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  • : Le blog de Jean-Loup
  • : Engagé, depuis plusieurs décennies dans une démarche visant à lutter contre tous les processus d'exclusion, de discrimination et de ségrégation socio-urbaine, je suis persuadé que si nous voulons « construire » une société reposant sur un véritable Vivre Ensemble. Il nous faut savoir, donner du sens au sens, prendre le temps de la concertation et faire des propositions en adéquation avec les besoins de nos concitoyens.
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12 septembre 2015 6 12 /09 /septembre /2015 05:21


On l’a vu : la France est en pointe dans l’innovation, tant qu’elle est fiscale. En revanche, la route vers le progrès et l’augmentation du pouvoir d’achat des Français est notoirement plus cahoteuse lorsqu’il s’agit des nouvelles technologies et de leur impact sur leur vie de tous les jours.
On a vu récemment que Facebook, Google, Expedia, Uber, Airbnb, Twitter et on en passe étaient régulièrement la cible des vitupérations des uns et des autres, qui pour des raisons fiscales, qui pour des raisons corporatistes. Il y a quelques jours, on lisait, un tantinet stupéfait, les réactions gênées de dirigeants d’associations caritatives d’aides aux étrangers devant leur uberisation par des applications mobiles développées sur le pouce.
À l’évidence, dès lors que de l’argent rentre en jeu et que la donne légale est largement bousculée par l’arrivée de nouvelles technologies, ceux qui se trouvent au bout du robinet finissent toujours par rouspéter de la baisse de débit, détourné qu’il est vers d’autres tuyauteries.
On pourrait croire que lorsqu’il n’y a pas d’argent en jeu, les choses se passeraient mieux. Nous sommes en France, il n’en est donc rien. Même le gratuit est sujet à une évaluation millimétrée de la part de l’ensemble des corps administrés qui veilleront, jusqu’à leur dernier souffle, à la bonne marche de la société vers un monde rigoureusement égalitaire, proprement rangé dans des boîtes correctement étiquetées dont rien ne dépasse, avec pour chacune son cerfa et l’attestation que les taxes et autres ponctions ont toutes été correctement payées avant l’enterrement.
C’est ainsi qu’aujourd’hui, on apprend que l’ultra-célébrissime Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes — sans qui le consommateur français, ruminant paisible mais très influençable, serait déjà mort douze fois d’intoxications, de concurrence déloyale et de fraudes diverses — vient d’intervenir avec sa souplesse habituelle de ninja chez la start-up française Booxup, spécialisée dans l’échange de livres.
Que fait Booxup qui mérite ainsi que l’auguste administration se penche de tout son poids sur son cas ? En fait, Booxup propose une application de partage de livres papier : celle-ci permet d’enregistrer les titres de sa bibliothèque personnelle, de consulter celle des autres utilisateurs, et lorsqu’un livre intéresse l’utilisateur, d’entrer en contact avec lui pour le rencontrer et faire un emprunt voire – soyons fous – un échange.
C’est peut-être la présentation, succincte, de l’application en ligne sur le site d’Apple qui a déclenché la visite-surprise de la DGCCRF dans les locaux de la start-up : « Trouve des milliers de livres gratuits autour de toi, dans toutes les langues ». Gratuits ?
Allons, cela cache forcément un partage frauduleux d’informations électroniques via des procédés que ne renient pas les nazis, les pédophiles ou les terroristes dans la Daesh, ce qui mérite amplement une action musclée. Ou, à défaut, il s’agit encore d’une tentative de frauder le fisc, la TVA ou le vivrensemble républicain entièrement fondé sur l’une ou l’autre déclaration officielle, dûment tamponnée par un officier administratif assermenté et pointilleux, et dont l’absence manifeste ne peut que laisser soupçonner les pires atteintes au lien social.
En tout cas, des gens qui utilisent des smartphones pour se géolocaliser et s’échanger des livres, sans passer ni par l’État, ni par une association lucrative sans but, ni une administration centralisée ou une bibliothèque municipale correctement subventionnée, c’est extrêmement louche et justifie amplement une enquête. Nous sommes en France, elle sera déclenchée par une petite délation d’un concurrent (un professionnel du livre, « distributeur, diffuseur ou éditeur, nous n’avons pas pu connaître son identité » expliquera David Mennesson, cofondateur de l’application).
Enquête qui se traduit par la descente, pouf, au débotté, d’un inspecteur de la DGCCRF. Et pas n’importe lequel : il s’agit d’une mission forcément délicate, avec de la technologie numérique complexe, du bit et de l’octet par paquets, qui sent fort le oueb deuzéro, les réseaux sociaux et ce genre de trucs trop complexes pour être laissés à un débutant de la belle Direction Générale. C’est donc le même inspecteur qui s’est vu confier le douloureux dossier Uber qui se chargera d’aller voir la start-up et de vérifier que cette sulfureuse application d’échange de livres ne cache pas une opération de traite des blanches, de trafic de drogue ou d’armes, si courante derrières les applications numériques disruptives.
Parce qu’en y regardant de près, oui, Booxup pourrait bien être disruptif : en facilitant le prêt de livres entre particulier, avec éventuellement une dimension commerciale, Booxup pourrait représenter une menace croissante à l’encontre de l’industrie de l’édition et de la diffusion de livres. Et dans DGCCRF, le premier C concerne justement la concurrence que le vivrensemble entend étouffer gentiment derrière les mille et un édredons moelleux de la législation qui se traduiront donc ici par une « enquête préventive » débouchant sur deux procès verbaux (avant, n’en doutez pas, des procès en bonne et due forme), le premier sur les « liens avec les grands éditeurs informatiques, comme Google, Amazon… » et le second sur les « ambitions et le modèle économique » de Booxup, parce qu’après tout, c’est bien à cette Direction Générale de se mêler de ce genre de choses.
Pour le moment, donc, la petite start-up qui a le toupet de vouloir « créer du lien social » par son application en mettant les lecteurs en relation, et favoriser l’échange de culture gratuitement, pourra continuer son activité subversive sous l’œil scrutateur de la DGCCRF en attendant ses conclusions.
Pendant ce temps, le Français lambda ne pourra s’empêcher de noter qu’encore une fois, l’État travaille pour lui en déboulant comme un chien dans un jeu de quilles dans une entreprise considérée a priori comme vilainement disruptive, qu’il le fait à la suite d’une délation, que cette enquête d’une administration zélée fera beaucoup de bien à cette entreprise (la gestion de cet événement par les fondateurs, l’intervention de l’avocat de la société, tout ça, bien sûr, est gratuit et ne représente absolument pas une dépense inutile pour une jeune société en plein démarrage) et qu’enfin, il fallait bien cette démonstration de force (essayez, pour rire, d’envoyer balader l’inspecteur arrivé par surprise pour pouvoir vous choper en pleine préparation de votre poudre de licorne prohibée) pour que la société vive en paix. Dès lors, le Français lambda sera rassuré et pourra s’écrier, joyeux :
« Pas de doute, c’est exactement ce dont la France a besoin ! »

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9 septembre 2015 3 09 /09 /septembre /2015 08:01

En septembre 2014, c’était l’effervescence en Socialie : tout le petit monde s’agitait à la découverte d’un paquet de propositions révolutionnaires émises par un MEDEF qui sortait son gros bazooka pour dynamiter le code du travail. SMIC, répartition du temps de travail, retour à des discussions employeur/salarié moins encombrées de formalisme, tous les ingrédients étaient réunis pour déclencher une véritable tempête chez les syndicats de salariés et au sein d’un gouvernement dont la doctrine n’a jamais su s’accommoder de la notion d’entrepreneur. Heureusement, ces propositions ne furent évidemment suivies d’aucune mise en pratique et la tension redescendit gentiment.

C’est donc avec une relative surprise qu’on apprend, un an tout juste après ce premier ballon d’essai patronal, que le gouvernement tendrait à présent une oreille attentive à une charrette de propositions toutes aussi révolutionnaires du célèbre Think-Tank Terra-Nova.

Terra Nova (avec Nova parce que c’est comme les étoiles du même nom, à savoir aveuglant et particulièrement destructeur, et Terra, parce que la « terra ne ment pas » je suppose), c’est cette association socialiste lucrative sans but pratique qui pond, de temps en temps, l’une ou l’autre étude richement médiatisée pour prouver que, par exemple, l’immobilier mérite d’être réformé à coup de trucs innovants comme des taxes et des contraintes supplémentaires ; c’est de ce Think-Tank cet aquarium à penseurs que sont régulièrement issues les subtiles recommandations économiques d’augmenter les dépenses et les taxations tous azimuts pour justifier la politique keynésienne ou carrément foutraque de l’actuel gouvernement. Bref, si Terra Nova était dans la Formule 1, ce serait la seule équipe à tout miser sur un tricycle à turbo.

