux était : « tout, tout de suite, pour moi, comme tous ces gros richards qu'on voit s'ennuyer dans leurs jets privés dans Amour, gloire et beauté ».
C'est-à-dire une demande essentiellement formatée par l'hyperconsommation, le fascinant « illimité », dont ils sont le produit. La quête de l'avoir, le rejet de l'être
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9 mars 2016 3 09 /03 /mars /2016 07:47

Le 21 mars prochain, l’application en France d’une directive européenne sur le crédit immobilier risque de rendre inéligibles au rachat de crédits la plupart des demandeurs les plus fragiles… c’est à dire ceux qui, justement, ont le plus besoin de regrouper leurs crédits pour éviter le surendettement.

Sur le fond, la directive européenne sur le crédit immobilier a un objectif parfaitement légitime, et même louable, puisqu’elle vise à renforcer la protection des consommateur à l’échelle communautaire face à une offre de crédit immobilier dont les pratiques demandaient à être harmonisées. L’ennui, c’est que, comme bien souvent, Bruxelles a oublié de tenir compte d’une spécificité bien française, elle aussi destinée à protéger les consommateurs : le taux d’usure.

Petit rappel. En France, les taux d’intérêts sont libres et ils dépendent généralement à la fois du montant emprunté, de la durée du prêt, mais aussi du profil de l’emprunteur et du projet éventuel justifiant la demande de crédit. Néanmoins, afin d’éviter des abus de la part des prêteurs (un risque purement théorique, rassurons-nous), le législateur a mis en place des taux plafonds, appelés aussi taux d’usure, qu’il est strictement interdit de dépasser. Là encore, ces taux d’usure vont dépendre des sommes prêtées, des durées et des projets financés et correspondent à 133% des taux moyens constatés.

Chaque trimestre, ces plafonds sont révisés pour tenir compte des fluctuations des taux du marché. Ainsi, au 1er janvier 2016, le taux d’usure pour les crédits immobiliers à taux fixe s’établissait à 3.96 % par an. Un niveau, il est vrai incroyablement bas quand on se souvient des taux normaux d’il y a dix ans (souvent supérieurs à 5%) mais parfaitement cohérent aujourd’hui avec des offres qui peuvent désormais descendre jusqu’à 1.55 % sur 20 ans.

Le rachat de crédits, quant à lui, est une opération permettant d’alléger considérablement ses remboursements en regroupant tous ses emprunts sous un seul et même crédit, généralement à un taux bien plus avantageux que les différents taux d’origine, surtout si les crédits sont anciens. Ainsi, une famille accumulant par exemple des crédits à la consommation, des cartes de financement (revolving), un crédit auto, un découvert autorisé, etc., peut facilement retrouver une situation financière plus confortable avec un seul emprunt qui rachèterait tous les autres, la mensualité unique étant très souvent bien inférieure à la somme de toutes les mensualités précédentes. Bien évidemment, le taux d’intérêt dépendra toujours du profil de l’emprunteur, de la somme et de la durée du nouveau crédit, et s’établira en général sur une base de crédit à la consommation (au maximum 7.61%). Mais si le rachat concerne également un prêt immobilier et que la part de l’immobilier dépasse 60% du montant total refinancé, le regroupement sera considéré comme un prêt immobilier. Avec cette fois un taux d’intérêt qui ne pourra donc dépasser 3,96%.

Évidemment, tous ces rachats de crédits sont assortis de garanties pour permettre à l’établissement de crédit d’équilibrer son risque lorsqu’elle prête à des personnes fragiles (à ce titre, si les taux sont plus bas dans le cas de regroupements incluant une part majoritaire de créance immobilière, c’est parce qu’un bien immobilier constitue généralement une garantie optimale). Et c’est justement là que réside le problème avec la mise en place prochaine de la directive européenne, car celle-ci prévoit que tout crédit (ou rachat de crédits) assorti d’une garantie, que ce soit par hypothèque ou par cautionnement, devient de facto un prêt immobilier.