On comprendra donc que c’est avec la plus grande circonspection qu’on devra accueillir leurs nouvelles idées concernant le code du travail. Utilisant sans doute la préparation psychologique du terreau socialiste par le travail de Robert Badinter et du professeur d’université en droit du travail Antoine Lyon-Caen, qui remettaient ouvertement en cause un droit du travail devenu illisible et proposaient même de le réformer en profondeur, le Think Tank s’est donc récemment fendu d’un rapport rédigé par Gilbert Cette, un économiste de gauche (comme si, en France, il y en avait encore de droite) et théoricien de la réduction du temps de travail, et de Me Barthélémy, spécialiste du droit social.

Première surprise (modérée) : le nouveau duo confirme qu’effectivement, le droit du travail français est un tantinet complexe et que cette complexité pourrait bien avoir des effets de bords négatifs sur le plan économique. Seconde surprise, plus fondamentale celle-ci : au lieu de préconiser une bonne volée de taxes, comme à l’habitude du Think Tank et des socialistes en général, nos deux rapporteurs tentent de promouvoir « autant que possible » la négociation collective et l’accord entre partenaires sociaux, c’est-à-dire de faire jouer un principe proche de la subsidiarité, qui veut que ce soit les acteurs les plus proches du problème qui le traitent, ce qui revient en substance à placer le Code du travail comme norme par défaut, aisément remplaçable lorsqu’il le faut au niveau local entre adultes consentants. Autrement dit, on fait passer le droit conventionnel avant le droit règlementaire.

Dans cette vision franchement stupéfiante du travail en France, les partenaires sociaux, dans chaque entreprise ou chaque branche de métier, seraient considérés comme des gens normaux, pourvus d’un cerveau pas complètement spongieux, avec une responsabilité d’adultes consentants pas totalement annihilée et auraient donc toute latitude, via un accord collectif, de déroger à la loi et substituer les normes conventionnelles aux normes réglementaires, d’adapter les normes du Code du travail (seuils sociaux, durée du travail, niveau des rémunérations) aux besoins locaux.

Alors oui, sur le papier, c’est carrément libéral.

Ça l’est même tellement que ça rejoint les travaux d’un autre think-tank, nettement moins à gauche que le Terra Nova en question, et qui aboutit globalement aux mêmes conclusions : l’Institut Montaigne, dans son étude « Sauver le dialogue social : priorité à la négociation d’entreprise », dénonce « la construction législative, jurisprudentielle et doctrinale du droit du travail (…) historiquement datée » (ce qui est pudiquement dit pour un Code du travail asphyxiant écrit par des scribouillards qui n’ont, pour leur écrasante majorité, jamais été confronté au travail dans le privé), préconise lui aussi que les accords au niveau des entreprises ou des branche priment sur le Code du travail, ceci permettant de redonner un peu de marges de manœuvre et de performance au modèle actuel.

C’est même si libéral que la plupart des organes médiatiques, des syndicats et des politiciens n’ont pour le moment pas encore réagi devant ces éléments, captivés qu’ils étaient par d’autres sujets, plus graves ou plus cyniquement porteurs pour leurs petites affaires. Il est à noter qu’a contrario, tout comme le peuple a largement démontré à plusieurs reprises être bien plus souple que ses élites en matière de jour hebdomadaire chômé, un récent sondage montre que près des trois quarts des Français sont prêts à abandonner les 35 heures.

Devant ce genre de propositions, on comprend dès lors les petits pas feutrés et aussi discrets que possible de l’actuel gouvernement, franchement peu populaire, n’ayant finalement aucun cap (si ce n’est celui du changement, un peu mince pour faire une belle route décidée) et ayant abandonné toute conviction quelque part dans une déserte campagne française il y a plusieurs mois de cela. Mais là où l’affaire prend un tour vraiment comique, c’est que ces propositions révolutionnaires seront présentées et discutées avec exactement la même démarche que celle qui présida pour la belle et grande réforme Macron.

En effet, dès le départ, la réforme du droit du travail se place avec un handicap de taille, certainement connu et déjà pris en compte par l’équipe en place : un accord de branche ou au sein d’une entreprise impose une forte syndicalisation des salariés, et, d’une façon ou d’une autre, que ces syndicats ne s’opposent pas stérilement à ces changements. Si, d’emblée, cette absence d’opposition paraît particulièrement difficile à obtenir, l’augmentation de la syndicalisation semble, elle, totalement inatteignable.

En outre, la moindre négociation concernant le droit du travail devra se faire en incluant le ministère du Chômage Travail dont le ministre vient tout juste d’être renouvelé. Chouette, d’âpres dialogues, du compromis taillé au cordeau, de la réforme qui roxxe du chaton mignon, pas de doute, Myriam El Khomeri a tout ce qu’il faut pour tripoter le succès fiévreusement : elle s’y engage même et promet de mettre les doigts dans le droit !

Autrement dit, rassurez-vous : tout comme les propositions initiales de Macron furent copieusement rabotées pour n’être plus qu’une énième couche de législation dans un maquis franco-français de règlements touffus, on peut déjà parier que la réforme du droit du travail dont il est question fera le même trajet ridicule : celui d’une baudruche pleine d’air chaud, brutalement ouverte en plein air et dont le bruit de dégonflement, évoquant celui d’un pet gras, s’ajoutera à celui des autres « réformes » d’un quinquennat vide de sens.

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28 août 2015 5 28 /08 /août /2015 10:32

"Tiens, le Parti officiellement Socialiste fait actuellement son université d’été ! Et si on en parle un peu, ce n’est pas parce que ceci va avoir un impact fort dans le paysage politique français (ça se saurait) mais bien parce que ce parti est acculé par la dure réalité à un pragmatisme qui semble quelque peu le chatouiller.

Il faut le reconnaître, le Parti n’est pas au mieux actuellement.

Déjà, les dissensions s’y accumulent. C’est, quasiment, normal dans les périodes où il exerce la majorité et où, pour exister, des courants s’expriment forcément en opposition au courant principal, celui dit « de gouvernement », qui ne peut qu’encaisser les critiques de l’action qu’il mène (ou, dans le cas qui nous occupe, de l’agitation contre-productive qui l’occupe). De ce point de vue, le tigre réel n’étant jamais à la hauteur de celui en papier, les mouvements et autres tendances qui n’ont pas la joie d’exercer le pouvoir peuvent se vanter de faire mieux que la mouvance principale, engluée dans ses affaires, ses compromis, ses reculades et autres bouffonneries habituelles. Certes.

Mais quand bien même : normalement, quand arrive l’Université d’été, les petites bisbilles s’arrêtent et tout le monde se retrouve autour du goûter à grignoter du cake industriel en buvant du cidre. Cette année, cependant, rien de tout cela : au mot d’ordre officiel, « Agir en commun » correspond une rébellion presque ouverte de trois des courants internes au parti qui organisent, pas franchement discrètement, leur propre réunion en marge de l’événementiel officiel.

Question image de marque pour le parti majoritaire, ça fait désordre et désolant.

Tristounet, même, car à ces problèmes de politicailleries internes assez croustillantes vues de l’extérieur et qui nous rappellent, pour ceux qui l’auraient oublié, que le pouvoir attise toujours autant la haine, la discorde et les petites trahisons entre amis, il faut ajouter d’autres soucis, à la fois plus pragmatiques, triviaux presque, et tout à fait illustratifs du décalage entre les discours, chamarrés et sirupeux, et les actes effectifs de toute cette belle bande d’hypocrites socialistes.

En effet, tenir une université d’été n’est pas chose facile lorsqu’il s’agit, en pratique, de montrer ses muscles, ce qui se traduirait dans de bonnes conditions par des débats et des discours vigoureux, attendus par toute la presse, des têtes d’affiches et des ténors faisant assaut de bons mots et de fines analyses, et, bien sûr, un nombre élevé de militants se bousculant aux portes de cette université.

Or, là, c’est assez peu le cas pour le dire gentiment. En fait, ça ne marche pas top les adhésions, le militantisme et les récoltes d’argent des autres auprès des députés et des élus moins nombreux à chaque élection. Pour le dire crûment, c’est même franchement la dèche. C’est lors d’une récente matinale d’Europe-1 qu’on en apprend un peu plus – désolé, guère d’autres liens à fournir, les médias n’ayant bizarrement pas jugé nécessaire de s’étendre le moins du monde sur ces éléments pourtant intéressants de la vie politique française.

Ainsi, alors que le parti affichait fièrement 280.000 adhérents en 2006, il ne compte plus à présent que 130.000 frétillants membres en 2015 selon la direction du parti et il se susurre même chez les plus pessimistes que seuls 80.000 braves resteraient dans les fichiers de ceux qui sont effectivement à jour de leur cotisation. C’est la déroute, ou plutôt, la suite de ce qu’on constatait déjà à la fin de l’année dernière lorsqu’il s’agissait de recruter pour les départementales.

Et financièrement, c’est logiquement assez pénible.

La situation est grave ? Qu’à cela ne tienne ! Fixons un objectif à la fois grotesque et irréaliste pour galvaniser les (maigres) troupes, genre 500.000 militants d’ici un an, et profitons-en pour revamper un peu tout ce fatras communicationnel autour du Parti. Vous allez voir, ça va dépoter !