Si cela ne changera pas grand chose pour ceux qui demanderont un rachat de crédit immobilier (ou a forte dominante immobilière), il n’en sera en revanche pas de même pour tous les autres, dont l’endettement excessif est généralement dû à l’utilisation de crédits révolving et autres prêts multiples à la consommation, mais aussi lié à des accidents de la vie ayant causé une forte chute de leurs revenus (maladie, décès, chômage…). Avec un taux d’intérêt limité mécaniquement à 3.96%, et à défaut de pouvoir prendre des garanties suffisantes, aucun prêteur ne voudra plus se risquer à racheter les crédits des foyers les plus fragiles. Ces derniers pourraient bien alors se voir tout simplement exclus de ce type d’opération, laquelle est bien souvent l’opération de la dernière chance avant la commission de surendettement.

La solution ? Certains proposent la suppression des taux d’usure, tout au moins pour les crédits immobiliers, mais ce serait alors un recul considérable en matière de protection des consommateurs. D’un autre côté, se contenter d’abandonner les foyers surendettés à leur triste sort n’est pas envisageable non plus. Autant dire que la situation est pour le moins inextricable et, à défaut d’amender directement la directive européenne pour qu’elle tienne compte des spécificités françaises, il y a fort à parier que la situation des emprunteurs en France va très certainement constituer un nouveau défi de société à partir du printemps prochain. Et cela pourrait bien également devenir un sujet politique explosif à moins d’un an des prochaines campagnes électorales majeures.

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5 mars 2016 6 05 /03 /mars /2016 14:39

En ces instants graves où l’Histoire peut bifurquer, rappelons combien ce que l’on appelle l’Occident est un édifice fragile.

Par Guy Sorman.

La réaction désordonnée des Européens face à l’afflux des immigrants, la tentation britannique de quitter l’Union européenne, la montée en puissance de leaders populistes, en Europe de l’Est, en France, et aux États-Unis, l’incapacité de contenir les ambitions impériales de la Russie et de la Chine : voici autant de symptômes convergents, troublants et que l’on peut qualifier de suicidaires.

Depuis 1945, le monde se civilisait

Les Occidentaux, en Europe et aux États-Unis, étaient parvenus depuis 1945 à édifier un nouveau monde, plus civilisé, plus éclairé, plus respectueux du droit, des libertés individuelles, plus prospère, plus pacifique de manière à éliminer ou au moins à contenir les idéologies totalitaires. La création de l’OTAN, de l’Union européenne, la mondialisation économique, ont été en deux générations seulement des succès sans précédent, héritage direct de l’idéologie des Lumières. Certes, toutes les guerres n’ont pas disparu, toute pauvreté n’a pas été éliminée mais jamais dans l’histoire de l’Humanité, autant d’hommes ont si bien vécu et si longtemps.

Ces progrès ont été si rapides que certains, la plupart en vérité, semblent oublier qu’ils ne furent pas un heureux hasard, mais une laborieuse conquête de la raison contre la déraison. La liberté des peuples de choisir leur destin, pour chacun de s’épanouir mieux que la génération précédente, a été le résultat de négociations interminables, de l’élaboration de règles de droit discutées pas à pas, de la prééminence finale du droit sur la force.

Mais pour le grand nombre des Occidentaux qui vivent libres, ce lent processus est inconnu, rarement enseigné ; ils imaginent que leur liberté, leurs droits, leur relative prospérité, vont de soi comme l’air que l’on respire : la nature humaine s’habitue plus vite à la liberté qu’à la contrainte. C’est le retour à la tyrannie, à la violence qui soudain, révèle combien la liberté et la paix n’allaient pas de soi. Il y a dans la nature humaine comme une asymétrie psychologique dont se moquait le personnage de Pangloss dans le Candide de Voltaire, répétant que « tout allait toujours pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles ».

Le garde-fou contre la tentation précédente et inconsciente du suicide eut été l’éducation publique, une incessante pédagogie pour rappeler d’une génération à l’autre que chaque progrès est le résultat d’un effort sur soi, d’une répression de l’instinct par la mobilisation de la raison. Mais les pédagogues ont démissionné des Universités, et de la vie politique, tandis que les nouveaux modes de communication ont ouvert une voie royale à l’empire du n’importe quoi, sans modération et sans modérateur : le recul des médias écrits, sans être la cause unique de la percée du populisme, du nationalisme, de la théorie du complot, du retour de la pensée magique, du culte de l’homme fort et providentiel, a évidemment facilité l’œuvre destructrice des camelots et marchands de sornettes qui chatouillent les instincts davantage que les neurones.

Suicide de l’Occident ? Non, l’expression n’est pas trop forte.

Si, par exemple, la Grande-Bretagne quitte l’Europe, ce départ donnera des ailes à tous les Indépendantistes au risque de déclencher une réaction en chaîne qui détruira le marché unique européen, ne laissant dans son sillage que le chômage et la récession. Chaque nation, chaque province sera tentée de se replier sur elle-même, oubliant que l’échange est le fondement de la prospérité.

L’OTAN résistera-t-il à cette balkanisation ? Probablement pas, autorisant l’armée russe à reconstituer un empire à l’Est de l’Europe, englobant l’Ukraine et les Pays Baltes pour commencer. On n’ose imaginer Donald Trump à la Maison Blanche, mais c’est envisageable, et si cela devait arriver, comptons sur lui pour déclencher, par inadvertance, quelque conflit majeur avec la Chine ou le monde arabe. L’absence de coordination entre les gouvernements occidentaux laisserait aussi libre cours aux mouvements terroristes qui se constitueraient en États. Ce désordre général ferait le jeu des mouvements fascistes en Europe : on connaît cette logique du pire puisqu’elle a déjà été expérimentée.

En ces instants graves où l’Histoire peut bifurquer, rappelons combien ce que l’on appelle l’Occident est un édifice fragile, bipolaire dirait un psychiatre s’il s’agissait d’un individu. Un précédent aussi me vient à l’esprit : à Sarajevo en 1914, un gros bourg que peu d’Européens auraient su situer sur une carte, un seul coup de revolver provoqua une guerre mondiale, parfaite illustration de la Théorie du chaos quand un événement d’apparence insignifiante déclenche un ouragan généralisé, que personne n’avait désiré. Eh bien, le monde actuel est parsemé de Sarajevo en puissance, en Libye, en Macédoine, en Syrie, en Ukraine, en Mer de Chine. Bien entendu, le pire n’est jamais certain, mais il est possible, particulièrement si on refuse de l’envisager, de l’analyser et d’adopter une stratégie en retour. Parlons-en ……

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3 mars 2016 4 03 /03 /mars /2016 13:13

La démocratie française prendrait-elle le chemin totalitaire ?

Dans son analyse magistrale Le système totalitaire, Hannah Arendt démontre la place importante de l’idéologie dans l’avènement de tels régimes (stalinien et hitlérien). L’atomisation et l’isolement des individus en masses soumises, l’installation d’un système complètement irrationnel dont le seul but est d’assurer le pouvoir du leader, la pratique du mensonge et de la propagande, la destruction du droit et de la morale, le déplacement du pouvoir vers la police, l’instabilité, la dissimulation, la duplication et l’atomisation de la hiérarchie, tous ces marqueurs totalitaires se sont chaque fois accompagnés d’un « idéalisme, c’est-à-dire d’une foi inébranlable en un monde idéologique fictif » sans lesquels de tels régimes n’auraient certainement pas atteint la dimension qui fut la leur. Selon l’auteure, ce dernier élément serait même le but ultime « plutôt que l’appétit de pouvoir »1 de tout régime totalitaire. C’est dire la dangerosité de l’idéologie !

Pour Hannah Arendt, toute pensée idéologique contient trois éléments de nature spécifiquement totalitaires2 :

-1) La prétention à tout expliquer,

-2) Dans cette prétention, la capacité à s’affranchir de toute expérience,

-3) La capacité à construire des raisonnements logiques et cohérents permettant de créer une réalité fictive à partir du résultat attendu du raisonnement, et non pas à partir de l’expérience.