Bon, déjà, on va simplifier l’adhésion. Étrangement, là où, décidant de simplifier, le gouvernement issu du même parti accouche d’une bordée abominable de nouvelles lois toutes plus complexes les unes que les autres, les instances dirigeantes, confrontées à la même problématique, finissent effectivement par simplifier : si, avant, il fallait un vote des camarades pour accepter l’adhésion, ce n’est maintenant plus le cas et l’adhésion est directe.

De la même façon, l’adhésion actuelle est composée de 20€ de frais d’entrée, puis des frais en fonction du revenu et de la section dans laquelle on est inscrit, moyennant des barèmes et des systèmes de calculs complexes. Ceci n’est guère étonnant puisque les tubulures chromées des impôts ont été mises en place par les mêmes esprits tordus avec le résultat qu’on sait.

En revanche, la proposition d’avenir consiste à demander 20€ pour l’adhésion, point (bref, un forfait). Dans la foulée, on attend du gouvernement, toujours issu de ce parti, la même proposition pour les impôts (après tout, ça c’est de la vraie égalité !). Rassurez-vous : ce qui est fait en interne au Parti ne se verra jamais en externe au gouvernement. La cohérence n’ira jamais aussi loin.

En outre, on apprend que des équipes de militants à temps plein vont être mobilisées pour faire de la propagande et du ratissage afin de troller convaincre des citoyens d’adhérer à leur épave collectiviste parti. Oui, vous l’avez compris : entre l’utilisation des réseaux sociaux, le télémarketing et la refonte du catastrophique site officiel, le PS a compris tout l’intérêt de se remettre au goût du jour.

Enfin, signalons la proposition d’une adhésion à la carte où, pour atteindre ceux qui voient bien le côté ringard du militantisme (surtout celui du parti officiellement socialiste) et qu’il va falloir amadouer, on proposera au potentiel militant de n’adhérer au PS que sur un thème particulier, afin de former des militants-experts. Du PS à la découpe, en somme.

Mais le plus beau, de loin, est cette petite histoire qui vient de se développer : afin de diminuer ses factures de prestations et le coût de ses ressources humaines, le Parti, décidément très à l’écoute de ses comptables, s’est décidé à contracter auprès d’une société dont le sous-traitant emploie une dizaine de travailleurs détachés venus de Roumanie, pour la mise en place du mobilier et le nettoyage. Ce type de contrat, parfaitement légal, est surtout moins cher que pour des salariés français : correctement déclarés, les salariés roumains bénéficient de salaires et de conditions de travail identiques à celles des Français, mais les cotisations sociales sont celles en vigueur chez eux (et donc, très inférieures aux françaises).

Devant la très mauvaise image que renvoie cette opération, le Parti a bien vite fait marche arrière. Il reste néanmoins évident que le Parti a, fort logiquement, tenté de dépenser le moins possible pour la prestation de service demandé, et on ne peut l’en blâmer.

D’ailleurs, le tableau est délicieux : rafraîchissement de l’image de marque, redynamisation des réseaux sociaux, lancement de campagnes de marketing, segmentation du marché, épluchage des factures et recherche de la prestation (roumaine, ici) la moins chère … MMmmoui, en effet, pas de doute, le Parti Socialiste est devenu une vraie entreprise capitaliste comme les autres, piloté par des besoins de résultats, par la nécessité de ne pas faire de dette et de maîtriser ses coûts.

Maintenant, pourquoi diable ce qui semble évident et possible au sein de ce parti n’est absolument pas mis en application par ses dirigeants dès qu’ils prennent le pouvoir ? Pourquoi lorsqu’il s’agit des caisses du parti, ces élus et ces militants font attention et pourquoi, lorsqu’il s’agit de l’argent du contribuable, l’argent de tous, lorsqu’il s’agit des finances publiques, ils font absolument tout et n’importe quoi ?

Ces capitalistes éhontés du Parti Socialiste ne se ficheraient pas un peu de nous ?"

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27 août 2015 4 27 /08 /août /2015 09:52

Force est de constater," la presse française a trouvé de quoi s’occuper: interview des passagers, des contrôleurs, des forces de l’ordre et des politiciens, infographies rutilantes et explication sur le fonctionnement des toilettes de train, tout y passera pour occuper leur audience sur l’attentat qui n’a pas eu lieu, l’héroïsme des uns, les petites blessures des autres. Pendant ce temps, le monde continue de tourner. Au vinaigre.

Cela faisait pourtant plusieurs mois que plusieurs analystes, sérieux mais toujours sous le radar des médias grand public, annonçaient à qui voulait l’entendre (rassurez-vous : presque personne) que la situation économique mondiale n’était vraiment pas folichonne et qu’un problème grave couvait. Cela faisait aussi quelques jours que les signes d’une tension hors normes s’accumulaient. Et comme d’habitude, la presse française semble comme prise par surprise. Les analystes maison, tous plus pondérés les uns que les autres, se sont relayés pour rassurer sur un « potentiel de baisse limité », alors que tout indiquait pourtant une nervosité quasi-épileptique de tous les marchés.

Alors forcément, lorsque tous les indicateurs partent au plancher d’un coup, cela engendre quelque peu la panique dans les salles de conférence de presse. Le choix (entre les événements du Thalys et le petit vent de folie boursier) est cependant vite fait. Et puis ce n’est pas comme si les Français y comprenaient subitement quelque chose en économie.

Mais tout de même : cela fait un peu désordre, cette baisse de la bourse de Shanghai qui se prend -8,5% après une semaine déjà passablement douloureuse et qui amène finalement l’indice à effacer ses gains enregistrés depuis le début de l’année. Si ce n’est pas encore un krach, la vitesse et l’ampleur du mouvement laissent l’imagination s’emballer. Et puis, cela fait logiquement désordre, cette bourse de Tokyo qui dévisse à son tour, suivie par le CAC français ou un DAX allemand en très petite forme, alors qu’il s’était déjà senti un peu mal la semaine dernière. Et tant qu’on y est, cela laisse songeur, ce prix du baril de pétrole qui dégringole sous les 40$, signe d’un souci dans ce marché, soit d’une surproduction, soit d’une sous-consommation, soit d’une mauvaise allocation de capital que le marché tente de corriger, soit un peu tout ça…

Et puis, comment ne pas sentir comme un petit parfum d’angoisse lorsqu’après des mois d’incohérence complète sur le marché de l’or (mélange de demande forte du physique et de morosité des achats de banque centrale, couplé à une production en baisse et des prix eux-mêmes en baisse), ce dernier se redresse subitement ? Comment ne pas voir la déflation s’installer gentiment sur à peu près toutes les matières premières, signe d’un ralentissement net de la production, donc de la consommation et de la croissance (désolé François, c’est mal parti pour la fin d’année) ?

La suite, on la redoute déjà : les monnaies chahutées, le dollar constituant le seul refuge pratique actuellement (et logique en période de déflation). Pour le moment, l’euro gagne du terrain, mais qu’en sera-t-il dans quelques semaines, quelques mois ? Pire : comment imaginer que ces variations sur les monnaies (quels que soient leurs sens) seront bénéfiques pour une zone euro déjà passablement fragilisée par les péripéties récentes ?

Quant à la Fed américaine, comment peut-elle espérer se sortir de ce traquenard, où une intervention pour monter les taux déclenchera la panique, une autre pour les baisser confirmera la gravité de la situation et attisera probablement les peurs existantes, et où tout attentisme sera lourdement condamné, au moins médiatiquement ? En somme, tout ce petit monde, des banques centrales aux gouvernements en passant par les principaux organismes financiers, semble passablement coincé, condamné à échouer avant même d’avoir agi.

En outre, il reste au milieu de tout ça un véritable éléphant, pas évoqué, mais difficile à manquer : c’est le marché des bons d’États souverains, notamment européens. Les dettes sont colossales, les jeux d’écritures rigolos et créatifs entre les banques, les banques centrales, les différents États et la BCE elle-même se multiplient, mais le total, en bas de la facture, est toujours plus gros et les richesses produites n’arrivent pas à freiner la tendance. Il faut regarder la réalité en face : la Grèce n’est pas un cas épineux, un problème ponctuel qu’on peut traiter séparément. C’est, en réalité, le symptôme d’un mal qui ronge tous les pays à divers degrés : un endettement mortifère par clientélisme social-démocrate débridé, endettement délirant qui est encore aujourd’hui louangé par les épaves keynésiennes médiatiques Bref : il arrive, doucement mais sûrement, ce moment où les marchés ne pourront plus gober de nouvelles dettes, gavés qu’ils sont des précédentes déjà émises et des gains de plus en plus incertains que la conjoncture laisse entrevoir.

À présent, tout est imaginable, le meilleur – la situation se redresse, les marchés se calment et Hollande, lucide et décidé, réforme le pays pour des lendemains qui chantent – comme le pire – la dégringolade continue, maintenant ou un peu plus tard, entourée des nécessaires précautions oratoires, d’un vivre ensemble tous les jours plus punchy et d’une nouvelle vague de solidarité invasive totale.