À la lecture de ces trois marqueurs toxiques, de ces trois facteurs favorables au totalitarisme3, comment ne pas faire immédiatement le lien avec la France ? Son inclination socialiste si ce n’est marxiste4 n’obéit-elle pas à ces trois critères ? Par conséquent, la France serait-elle en danger ? Et ce danger serait-il en voie de résorption, ou au contraire en phase d’expansion ?

La France, un pays à risque élevé

Nos voisins étrangers le disent et le répètent au gré de leurs étonnements successifs : la France est un pays qui préfère théoriser, s’abstraire plutôt que de discuter des faits concrets, et de leur chercher des solutions adaptées. Et même s’il s’agit probablement d’un trait culturel, force est de constater que ce penchant français pour le concept est très fortement idéologisé. Le phénomène est connu : à cette abstraction théorique hexagonale s’ajoute une dimension idéologique de nature politique particulièrement développée.

Les preuves tangibles de ce refus des faits pour des raisons purement idéologiques sont légion et continuellement renouvelées. On pourrait toutefois ne citer que les plus criantes, les plus factuelles et les plus gigantesques d’entre elles, parmi lesquelles :

La France abuse du keynésianisme depuis le milieu des années 1970 environ. Le keynésianisme est efficace lorsqu’il s’agit de traiter une insuffisance de la demande. Il sert notamment de tampon pendant les crises d’ajustement de l’économie, en aidant les ménages le temps nécessaire, etc… Or la part de marché mondiale française a été divisée par deux depuis cette même période, ce qui prouve qu’il existe un problème de compétitivité, ou plus exactement, un problème d’offre, problème que cette succession presque ininterrompue de politiques de relances de la demande n’a bien évidemment pas réussi à enrayer (la France a d’ailleurs disparu ou presque de la plupart des secteurs à forte croissance actuels, les secteurs de l’innovation tels que l’informatique, l’électronique, les biotechnologies).

Toutes ces données sont pourtant connues. Si la France a refusé de contrecarrer ce recul, ce n’est donc pas faute de ne pas être informée des faits, mais pour des raisons idéologiques. Quelque soit le gouvernement en place d’ailleurs (à quelques exceptions assez courtes près), la primauté a été donnée à la redistribution, à la protection des acquis sociaux (des insiders donc), au partage du travail (tocade unique au monde), avec pour conséquence la fuite en avant dans la vie à crédit et dans l’endettement…

Aucune justification qui ne soit pas d’origine idéologique permet d’expliquer un tel évitement du réel sur une période d’une quarantaine d’années. Un pays ne peut persévérer dans l’erreur aussi longtemps sans de bonnes raisons. Certes, on peut toujours avancer le manque de courage de nos décideurs. Mais l’idéologie ne les a-t-elle pas considérablement aidés, en fournissant aux plus velléitaires d’entre eux les meilleures raisons à leur inaction ? N’est-il pas devenu inconvenant de parler d’effort et de restrictions ? N’est-il pas devenu grossier de suggérer de lancer des réformes ? Toucher au revenu minimum n’est il pas devenu criminel ? Assouplir le droit du travail humainement dégradant ? Se battre contre la concurrence mondiale inconvenant ? Quel que soit l’angle par lequel on analyse le problème, l’idéologie en est toujours l’épicentre…

– Tandis que la quasi-totalité de la planète se livre au commerce, à la course à l’innovation et à l’enrichissement, tandis que des pays pauvres émergent et que des pays riches nous ont doublé (cf. analyse ici présentée Déclin économique français : mythe ou réalité ?), la France continue d’accepter que son système scolaire et universitaire façonne le plus souvent possible des bataillons de citoyens qui ne connaissent que la vision étatique, socialiste, marxiste de l’économie. L’aveuglement idéologique qui justifie le non traitement des problèmes économiques du pays se reproduit donc sur les générations à venir. Il a de beaux jours devant lui. Car tout a été fait pour en pérenniser les dégâts. Le discours politique mensonger (autre marqueur du totalitarisme) assure ainsi pour longtemps sa crédibilité auprès des consciences car celles-ci ont été préparées à cet effet (cf. analyse ici présentée Le long travail militant de l’université).