Or, pour piloter cette situation, nous avons des cadors. Si, avec Nicolas Sarkozy, on avait gagné le ticket médiatique d’un VRP clinquant qui courait d’un sommet international à un autre en prétendant partout qu’il allait sauver le monde et éviter la catastrophe, avec François Hollande, on a récupéré un petit monsieur Loyal, un organisateur de fêtes municipales, un commis aux compromis dont on voit mal l’adéquation avec la situation actuelle. Et on ne voit pas par quelle pirouette intellectuelle on va redresser la situation ou proposer des solutions ou un chemin opérationnel crédible avec l’équipe qui entoure le pauvre chef de l’État, équipe composée de « bouffis » de suffisance et parfaitement déconnectés tant des vrais enjeux que des réalités de terrain.

La tempête arrive. Tout comme les gros grains, elle prendra du temps à se former, elle s’inscrira sur la durée et ses dégâts seront profonds. Pendant les huit années écoulées, on a fait exploser nos déficits, les dépenses de l’État, les gabegies et les magouilles : la France, depuis 2007, a intelligemment choisi de s’endetter comme jamais (avec Sarkozy) et de n’entreprendre absolument aucune réforme de fond (avec Hollande)".

Alors forcément, ça va bien se passer.

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25 août 2015 2 25 /08 /août /2015 11:52

"Le professeur Charles L. Glenn, professeur à l’Université de Boston et grand spécialiste de la liberté scolaire dans le monde, explique comment la revendication du libre choix de l’école par les parents est peu à peu montée en puissance en Occident. Elle a été longtemps en conflit latent avec la prétention des élites au pouvoir de remodeler selon leurs conceptions les enfants du peuple. Mais depuis quelques dizaines d’années, la capacité de l’État à satisfaire les besoins éducatifs véritables des enfants est fortement remise en question de tous côtés. La tendance est d’inciter la société civile, le « troisième secteur » à prendre ses responsabilités en matière éducative. C’est la théorie de « l’empowerment », qui n’a rien à voir avec une quelconque marchandisation de l’école. Par leur implication concrète dans les écoles libres, les citoyens passent du statut d’objet du pouvoir à celui de contributeurs actifs de la société, ce qui correspond à un processus de démocratisation véritable de la vie de la cité.

Bien que la liberté d’enseignement ait fait l’objet de protections dès le XIXème suite à des combats politiques dans quelques pays – notamment en Belgique, avec le mouvement d’indépendance de 1830, et plus tard aux Pays-Bas avec la mobilisation de Protestants et de Catholiques du « kleine luyden » – la protection de la liberté d’enseignement reste exceptionnelle jusqu’au lendemain de la deuxième Guerre mondiale.

Ce n’est qu’en réaction aux régimes totalitaires du XXème siècle que la communauté internationale prend conscience de la nécessité de protéger la liberté des familles de choisir une alternative aux écoles publiques. Les régimes communistes et fascistes ont cherché à mettre en œuvre systématiquement ce qui faisait partie implicitement des programmes éducatifs des gouvernements « doucement progressistes » de la fin du XIXème siècle. Ils l’ont fait d’une manière qui a démasqué la volonté des élites de remodeler selon leur conception, par l’éducation, les enfants du peuple.

Le mouvement d’après-guerre de définition des Droits de l’homme a inclus le droit à la liberté d’enseignement : « les États s’engagent à respecter la liberté des parents de choisir pour leurs enfants des établissements autres que ceux des pouvoirs publics […] et de faire assurer l’éducation religieuse et morale de leurs enfants, conformément à leurs propres convictions. »

Ce droit est pourtant loin d’être évident, même dans les régimes démocratiques, où les élites « progressistes » peuvent juger qu’il est de leur devoir d’utiliser le système éducatif pour rendre les enfants meilleurs que leurs parents.

Le passage manquant de l’extrait du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels donné ci-dessus – à savoir « qui se conforment aux normes minimales qui peuvent être prescrites ou approuvées par l’État » – donne la possibilité aux gouvernements d’imposer des exigences aux écoles non gouvernementales (écoles privées), exigences qui peuvent conduire à rendre impossible le maintien du caractère propre et des spécificités éducatives en faveur desquelles les parents avaient pourtant fait leur choix.

Il y a clairement une obligation qui pèse sur les États contemporains de prendre les mesures nécessaires à la protection des enfants tout en faisant en sorte que l’intérêt public soit servi par toutes les acteurs, privés ou publics, du système éducatif.

L’éducation des générations futures est une question d’intérêt public et doit être guidée, dans un système démocratique, par des hypothèses partagées sur le bien commun… dans des limites qui reflètent la nature pluraliste de la société.

L’effort pour respecter le rôle des parents comme premiers éducateurs de leurs enfants et donc pour trouver le juste équilibre entre la liberté et la responsabilité en éducation – pour s’assurer que les objectifs nécessaires de la société soient atteints et que les individus et les groupes vulnérables soient protégés sans tomber dans ce que Kant appelait « le plus grand despotisme concevable » : un gouvernement paternaliste

La période allant de 1900 à 1945 peut être vue, rétrospectivement, comme celle du triomphe de l’école d’État dans la plupart des pays occidentaux. Alors que les écoles catholiques ou les autres écoles privées éduquent des millions d’enfants, elles jouent un rôle secondaire, comme une alternative ou, aux États-Unis et en Australie, comme le lieu réservé à la classe ouvrière immigrée. L’école publique représente alors la pierre angulaire de la société et n’a aucun concurrent sérieux.

L’école d’État a commencé à être concurrencée après la Seconde Guerre mondiale et la rivalité s’est accrue en particulier dans les années 1970.

Dans le raisonnement politique qui a été formulé petit à petit dans un certain nombre de pays, des termes tels que « subsidiarité » et « champ de souveraineté » ont commencé à se faire entendre. On a fait valoir que l’État devrait créer activement dans tous les secteurs les conditions du développement d’initiatives entrepreneuriales selon un principe de libre entreprise, au lieu de vouloir occuper lui-même tout l’espace social.

La centralisation excessive a commencé à être considérée comme un problème. Alors que l’État-providence continuait de se développer et les activités du gouvernement de s’étendre à de plus en plus de domaines de la vie, il y avait en même temps un désenchantement croissant à l’égard de la capacité de l’État et de sa rationalité bureaucratique de répondre efficacement aux besoins de l’homme.

Dans ce contexte d’insatisfaction, certains ont appelé à un « retrait de l’État », pour « réinventer le gouvernement », en adoptant de nouvelles techniques d’organisation sociale qui conduisent à la prise en main par les gens de leur propre destinée ( cf. théorie de l’« empowerment ») dans des secteurs et des organismes éloignés du centre, et donc à la création d’institutions par les citoyens pour eux-mêmes.

Les autorités publiques de la Finlande à l’Australie, et les régimes politiques de gauche comme de droite, ont cherché des façons de maintenir les acquis apportés par l’État-providence sans avoir un monopole public qui fournisse services et prestations. Selon Peter Berger et Richard John Neuhaus :

« Le projet est que, si ces institutions (créées par la société civile) pouvaient être plus reconnues dans les politiques publiques, les individus se sentiraient davantage « chez eux » dans la société, et l’ordre politique serait mieux compris. Sans processus institutionnels fiables de médiation, l’ordre politique se détache des valeurs et des réalités de la vie individuelle. Privé de son fondement moral, l’ordre politique est « délégitimé ». »

Selon ces propositions, les citoyens sont conçus en de nouveaux termes par les décideurs politiques qui les percevront non pas comme des objets de l’action gouvernementale, mais plutôt comme des acteurs se caractérisant par la responsabilité, l’autonomie et le choix, et dotés de la ressource et des informations disponibles pour les finalités communes de la société.

Ces propositions ne doivent pas être confondues avec la « marchandisation » des services à la personne, dont l’éducation, car ils ne sont pas une manifestation du « capitalisme sauvage ». Ses partisans insistent sur le fait que ce qu’ils demandent, c’est l’utilisation d’un « troisième secteur » composé d’associations volontaires qui ne sont ni étatiques ni mercantiles mais qui relèvent simplement d’association d’intérêt général conclues sur la base du volontariat.

Les réformes proposées visent à renforcer les pouvoirs des citoyens en tant que membres actifs de la société, cherchant à améliorer leur qualité de vie et celle de leurs familles par des actes de choix".

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24 août 2015 1 24 /08 /août /2015 15:48

"Les mois de juillet et d’août en France sont facilement synonymes de repos pour le Français moyen, qui goûte sans doute au bonheur de retrouver le fruit de son travail, une fois le jour de libération fiscal atteint. Ce repos ne s’étend malheureusement pas jusqu’au parlement et aux politiciens qui profitent justement de l’éloignement des Français de leurs centres habituels de préoccupations pour accumuler les petits coups en douce.

De ce point de vue, l’année 2015 ne fait pas exception, et se caractérise même par un cru particulièrement fruité, puisque le rythme des stupidités étatiques était déjà soutenu avant et, l’inertie aidant, on a donc conservé une vitesse de croisière stupéfiante dans l’amoncellement de lois, décrets et décisions farfelues. L’actualité récente suffit à s’en convaincre.