– Et comme si l’Éducation Nationale ne suffisait pas à entretenir la flamme idéologique, il faut compter sur les médias français, très majoritairement du même bord. Les sondages sortie des urnes de la Présidentielle de 2012 ont fait apparaître que 74% des journalistes avaient voté pour F. Hollande, dont le programme de réforme fiscale s’annonçait pourtant d’autant plus dangereusement contre-productif et contra-cyclique que rien par ailleurs n’était proposé pour relancer la compétitivité française et diminuer ses blocages historiques (droit du travail, charges sociales, poids de l’État, etc…). Pour ne citer que les principaux médias chargés de cette éducation des masses : Nouvel-Obs, Libération, Alternatives Économiques, Marianne, Le Monde, Le Monde Diplomatique, Courrier International, France Info, France 24, Arte, France 2…

Ce chiffre de 74% est effarant. Il démontre l’incroyable tropisme gauchisant des moyens d’information. Actuellement, seule une poignée de médias est à même de relater sans détour ni litote, ni novlangue, la gravité de la situation économique, sociale et sécuritaire hexagonale. Ceci n’est pas une anecdote mais au contraire la preuve inquiétante de la vulnérabilité de notre pays face à un éventuel glissement totalitaire.

Encerclé comme il l’est par le discours politique, le formatage scolaire et le traitement médiatique des informations, le citoyen français apparaît donc particulièrement bien manipulé d’un point de vue idéologique5.

Maintenant, qu’en est-il de l’évolution de ce phénomène ?

Un début d’aggiornamento en vue !

La situation actuelle montre à la fois une sérieuse aggravation du « délire idéologique », et l’apparition d’une véritable révolte intellectuelle de nature à le combattre efficacement.

D’un côté, la situation se détériore car, en effet, la crise des migrants et la série d’attentats sanglants apportent la preuve que le déni du réel, le refus des faits se portent d’autant mieux que ceux-ci sont particulièrement rudes. Le traitement de la vague d’immigration tout comme celui des attaques terroristes ont suscité des débats véritablement abscons quant aux raffinements linguistiques mis en branle pour ne pas nommer les problèmes. Les risques de non intégration des émigrés, tout comme la raison de leur venue ou leur violence une fois sur place ont fait l’objet d’une méchante censure dans la plupart des rédactions.

Il en est de même pour l’origine ethnico-religieuse des terroristes. Quant à la stratégie de l’EI, elle a été présentée avec toutes les pincettes diplomatiques requises afin d’éviter de froisser les éventuelles susceptibilités des populations de confession musulmane. Certains analystes français vont jusqu’à expliquer le terrorisme qui a sévi dans l’hexagone comme le résultat nauséabond d’un racisme anti-islam, comme le fruit d’une écrasante domination judéo-chrétienne sur des populations « dominées et dans le besoin ». La crainte des amalgames a subi une hypertrophie telle que l’on peut se demander s’il n’est pas devenu préférable de défendre le bourreau de peur d’aller trop loin, de l’autre côté.

Pour autant, des motifs d’espoir apparaissent depuis que les tenants du réalisme, les pourfendeurs de la réalité des faits, les chevaliers blancs de l’objectivité font la Une des médias, et sèment la zizanie dans le camp adverse. Quand bien même on peut ne pas être toujours d’accord avec la solidité de ses démonstrations, il faut rendre mérite à la ténacité d’un Eric Zemmour, devenu la bête noire de la bien-pensance actuelle par son mauvais goût (celui d’évoquer ce que l’on n’a plus le droit d’évoquer).

Il faut tout autant rendre hommage au cynisme provocateur d’un Houellebecq. Tous deux ont joué un immense rôle de désinhibiteur des discours, de bulldozer de la liberté d’expression. Parallèlement à ce travail brutal façon électrochoc, il faut citer l’incroyable courage d’un philosophe comme Alain Finkielkraut, qui se paie le luxe de déballer sa franchise intellectuelle sur tous les écrans cathodiques ou presque, de façon mesurée quand ce n’est pas humoristique, dans l’héritage logique du si regretté Philippe Muray. Ce travail de fond, de moins en moins austère, et de plus en plus réjouissant, porte ses fruits de façon évidente.

Depuis peu, le niveau de désobéissance idéologique a même atteint des sommets inespérés. Nombreux sont les porte-voix brillants qui s’y sont mis, du journaliste Kamel Daoud à la fondatrice de Causeur, Élisabeth Levy, de l’essayiste Pascal Bruckner à l’historien Marcel Gauchet, avec la bénédiction de médias de moins en moins rares, et des insultes du camp adverse de moins en moins audibles. À cela, il faut ajouter la vague de nouveaux médias (Causeur, Atlantico, Contrepoints, Lesobservateurs.ch, etc…) et bien évidemment les réseaux sociaux, avec des groupes de quasi révolte intellectuelle extrêmement nombreux sur Facebook grâce auxquels les informations (images, statistiques) circulent d’autant plus vite qu’elles sont interdites dans les médias dominants.

Ainsi se met peu à peu en place un système de réaction de défense contre une doctrine politique ultra-dominatrice (l’idéologie socialiste, elle-même composée d’antilibéralisme et de tiers-mondisme) devenue inaudible et insupportable. Ce système de défense multiforme, composé d’intellectuels lucides, de média contraints et forcés (d’arrêter de se pincer le nez), et de sondages à démoraliser la cléricature gauchiste (qui du coup, se dispute), devrait finir par rendre la vie de plus en plus difficile à l’idéologie française actuelle…

Il est plus que temps. Car, ainsi que l’on peut l’observer, la situation de l’hexagone apparaît particulièrement vulnérable du point de vue de la démocratie.

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29 février 2016 1 29 /02 /février /2016 15:41

Un vent de folie souffle-t-il sur l'économie en ce moment ? On pourrait le croire tant certaines décisions, certaines actions, voire certains comportements des acteurs économiques semblent parfaitement insensés.

Ainsi, phénomène fréquent lorsqu'on traverse une période de troubles économiques et politiques comme c'est le cas actuellement, on recommence à entendre ici ou là les thèses hallucinées de prophètes auto-proclamés qui annoncent à qui veut les entendre une fin du monde imminente. On évoquera à peine la probable découverte d'une nouvelle planète massive aux confins de notre système solaire, venant brusquement raviver les craintes jusqu'ici assoupies de ceux qui voyaient déjà la Planète X/Nibiru/Nemesis interférer brutalement avec l'orbite terrestre au point de nous expédier, dans le meilleur des cas, vers une mort certaine mais rapide (des variantes nous promettent au contraire une joyeuse panoplie d'agonies aussi longues que douloureuses avant l'issue fatale, de toute façon inéluctable).

Mais le monde économique, que l'on suppose à tort parfaitement froid et dépassionné, n'est pas épargné par cette démence croissante. En effet, comment considérer autrement cette nouvelle tendance aux taux d'intérêt négatifs, et qui fait que désormais un quart de la dette d’État mondiale... rapporte de l'argent au lieu d'en coûter ? Allons-nous entrer dans un monde étrange où on nous versera des intérêts quand on contractera un crédit ? Et où notre épargne nous coûtera de l'argent au lieu de nous en rapporter ?