Il y a eu, bien sûr, la crise agricole qui a rapidement pris des proportions présidentielles dès que François Hollande a décidé de s’en mêler pour transformer, comme à l’accoutumée, une actualité déjà tendue et passablement engluée dans les mauvaises habitudes en situation inextricable, coûteuse pour le contribuable et qui aggrave le problème plutôt que le résoudre : alors que tout indique que l’ensemble de la filière agricole française souffre d’un interventionnisme catastrophique de l’État, alors que les solutions sont connues (et décrites par Vincent Bénard par exemple), alors même que d’autres pays ont déjà testé ces solutions avec succès, le factotum présidentiel aura décidé d’en remettre une couche (à 600 millions d’euros) qui a le mérite d’être à la fois mal calibrée (l’aide représente à peine plus qu’une aumône pour chaque agriculteur concerné), et parfaitement inutile voire contre-productive en ce qu’elle entretient un système d’assistanat délétère.

Parallèlement, on aura pu halluciner sur les gymnastiques statistiques parfaitement surréalistes qui nous furent offertes à l’occasion de la publication des chiffres du chômage de juin. Ce fut encore une fois l’occasion pour l’exécutif de se payer la tête des Français qui, trop nigauds de l’avoir posté là, doivent maintenant gober ses couleuvres de plus en plus épaisses. On ne peut bien sûr pas se réjouir de ce que ces chiffres camouflent (bien évidemment, le chômage augmente), mais au moins peut-on se satisfaire de la mise en péril de la candidature de Hollande pour 2017 : ce mollasson calculateur a choisi de la conditionner à l’inversion de tendance du chômage, ce qui place une pression énorme sur les frêles épaules d’un Rebsamen absolument pas à la hauteur. D’ailleurs, il se casse et ne plie pas, au contraire des prochaines statistiques, dont on pourra éprouver la souplesse prochainement, justifiant le maintien de la candidature hollandogène. Au pire, le petit François se déclarera indispensable pour lutter contre la bête immonde (qu’il aura tout fait pour faire monter) et le retour de l’excité (qu’il s’escrime pourtant à saboter par voie de justice).

Mais en termes de petites ignominies aux effets catastrophiques, ces précédents exemples parviennent difficilement à la cheville de cette loi discrète passée dans la troisième semaine de juillet concernant l’obsolescence programmée.

Soigneusement évitée par la plupart des rédactions nationales (à l’exception du Figaro notamment), le sujet, effleuré par quelques sites technologiques, n’a semble-t-il pas passionné les foules. Il faut dire que la punition par deux ans de prison et 300.000 euros d’amende des faits d’obsolescence programmée a été habilement camouflée au milieu de l’imbuvable loi sur la transition énergétique, définitivement adoptée dans la semaine du 25 juillet dernier par un Parlement déjà largement en vacance intellectuelle.

Pour rappel, l’obsolescence programmée serait cette hideuse technique imputée aux producteurs et autres distributeurs consistant à réduire volontairement la durée de vie d’un produit afin d’inciter le consommateur à en acheter davantage, selon l’adage bien connu que lorsque ça casse rapidement ou que ça ne rend pas le service aussi bien qu’on le souhaite, on en rachète encore (le consommateur, dans cette intéressante vision du marché, est un être à la fois fragile, influençable et borderline idiot). Heureusement, cette technique qui, en réalité, n’existe pas, est maintenant un délit.

En effet, comme je l’expliquais il y a quelques mois dans un précédent billet, cette loi à base de poudre de licornes combat des gremlins et des leprechauns. C’est pratique de condamner sévèrement quelque chose qui n’existe pas : avec une définition suffisamment floue, cela permet de trouver de temps en temps de rares coupables fort pratiques pour une expiation médiatique, et cela assure, le reste du temps, que tout le monde va respecter la loi scrupuleusement.

Et si je dis que ça n’existe pas, c’est parce que c’est vrai : il suffira à ceux qui continuent niaisement de croire aux fadaises gouvernementales de se reporter à ces quelques liens pour vérifier l’écart à la réalité et comprendre que cette fumeuse obsolescence, non, ça n’existe pas, du tout.

… Enfin, presque pas du tout puisqu’en réalité, lorsque l’État se mêle de nos vies, l’obsolescence, parfaitement et ouvertement programmée, ne semble gêner personne, ce qui permet d’imposer au citoyen-contribuable de payer pour renouveler son passeport, sa carte d’identité ou tant d’autres papiers administratifs frappés d’une date limite de péremption. Cela permet d’imposer une obsolescence rapide de la voiture dans certaines agglomérations par interdictions successives ; cela autorise la disparition des méchantes ampoules à incandescence (qui ne produisaient, au pire, qu’un peu de CO2) au profit d’ampoules au mercure, terres rares et autres joyeusetés polluantes à des prix très supérieurs ; cela permet le vieillissement accéléré d’un peu tout et n’importe quoi par un incessant changement de normes (pour vot’sécurité, ma brav’dame). Quand c’est l’État, c’est permis, bien sûr.

Mais peu importe : la loi est votée, et tout le monde va s’empresser de l’appliquer, avec le même entrain que le principe de précaution devenu stupidement constitutionnel, et avec les mêmes effets délétères, durables et calcificateurs à moyen et long termes sur la société française.

De ce point de vue, cette loi – qui ne définit même pas ce que doit être une durée de vie normale d’un produit, comment on prouve qu’elle a été réduite, et comment on détermine que ce fut intentionnel – illustre fort bien la mentalité de nos dirigeants et dans une bonne part celle de ceux qui les soutiennent : pour eux, le consommateur est un enfant, niais et impressionnable, régulièrement floué par les producteurs qui, sans les bornes de la loi, s’organiseraient chaque jour pour le détrousser sur tous les chemins nationaux, à chaque commerce, à chaque vente et sur tous les rayonnages de supermarchés.

C’est parfaitement grotesque, mais le flou consternant de cette loi va donner une arme de plus à tous les pourfendeurs de l’entrepreneuriat pour attaquer les producteurs sur tout et n’importe quoi. Forcément, cela va les inciter à venir vendre, produire et embaucher en France. Forcément, cela va améliorer la situation. Forcément, cela aboutira à d’excellents produits d’extraordinaire qualité.

Forcément, cela va bien se passer".

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9 août 2015 7 09 /08 /août /2015 12:33

La réforme territoriale voulue par Manuel Valls a mobilisé beaucoup de monde pour pas grand-chose.

Au cœur d’une actualité riche en sujets dont tout le monde parle, Grèce, Iran, vacances, il est un sujet qui aurait pu être important et dont vous n’avez sans doute rien à faire, c’est celui de la « réforme territoriale » voulue par Manuel Valls, qui va accoucher d’une non-réforme pitoyable.

Réforme territoriale : le soufflé est retombé

Rappelez-vous : il y a 18 mois, le Premier ministre, toutes voiles dehors, annonçait la fin des départements, de grandes régions, la fin de la fameuse « clause de compétence générale » qui permettait à toutes les collectivités de s’occuper de n’importe quoi même si une autre s’en occupait déjà, etc. Même si personnellement, j’aurais supprimé la région plutôt que le département (j’y reviendrai), les annonces allaient dans le bon sens, même si elles manquaient de bonnes occasions d’aller plus loin encore.

Mais 18 mois plus tard, la loi «NOTRe» (avec un e minuscule, ce n’est pas une faute de frappe, « Nouvelle Organisation Territoriale de la République »), maintient les départements, n’apporte aucun allègement entre communautés de communes et communes, et crée un tel bazar dans les 14 régions pourvues de « métropoles » qu’il va être difficile, même pour un énarque, de s’y retrouver.

Après plusieurs allers-retours entre Assemblée Nationale et Sénat, le projet vient d’être adopté en Commission Mixte Paritaire, réunion de godillots de l’assemblée et de badernes du sénat supposée aplanir les différences entre les deux assemblées. L’accord étant trouvé sur un texte définitif (PDF – attention, ne cliquez que si vous êtes en bonne santé), son vote définitif ne sera plus qu’une simple formalité et la loi devrait être promulguée avant la fin du mois d’août. Les électeurs sauront donc à peu près pourquoi ils voteront aux régionales à la fin de l’année.

La loi n’a donc supprimé aucune structure, va juste faire passer le nombre de régions métropolitaines de 22 à 13 (impact sur le fonctionnement du pays proche de zéro). Elle supprime certes la clause de compétence générale mais maintient des « compétences1 partagées » entre les différents niveaux : sport, tourisme, culture, et éducation, autant dire que communes, départements, métropoles et régions vont continuer joyeusement à se marcher sur les pieds. Certes, en théorie, la région sera « chef de file », c’est-à-dire que les initiatives des niveaux inférieurs devront se conformer aux cadres définis par la région. Mais je n’ai vu dans le texte aucun moyen de censurer les initiatives doublonnantes ou déconnantes.

Et donc, la loi a rebattu les cartes, retirant certaines compétences à certains niveaux pour les donner à d’autres.

Ainsi, le département garde les routes et la logistique des collèges (alors que les régions ont la logistique des lycées. Il n’aurait plus manqué qu’il y ait des économies à faire en regroupant les deux !!) mais perd l’organisation du transport par autocar de lignes régulières subventionnées et du transport scolaire. La belle affaire. C’est, économiquement parlant, un non-événement.