Et que penser de cette nouvelle tendance des Japonais (qui n'en sont plus à une folie près, c'est vrai) qui les pousse à retirer leur argent des banques pour ensuite stocker des billets chez eux, en dépit de toute logique ? Ou des Russes qui se mettraient à brandir la menace nucléaire comme aux heures les plus sombres de la Guerre Froide, mais cette fois pour dissuader les occidentaux de jouer en Syrie le jeu militaire d'un État Islamique qu'ils sont pourtant censés combattre partout ailleurs ? (on sait maintenant que le coup des ripostes nucléaires est surtout né dans l'esprit un peu malade des journalistes)

Enfin, tandis que certains cherchent des signes pouvant les renseigner sur l'ampleur de la prochaine crise à venir (dans l'évolution de l'once d'or exprimée en barils de pétrole par exemple, ce qui reviendrait presque à la deviner dans le marc de café), notre gouvernement s'acharne à dépenser des sommes qu'il n'a pas pour booster un investissement qui n'existe pas et inciter des entreprises qui n'en veulent pas à acheter de nouvelles machines... alors qu'elles souhaitent juste avoir suffisamment d'argent à distribuer à la fin de l'année. Ce que les nouvelles aides vont probablement les aider à obtenir. Ironie du sort.

Alors cette folie n'est-elle que passagère, simple effet fugace d'un stress généralisé devant une situation qui nous échappe totalement ? Ou bien s'agit-il au contraire d'un symptôme plus durable qui nous place à peine au tout début d'une monumentale dégringolade ? Certains le pensent, et d'autres sont déjà engagés sur la pente savonneuse (comme le Venezuela par exemple, en faillite pure et simple), contraints de se rabattre sur leurs ultimes richesses pour essayer de glisser moins vite. L'or, évidemment, tient une place de choix dans cette stratégie de la dernière chance. Mais il ne faudrait pas pour autant le condamner trop rapidement à cette seule fonction de dernier recours. Ce noble métal, qu'on qualifie encore souvent de "relique barbare", est avant tout un formidable outil de sécurisation par sa seule valeur intrinsèque, laquelle ne dépend ni des monnaies ni des États.

Et s'il est "barbare" c'est surtout dans le sens romain du terme, à savoir étranger à l'empire. Ce qui n'est peut-être pas une si mauvaise chose, lorsque l'empire semble sur le point de disparaître...

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25 février 2016 4 25 /02 /février /2016 16:18

Le pouvoir sabote peu à peu l’État de droit garant de nos libertés et de notre sécurité juridique et physique. Il profite de la passivité, voire de la complicité de l’opposition. Je ne peux me résigner à cette dérive sécuritaire.

Le devoir moral de tout défenseur de l’État de droit exige de s’opposer aux amendements constitutionnels votés par le Parlement ces jours-ci et à la prolongation indéfinie de l’état d’urgence. Tout comme s’opposer à la loi renseignement dont vient d’être publié le dernier décret d’application permettant désormais à l’État d’espionner nos connexions internet et téléphoniques. De quoi fracasser nos vies privées tout en saturant les services de renseignement de fausses alertes. Il est vital de lutter contre les mesures sécuritaires dont l’aspect spectaculaire vise à cacher l’inefficacité et le caractère néfaste pour notre sécurité. C’est pourquoi j’ai déposé mi-janvier, au nom du Parti Libéral Démocrate (PLD) que je préside, un recours auprès de la Cour européenne des Droits de l’Homme contre ce croisement entre Big Brother et la Ligne Maginot, monstruosité sans équivalent dans une démocratie digne de ce nom.

Les parlementaires devraient discuter en ce moment des moyens humains et financiers de la justice (au budget inférieur à celui de la culture !), des forces de renseignement et de sécurité, et non de la déchéance de nationalité. Qui peut croire que cette mesure dissuadera des djihadistes aspirant au martyr, ou qu’elle sera considérée comme une sanction par des gens qui abhorrent leur pays ? Et si un terroriste n’est pas digne d’être Français, un tueur de droit commun le serait-il davantage ? J’entends déjà des élus proposer d’étendre cette notion nauséabonde « d’anti-France » à d’autres crimes ou délits. Cette banalisation rampante du rejet (vers quelle destination ?) ne traite pas les causes du fléau. Comme l’a bien résumé le ministre Emmanuel Macron, « on ne traite pas le mal en l’expulsant de la communauté nationale ».

Une belle victoire pour Daech

Cette mesure offre en fait une belle victoire à Daech. Limiter la mesure aux bi-nationaux pour en faire des citoyens de seconde classe, comme le gouvernement l’a envisagé, renforcerait la propagande de Daech qui tente de convaincre les bi-nationaux que la France les déteste. Mais l’étendre à tous aboutirait à créer des apatrides, ce qui n’est ouvert qu’aux crimes au profit d’États étrangers selon la Convention de l’Onu de 1961. Cela reviendrait alors à reconnaître Daech comme État souverain, bonus ultime pour les djihadistes !

Une loi sur la nationalité n’a en outre rien à faire dans la Constitution qui ne doit être amendée que rarement et avec scrupule, non sous le coup de l’émotion et de la peur. Encore moins comme manœuvre tactique d’un chef d’État en perdition visant à piéger la droite.

Une large majorité de Français approuvent malheureusement cette mesure parce qu’ils attendent qu’on fasse, enfin, « quelque chose » contre les terroristes. Une réaction compréhensible pour exorciser le sentiment de colère et d’impuissance après le 13 novembre. Mais tout ce temps perdu à débattre d’une mesure purement symbolique au lieu de réfléchir aux moyens concrets de lutter contre nos ennemis doit stupéfier les djihadistes eux-mêmes !

Éluder le débat sur les défaillances de l’État

Cette fausse solution vise en fait à éluder le débat bien plus important sur les défaillances de l’État. Aucun audit sur les failles de notre renseignement n’a été lancé, pas plus que sur la brièveté des peines de prison effectivement réalisées par des individus fichés S, tels Amedy Koulibaly sorti de prison seulement un an après sa condamnation pour projet d’aide à l’évasion d’un terroriste.

Quant à l’état d’urgence, s’il était légitime juste après les attentats du 13 novembre, il s’avère peu concluant depuis : six mille perquisitions administratives pour UNE seule inculpation. Les coups de pied de la police dans la fourmilière ne donnent pratiquement aucun résultat. Même l’élimination du chef des tueurs du Bataclan le 19 novembre ne doit rien à des mesures d’exception, puisqu’elle s’appuyait sur la dénonciation d’un proche.

En déclarant récemment que l’état d’urgence serait maintenu jusqu’à l’élimination de Daech, le Premier ministre annonce-t-il que nous devrons vivre dans un État policier jusqu’à la présidentielle ? Bien commode pour interdire les manifestations de mécontentement social (exception faite des taxis). Mais à quel prix ! L’Histoire montre qu’avec la banalisation de l’état d’urgence, les institutions se dégradent rapidement et basculent dans l’arbitraire. C’est pourquoi son prolongement abusif a suscité une mise en garde du Conseil de l’Europe. Le Royaume Uni, l’Italie et l’Espagne ont affronté des réseaux terroristes pendant des décennies sans recourir à l’état d’urgence plus de quelques semaines.

Il est urgent de réorganiser la lutte contre le terrorisme

Imposons le port d’un bracelet électronique aux radicaux identifiés dès lors qu’ils ont été condamnés pour tout acte violent, afin d’éviter que des profils dangereux puissent se promener partout en Europe impunément, comme certains l’ont fait avant le 13 novembre. Comment en outre expliquer l’absence d’un département chargé de contrer la propagande des djihadistes sur les réseaux sociaux et Internet, ou de centres de déradicalisation si développés chez nos voisins européens ? Il est aussi urgent de réorganiser la lutte contre le terrorisme, dispersée entre pas moins de sept services différents.

Depuis le 13 novembre, les politiques rivalisent de déclarations selon lesquelles Daech gagnerait s’il nous conduisait à changer notre système de valeurs. C’est précisément la victoire que l’exécutif et la droite d’opposition sont en train d’offrir à cet ennemi effroyable.

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