Et le privé ? La réforme n’en a cure

La région devient leader du développement économique : en clair, la région devient la principale source d’argent public pour subventionner des activités dans les petits papiers du baron politique qui sera élu à sa tête. Mais le département et la commune pourront intervenir « dans le cadre défini par la région », et les communes ou leurs groupements restent seules habilitées à fournir de l’immobilier (terrains, zones, voire bâtiments) aux entreprises.

Il ne serait pas venu à l’idée du législateur que ces activités seraient à coups sûrs mieux assumés par le secteur privé si aucune institution publique ne s’en mêlait…

De même, la région reste chef de file en matière de politiques locales de l’emploi… Mais continuera de faire double… emploi, c’est le cas de le dire, avec Pôle Chômage, notre agence de non-placement de chômeurs bien connue. Elle reste organisatrice de la formation professionnelle, conservera un rôle important, mais pas exclusif de l’État, dans l’apprentissage, selon un schéma qui ne devrait guère évoluer philosophiquement de celui en vigueur il y a 5 ans.

J’aime beaucoup la logique voire le schéma car il peut être répété pour tout ce que fait une région : l’État lui donne des ressources qu’il a lui même ponctionnées (aux entreprises ou aux ménages), la région y ajoute quelques impôts qu’elle prélève elle-même, mais qui ne sont qu’une partie minoritaire de son budget, et arrose des organismes parapublics, associatifs, ou privés, pour délivrer un certain nombre de prestations, dans une opacité et une faiblesse du contrôle des résultats régulièrement épinglés par la Cour des comptes ou ses chambres régionales.

Là encore, il ne serait pas venu à l’idée que si l’État et la région n’intervenaient pas, et que ne subsistaient que les entreprises et les organismes de formation, le système fonctionnerait globalement mieux. « Ce qui est trop simple est simpliste, monsieur, vous n’avez rien compris au génie français. »

La loi s’est ingéniée à définir quelle entité publique devait recevoir telle ou telle attribution, mais ne s’est jamais posée la question de savoir si une privatisation partielle ou totale d’une thématique ne serait pas une meilleure solution. Le planisme et l’interventionnisme n’ont jamais vraiment quitté l’esprit de nos législateurs.

Comment les départements ont sauvé leur peau ?

Bref, une région, comme je le dis souvent, est essentiellement un canon à pognon, qui fait très peu de choses elle-même, mais qui distribue de l’argent à d’autres. Par exemple, les régions financent la SNCF pour maintenir des lignes régionales dont même les plus fréquentées ne sont pas rentables, au lieu de laisser le secteur privé s’en occuper.

Voilà qui explique pourquoi les départements n’ont pas disparu.

En effet, les départements sont des collectivités « opérationnelles », qui gèrent des personnels de proximité, agissant directement sous statut public : personnels routiers, personnels sociaux, personnels techniques des collèges, notamment. Les régions n’ont que des personnels techniques de lycée à gérer en matière d’action de proximité, et sont des collectivités « d’intervention », nom pudiquement donné à l’arrosage d’argent public et à l’achat de prestations auprès de prestataires privés. Le département pratique aussi l’intervention, mais cela n’est qu’un pilier de son portefeuille d’activités.

Les régions ne savent donc pas gérer de gros bataillons de personnel opérationnels et ne veulent pas le faire. Ce rôle n’est pas considéré comme gratifiant par les politiciens et n’attire que des ennuis auprès des électeurs. Au contraire, distribuer de l’argent permet d’acheter des clientèles, et de fréquenter des artistes, des chefs d’entreprise, etc.

Tout l’enjeu, pour les régions, a donc consisté à ne récupérer que le leadership sur les activités permettant de distribuer de l’argent, mais surtout pas de récupérer des masses de personnels syndicalisés, venant de départements aux salaires disparates qu’il aurait fallu, évidemment, aligner sur la collectivité la plus généreuse avant la fusion…

Et voilà pourquoi concrètement, les régions ne récupéreront que les transports inter-urbains et scolaires comme activité nouvelle (les prestations sont achetées auprès de transporteurs comme Kéolys) mais pas les routes ou les ports, ou les collèges, qui resteront aux départements, qui voient leur existence maintenue. Cela permet donc de maintenir des élus dans les deux instances, de ne pas en diminuer le nombre, et de conserver un nombre conséquent de fauteuils présidentiels. Et cela rend la fonction de Président de région relativement confortable.

Doublons entre collectivités, État, et « organismes satellites » maintenus

Ajoutons que la loi ne réforme pas les doublons entre l’appareil d’État et celui des collectivités (franchement, qui peut me dire à quoi servira une DREAL en 2016 ?), ne fait évidemment pas le ménage dans toutes les structures satellites créées soit par l’État, soit par les échelons inférieurs, qui se sont spécialisés dans un domaine bien précis : Syndicats intercommunaux pour l’électrification ou l’adduction, ou encore l’assainissement, chambres d’industrie et d’agriculture, CAUE (Conseils d’architecture, d’urbanisme et d’environnement), sociétés d’économie mixte en aménagement du territoire, agences foncières régionales et/ou départementales chargées de préempter tout terrain de bonne taille qui se présente, Sociétés publiques locales (une nouveauté de 2010) susceptibles de remplacer, au moins en partie, les missions de conseil autrefois assurées par les services d’État… Sans parler des « machins » d’État qui ne sont pas des administrations mais qui en ont l’odeur, la saveur et la couleur : Agence régionale de santé, Direction interrégionale des routes (pour les grands itinéraires), Agence Nationale de Rénovation Urbaine, Agences de l’eau, ADEME, Commission des sites, commission nationale du débat public, etc, etc, etc, jusqu’à la nausée.

Non seulement tout ce fatras ne sera pas simplifié par la réforme, mais les départements pourront créer des structures d’assistance technique aux petites communes, pour remplacer les anciens ingénieurs et techniciens des ex-DDE, organismes aujourd’hui en voie d’extinction, sous le nom de DDT.

Ajoutons que les intercommunalités rurales, qui pouvaient avant se regrouper en « pays », pourront désormais former des PETR, Pôles d’Équilibre Territoriaux et Ruraux, qui élaboreront des « projets de territoire », et nécessiteront quelques postes de fonctionnaires « de réflexion et d’intervention » supplémentaires. Effectivement, les PETR, voilà qui manquait à nos campagnes.

Départements avec métropoles : foutoir garanti

Et j’oubliais : les 12 départements qui hébergent une métropole (hors Paris et Lyon) doivent négocier avec lesdites métropoles les modalités de transfert de blocs de compétences à choisir parmi ceux-ci : Fonds de solidarité pour le logement, Action sociale, Insertion, Aide aux jeunes et actions pour la jeunesse, aides sociales, dont aide aux personnes âgées, Tourisme, et collèges.

Là encore, notez que le terme de « privatisation », ou de retour à la société civile, n’a jamais effleuré le législateur. Mais passons.

Chaque métropole sera un cas unique, toutes ne récupéreront pas les mêmes compétences, et nous verrons la chose curieuse suivante se développer : dans ces départements, où la métropole concerne à peu près la moitié de la population, les compétences partiraient vers la métropole, mais une grande part des élus issus des cantons métropolitains continueraient de siéger au conseil départemental et à influencer les zones rurales de par leurs décisions. Une laie n’y retrouverait pas ses marcassins.

Et je ne vous parle pas des usines à gaz que constitueront les transferts financiers consécutifs à ces négociations, entre collectivités… Parce que pour l’instant, rien n’est arrêté. Et les transferts doivent se mettre en place en 2017…

Pas de contre-pouvoirs ?

Dernière chose : le texte Notre ne définit aucun contre-pouvoir contre un président de région qui utiliserait son canon à pogn…. pardon, ses compétences renforcées, à tort et à travers.

Voilà pourquoi je suis plus que réservé vis-à-vis de l’utilité des régions en tant qu’échelon politique : la France, aujourd’hui, n’a pas besoin de grands dépensiers arrosant certains secteurs de leurs largesses, au nom des lubies du moment : action numérique, développement durable, transition énergétique, etc. Quitte à conserver un seul échelon intermédiaire entre communes et État, le département, parce qu’il est plus petit et à moins d’argent à « canonner », me parait moins mauvais, car il ne peut faire que des petites bêtises, alors que la région pourra en faire des très grosses.

Conclusion, une non-réforme qui ne touche rien d’essentiel

Il est consternant qu’un processus législatif aussi lourd, ayant mobilisé tant d’énergie, aboutisse à si peu, et que l’opposition n’ait jamais engagé le combat avec la gauche sur le terrain du retour de certaines activités à la société civile.

Quoi qu’il en soit, cette réforme territoriale ne fait que rebattre des cartes entre des échelons existants, sans changer aucun des paradigmes fondateurs de l’intervention publique sur le territoire. Cela créera un peu de bazar au niveau des activités changeant d’employeur (bonne chance si vous avez des enfants utilisant les transports scolaires), cela ne simplifiera ni les circuits de financement croisés de l’action publique, ni l’organigramme des intervenants publics, qui sont les deux principales sources de gabegies au niveau local.

N’en attendez ni un surcroît d’efficacité du secteur public, ni des économies. Au mieux, de ce point de vue, elle sera neutre, au pire, 13 grandes régions se lanceront dans une compétition de dépenses « stratégiques » qui se révéleront contre-productives, le plus souvent.

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5 août 2015 3 05 /08 /août /2015 09:36

Les attaques contre le libéralisme ne datent pas d’aujourd’hui. À la fin du XIXe siècle, un des derniers représentants de l’école classique française, Frédéric Passy, invité à Genève, y faisait une conférence où il plaidait la cause de ce qu’il appelait l’école de la liberté : c’était le 9 avril 1890. En voici un extrait qui reste toujours d’actualité et qui mérite d'être analysé voire médité

« C’est un accusé qui paraît aujourd’hui devant vous. Il sait qu’il n’a pas seulement à se défendre personnellement lui ou ses idées, mais qu’il a à défendre avec lui, avant lui et plus que lui, ses amis, ses collaborateurs et ses maîtres, c’est à dire tous ceux dont l’ensemble constitue l’école à laquelle il s’honore d’appartenir, l’école de la liberté.

Oui, messieurs, je crois à la liberté, à cette liberté sans laquelle on n’aurait pu, ni lui faire son procès, ni plaider pour elle et qui est, comme l’a dit si bien Bastiat, « le tout de l’homme, son moteur, son professeur, son rémunérateur et son vengeur. »

J’y crois par ce que je crois que la société humaine est autre chose qu’une collection d’automates attendant d’une main étrangère le mouvement et l’illusion ; parce que je crois que ce monde n’a point été livré au hasard et qu’il y a, dans les sciences de l’ordre moral comme dans les sciences de l’ordre matériel, des lois qu’il n’est point en notre pouvoir de changer, mais qu’il est de notre pouvoir d’étudier pour nous en servir en nous y conformant, parce que, comme l’a dit admirablement Boisguilbert, « la nature ne respire que liberté ; elle ne demande pas que l’on fasse des miracles, elle demande seulement qu’on cesse de lui faire une perpétuelle violence. »

C’est pourquoi j’estime que ce qui est en cause devant vous ce n’est pas seulement un système économique, mais le fond même de la vie politique et de la morale. C’est en même temps l’éternelle querelle de la réalité et de l’hypothèse, de la science et de l’empirisme, du possible et de l’impossible, de l’observation qui éclaire et de l’imagination qui égare.

On a reproché avant tout à cette école classique, ce qu’on a appelé son indifférence, son optimisme, son impassible et béate résignation à toutes les imperfections et toutes les misères du présent. On l’a accusée de n’avoir pour les douleurs et pour les aspirations de l’humanité, ni consolation, ni espérance, et de se borner à répondre à ceux qui souffrent comme à ceux qui désirent : « les choses sont comme elles sont, et tant pis si elles ne vous conviennent pas ainsi ; nous ne pouvons rien pour vous, frappez à côté. »

Cette doctrine n’est point une doctrine d’insensibilité et d’indifférence ; c’est une doctrine d’humanité et de progrès. Mais c’est en même temps parce que en dehors de la raison, il n’y a ni humanité ni progrès, une doctrine de la raison. C’est la doctrine de gens qui, au lieu de refaire le monde à leur fantaisie et de faire miroiter devant les yeux de leurs semblables la vaine fantasmagorie d’une perfection impossible, bonne tout au plus à surexciter leur souffrance en faisant naître en eux des prétentions irréalisables, cherchent, en étudiant la nature humaine et ses lois, à déterminer ce qui se doit et ce qui se peut, et enseignent aux hommes, non pas à se révolter contre ce qui est, mais à tirer de ce qui, par l’emploi intelligent et raisonné de leur activité, le meilleur parti possible.

L’école de la liberté n’est ni l’école de l’approbation, ni l’école de la condamnation. Elle ne dit pas que tout est bien dans la société ; elle ne dit pas non plus que tout y est mal. Elle dit que le corps social, comme le corps humain a ses imperfections et ses maladies ; mais aussi que le corps social, comme le corps humain, a sa constitution naturelle, ses organes nécessaires qui ne peuvent être supprimés sans porter atteinte à l’ensemble, que pour l’un comme pour l’autre, la première condition de toute médecine utile, c’est la connaissance de cette constitution fondamentale, l’étude du jeu de ses organes, le respect de cette force vitale, sans laquelle on ne peut rien, et que toute la science du vrai médecin consiste à dégager des influences ou des gènes qui le contrarient.

Elle n’est, en un mot, ni optimiste, ni pessimiste. Elle croit au mal parce qu’elle le voit et elle le combat. Elle croit au bien parce qu’elle le voit aussi et parce qu’elle en a le besoin, et elle travaille à l’augmenter. »

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29 juin 2015 1 29 /06 /juin /2015 11:25

"En France, quand il pleut, c’est à verse et quand ça dévisse à l’extérieur, ça part en vrille à l’intérieur. Logiquement, alors que la situation internationale se fait chaque heure plus tendue, entre les énièmes péripéties grecques et le spectre de plus en plus présent d’une bulle financière sur le point d’éclater, on devait s’attendre aussi à une détérioration record de la situation économique purement nationale. Rassurez-vous : c’est aussi le cas.

Et c’est d’autant plus inquiétant que les informations suivantes n’ont pour ainsi dire pas été relayées par la presse nationale, trop occupée à regarder les sorties lapidaires de M.Valls ou les dernières âneries de JC.Cambadélis. Pourtant, la nouvelle méritait sans doute qu’on s’y attarde même si l’actualité chargée justifie sans doute qu’il faille un peu de temps pour la faire revenir à la surface.

En substance, on découvre une inquiétude croissante des départements devant la croissance incontrôlée des prestations sociales.

Autrement dit, les départements n’ont plus une thune. Ce ne serait pas vraiment problématique si l’État, de son côté, disposait de quelques réserves. Mais ce n’est pas le cas et on commence à comprendre qu’en cette période de disette financière, il va falloir faire des efforts pour joindre les deux bouts, et ce d’autant plus que nous ne sommes qu’en juin. Or, si avoir des problèmes de trésorerie en octobre, c’est enquiquinant, alors en juin, cela devient franchement problématique.

D’autant que la raison principale du manque de trésorerie n’est pas liée à une dépense incontrôlée des fournitures de bureau qu’il serait facile de calmer, mais bien des prestations sociales au bout desquelles se trouvent des individus qui n’ont bien souvent pas vraiment d’alternative solide si celles-ci devaient s’interrompre, même momentanément.

Le constat, pourtant, ne laisse aucun doute et part d’une lettre de l’ODAS, l’Observatoire national de l’Action sociale, qui note il y a quelques jours que, je cite, « sans évolution du mode de financement de leurs compétences obligatoires, les Départements ne pourront plus, dans leur grande majorité, équilibrer leur budget dans un proche avenir. » Autrement dit, la distribution d’argent public continue de plus belle, son débit a même nettement augmenté (1.4 milliard de dépenses en plus en 2014 par rapport à 2013), et l’État, à sec, ne pourra bientôt plus du tout garantir l’équilibre des finances départementales.

Ce constat est partagé tant à droite qu’à gauche. Le bureau de l’ADF (Assemblée des départements de France), classé à droite, s’est alarmé de « la croissance incontrôlée des allocations individuelles de solidarité (AIS) qui conduira à l’asphyxie mortelle des départements » pendant que de son côté, « le groupe de gauche insiste sur l’urgence de la situation des finances départementales ».

Dans ces dépenses sociales, le premier poste des allocations versées est clairement le RSA (à 58%) dont les dépenses ont progressé de 9,2% en 2014. Les autres postes (l’APA – Allocation personnalisée d’autonomie – et la PCH – Prestation de compensation du handicap) sont aussi concernés par ces problèmes de trésorerie. Or, à moins bien sûr d’une inversion de courbe du chômage que bien peu espèrent encore, la situation devrait continuer de s’aggraver. Le plus gênant étant qu’on ne sache absolument pas à quoi s’en tenir ; d’après Claudine Padieu, directrice scientifique de l’ODAS,

« Contrairement aux autres postes, les économistes ne parviennent pas à réaliser des prévisions fiables pour le RSA. La hausse de ces dépenses est d’autant plus préoccupante qu’elle est imprévisible »

Zut, il va être délicat de planifier quelque chose (ce qui est une horreur pour nos amis les planistes), et tout indique que ça ne va pas aller mieux tout seul. Zut et zut.

Dès lors, on ne s’étonnera pas de retrouver quelques gémissements de conseillers départementaux, pour le moment discrets dans la presse locale, constatant, effarés, que la source d’argent gratuit des autres, qui tombait jusque là avec une belle régularité, commence à s’assécher. Zut, zut et rezut, il va falloir supprimer certaines subventions. Zut, zut, et rezut, tout ceci donne un parfum de déroute aux finances locales et pousse même certains à évoquer, sans ambages, un « krach budgétaire territorial ».

Eh oui, le problème, d’habitude pourtant simple, devient rapidement insoluble. Jusqu’à présent, il suffisait en effet de réclamer des sous à l’État. Lorsque celui-ci renâclait, la collectivité territoriale, jamais à court d’imagination, trouvait l’une ou l’autre taxe à augmenter, l’un ou l’autre impôt à retailler vers le haut, et, magiquement, l’argent rentrait. Malheureusement, ce temps de cocagne est révolu. Comme l’explique Jean-Louis Sanchez, délégué général de l’ODAS,

« Les conseils départementaux ne peuvent plus augmenter les impôts et, à ce rythme, ils ne pourront plus financer leurs dépenses sociales dans trois ans. »

Vous me direz : oh, trois ans, c’est encore une belle et longue période qui donnera certainement l’occasion à nos éternels dépensiers d’exprimer toute leur créativité, n’en doutons pas. Je me permets cependant de pointer que les dettes s’empilent, les expédients possibles s’amenuisent et les marges de manœuvres, déjà fort étroites il y a trois ans, risquent bien, à l’approche des élections et de l’impératif évident de ne pas tabasser l’électeur, de s’évanouir complètement. Autrement dit, tout ce petit monde, lentement mais sûrement, est coincé : ne pouvant plus augmenter les impôts, ne pouvant plus guère augmenter la dette, il va leur falloir diminuer les dépenses.

Comme explicité en introduction, depuis que François Hollande a récupéré le pays des mains du précédent, lorsqu’il pleut, c’est à verse. Alors que les tensions internationales n’ont jamais été aussi fortes, que les marchés financiers affichent tous une situation bullesque et que le moindre événement imprévu risque bien de déclencher des mouvements de panique mémorables, la situation économique nationale est inextricable. L’État, endetté jusqu’au cou, ne peut même plus faire mine d’aider les départements, eux-mêmes confortablement installés dans les dettes. Et ce ne sont pas les prochaines élections régionales qui vont inciter les uns et les autres à apurer la situation".

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19 juin 2015 5 19 /06 /juin /2015 09:18

Eh oui !!! le Baccalauréat 2015 a bien commencer avec la traditionnelle épreuve de philosophie. Comme les années passées, on trouve bien évidemment le lot habituel de sujets « bateaux » (« Suis-je ce que mon passé a fait de moi ? ») ou qui caressent gentiment le chaton mignon qui sommeille en chacun de nous (« Respecter tout être vivant, est-ce un devoir moral ? »). Plus intéressant cette année, on découvre une question piquante dans l’actuel contexte gouvernemental : « La politique échappe-t-elle à l’exigence de vérité ? »

Facétie d’un corps professoral particulièrement agacé par l’actuelle réforme du Collège, passée avec la délicatesse d’un gouvernement en mode Panzer (49/3) ? Désir de vouloir réveiller des centaines d’élèves en les faisant réfléchir sur l’incroyable écart entre ce que le politicien promet et ce qu’il délivre, mandat en poche ? On ne saura pas trop ce qui a abouti à poser une telle question dans les sujets du bac 2015, mais reconnaissons un certain courage aux enseignants pour avoir osé un tel sujet.

Courage d’abord parce qu’il faut bien le reconnaître, poser la question, c’est un peu y déceler la réponse d’un corps enseignant réputé pour avoir voté massivement pour l’actuel président et qui doit trouver sa pilule bien amère à avaler, si tant est que ce ne soit pas carrément la socratique ciguë : entre la pluie drue d’impôts tous azimuts, la douche froide de la non-création de postes réclamés pourtant à cor et à cri par certains syndicats enseignants, l’introduction pour le moins chaotique de nouveaux rythmes scolaires ou la fameuse réforme des collèges, difficile pour le gouvernement de trouver grâce auprès d’un groupe qui a longtemps compté dans son électorat.

Dans ce contexte, les dénégations répétées de la ministre en charge du dossier n’ont absolument pas aidé à apaiser les tensions et peut-être la question du sujet répond-elle, en creux, aux allégations de « mensonges éhontés » qu’elle a proférées ces dernières semaines.

Par extension, ce courage se retrouve dans le traitement d’une question qui rappelle de façon lancinante l’état réel de la politique en France actuellement, où, précisément, tout lien avec la vérité semble avoir été perdu.

Et il n’est même pas besoin de rappeler la longue suite d’affaires scabreuses, financières ou phobico-administratives que la République aura endurées ces dernières années pour étayer le point en question, tant l’actualité nous envoie, telle une tarte à la crème béhachélesque, une réponse toute faite à la figure. D’ailleurs, nulle autre que Ségolène Royal ne pouvait espérer présenter ainsi une si magnifique exemplification de l’échappatoire politique à toute exigence de vérité.

Apparemment déjà bien remontée dans les tours suite à sa décision d’interdire le Roundup au premier janvier prochain (en réalité, une interdiction de sa vente libre en rayon pour une vente encadrée), Mamie Ségolène ne voulait pas s’arrêter là et s’est donc lancée dans une énième diatribe à l’encontre de Nutella, abominable création qui provoquerait, outre d’énormes bénéfices absolument pas compatibles avec la morale socialiste, des déforestations, de l’obésité mondialisée et une sensation pleine de noisette sur les tartines des petits et des grands, ce qui n’est pas le moindre des scandales (on en conviendra aisément).

Invitée au Petit journal de Canal+, la ministre socialiste évoquait benoîtement l’attrape-nigauds climatique de fin d’année, le COP 21, quand elle a décidé de flanquer quelques claques à la pâte à tartiner :

«Il faut replanter massivement des arbres parce qu’il y a eu une déforestation massive qui entraîne aussi du réchauffement climatique. Il faut arrêter de manger du Nutella par exemple parce que c’est l’huile de palme qui a remplacé les arbres. Et donc il y a eu des dégâts considérables. »

On passera très vite sur l’huile de palme qui remplace des arbres en supposant charitablement que notre ministre voulait dire en réalité qu’on a remplacé une forêt tropicale par des plantations de palmiers huiliers, de même qu’on ne s’attardera pas trop sur les exagérations concernant la déforestation, monnaie courante de nos jours.

En revanche, on pourra se demander ce qui a poussé la ministre à sortir une telle charge sur un produit qui, s’il a peut-être des défauts, demeure une production industrielle assez bien maîtrisée et plutôt respectueuse de l’environnement (huile de palme certifiée durable), et dont l’impact économique est particulièrement important : sa production bénéficie directement aux exploitants de palmiers dont plus de la moitié ne sont pas des multinationales, mais bien des petites entreprises familiales ; quant à la pâte elle-même, pour la France, elle est produite … en Seine-Maritime, à Villers-Ecalles, à 15 km de Rouen.

Autrement dit, les bêtises de Royal menacent directement la vie de dizaine de milliers de petits exploitants dans le monde (dont c’est la seule ressource) ainsi que les 330 salariés de Ferrero France à Villers-Ecalles qui sont probablement ravis de voir ainsi leur production clouée au pilori.

En outre, on se perd en conjecture sur la pertinence de rattacher encore une fois le réchauffement climatique sur cette attaque idiote contre un produit qui, si l’impact anthropique était significatif, n’y contribuerait de toute façon pas le moins du monde.

L’énormité de la déclaration ministérielle aidant, la polémique a pas mal enflé au point de déclencher un début de crise diplomatique. On se souvient que fin 2014, les idées aussi sottes que grenues de Sapin et Touraine, visant à stigmatiser l’huile de palme, avaient particulièrement agacé le gouvernement malaisien qui s’en était ouvert par écrit auprès du gouvernement français. Cette fois-ci, c’est l’Italie qui n’a pas goûté aux petites piques idiotes de la ministre française. À Rome, les autorités italiennes s’en sont indignées dans un tweet acide du ministre de l’écologie italien, Gian Luca Galletti, qui a violemment rembarré Mamie Ségolène :

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Gian Luca Galletti @glgalletti

Segolene Royal sconcertante: lasci stare i prodotti italiani. Stasera per cena... pane e #Nutella

19:30 - 16 Juin 2015


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« Que Ségolène Royal laisse les produits italiens tranquilles. Ce soir au menu : pain et Nutella »

Eh oui : en l’occurrence, la vérité, M’ame Royal, c’est que vos petites idées sur la déforestation sont grandement exagérées. Et ouvrir son bec pour sortir des âneries peut provoquer des effets très indésirables auprès d’individus qui ne vous ont rien fait et qui travaillent certainement bien plus dur que vous pour assurer leur existence.

Cependant, si d’habitude, il semble assez clair que la politique échappe à l’exigence de vérité, il en fut cette fois-ci autrement : puisqu’il était question de courage quelques paragraphes plus haut, reconnaissons-en même un peu à Ségolène qui aura fini par s’excuser devant la tempête provoquée, ce courage, ou, plus probablement ce petit éclair de lucidité étant d’autant plus à souligner qu’il manque cruellement à d’autres ministres.

Cette histoire de pâte-à-tartiner montre finalement que si la politique n’échappe pas toujours à l’exigence de vérité, elle échappe en tout cas de plus en plus à toute exigence de pertinence.

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