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  • : Le blog de Jean-Loup
  • : Engagé, depuis plusieurs décennies dans une démarche visant à lutter contre tous les processus d'exclusion, de discrimination et de ségrégation socio-urbaine, je suis persuadé que si nous voulons « construire » une société reposant sur un véritable Vivre Ensemble. Il nous faut savoir, donner du sens au sens, prendre le temps de la concertation et faire des propositions en adéquation avec les besoins de nos concitoyens.
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8 juin 2017 4 08 /06 /juin /2017 07:26
On doit reconnaître à Emmanuel Macron un mérite : celui de sortir la France d’une prison dans laquelle elle s’était enfermée depuis des décennies : un bipartisme dégénéré.

 

Jusqu’à présent, chaque échéance électorale nationale opposait deux groupes de rivaux bien identifiés qui se paraient avec complaisance de l’appellation de « partis politiques ».

En effet leur harmonie était très insuffisante tant sur le plan des programmes de gouvernement que pour leur hiérarchie interne, dans les débats préélectoraux ou après qu’ils ont accédé au pouvoir.

Malgré ces insuffisances, les campagnes électorales donnaient le change avec le concours de tous les médias, heureux d’orchestrer une dramaturgie assez spectaculaire pour attirer un public nombreux. Attrait au demeurant bien surprenant car l’issue du combat était presque toujours la même : le rival du Président sortant était élu.

PAS DE BÉNÉFICE DE LA RÉÉLECTION AU SUFFRAGE UNIVERSEL

Exceptionnellement, les électeurs réélurent le Président sortant mais c’était toujours après une cohabitation, pour déjuger le Premier ministre démissionnaire. Ce fut le cas en 1988 et en 2002.

Ainsi en définitive, aucune politique générale, aucun gouvernement, aucun leader n’a bénéficié depuis 1969 d’une réélection au suffrage universel ou d’une confirmation.

Ceci est la conséquence logique de la médiocrité des gouvernements qui se sont succédé et n’ont pas apporté la preuve de leur réussite. Mais on ne saurait s’en tenir à une conclusion aussi sommaire.

Ni les hommes politiques, ni les citoyens ne sont des imbéciles. Si nos politiques se sont laissés enfermer dans cette prison, c’est qu’ils y avaient intérêt. La situation de la France est en vérité bien banale.

LA FIN DU DUOPOLE ?

Les deux grands partis « de gouvernement » ont formé un duopole. Ils se sont succédé au pouvoir sans surprise. Au fond, s’ils rataient une élection, il fallait juste qu’ils conservent toutes les chances de gagner la suivante et de revenir au pouvoir pour profiter de la situation très gratifiante de l’exécutif dans la Vème République.

Au pire, ne pas manquer deux échéances successives. Donc, ne pas entreprendre de changements trop profonds, puisque leurs résultats ne seraient pas visibles avant la prochaine échéance.

Donc faire des mesures catégorielles, des réformes sociétales et de la communication, car c’est rapide et visible. Ce sont des marqueurs, comme on dit, mais quel rapport avec les graves maux dont souffre la France ? Aucun, souvent, mais c’était trop compliqué de s’attaquer à ces derniers. Les réformettes éloignent moins du pouvoir.

CONTRE LES PARTIS DEVENUS RENTIERS

Pire encore, mais moins apparent peut-être, les élus et, autour d’eux, ceux qui aspiraient à les aider ou à leur succéder dans chaque parti, ont adopté un comportement de rentier caractéristique de celui des mauvaises entreprises.

Celui où plaire au chef est plus important que de gagner de nouveaux clients. Puisque le fonds de commerce est assuré aujourd’hui ou dans cinq ans, ils ne remuent pas trop la barque. Les recettes apprises à l’ENA ou à Sciences Po font l’affaire. Ils attendent patiemment leur tour.

Le traitement que vient d’infliger Macron au Parti socialiste est donc un sacré coup de pied dans cette funeste fourmilière.

OUVERTURE À LA SOCIÉTÉ CIVILE

L’arrivée de candidats de la société civile (c’est-à-dire de citoyens qui ne sont pas aujourd’hui des politiciens professionnels) va – nous l’espérons – changer ces comportements de rentiers, puisque les nouveaux venus n’ont pas encore de rente à défendre.

Certes, il ne faut pas être trop optimiste. La recherche de rente étant inhérente à la nature humaine, la prison peut se reformer dans sa forme habituelle de duopole ou d’une autre manière, pire encore, par le monopole des grands corps pourvus par les meilleurs élèves de l’ENA, à commencer par celui des Inspecteurs des Finances.

Le Front national peut rendre ici un grand service en étant un acteur crédible. Mais ce serait un comble si la droite, en principe attachée à la liberté, faisait dans l’avenir moins bien que Macron en ne mobilisant pas pour les diverses élections les dizaines de milliers de simples citoyens réunis au sein du Conseil de la société civile animé par Pierre Danon, et coauteurs du projet de François Fillon  (a l'époque pas encore l'otage de Sens Commun). La droite peut, elle aussi, ébranler la prison. Pourquoi ne l’a-t-elle pas fait la première ?

 

La partie n’est donc pas terminée mais saluons la première étape et souhaitons que tous s’en inspirent pour consolider cette petite révolution.

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6 mai 2017 6 06 /05 /mai /2017 11:58
Jusqu’où Macron pourra-t-il renouveler les cadres de l’administration, tous protégés par leur statut ? Derrière les changements politiques apparents, les décisions de gestion continueront à être prises par un groupe d’hommes et de femmes immuables.

 

 

Dans un discours prononcé à Albi, Emmanuel Macron s’est fait l’apôtre du renouvellement des élites, sans le dire clairement d’ailleurs. Toute la question est aujourd’hui de savoir si cette ambition salutaire est tenable par une réforme « interne » au régime.

MACRON À ALBI, UN SYMBOLE ASSEZ CURIEUX

Il faut reconnaître au site de France 3 l’intelligence d’avoir replacé le déplacement d’Emmanuel Macron à Albi dans l’étrangeté de son contexte historique :

Symboliquement, Emmanuel Macron a visité la Verrerie Ouvrière d’Albi (VOA). Les ouvriers de l’entreprise avaient bénéficié du député Jaurès après la grande grève de 1895. Mais les temps ont bien changé : la VOA, ancienne société coopérative, a depuis… été rachétée par Verralia, un groupe lui-même détenu par un fonds de pension américain ! On est bien loin de Jaurès.

Macron, apôtre d’une France où les entreprises les plus anciennes sont contrôlées par des fonds de pension américains ? Le pari était vraiment étrange…

LE SUJET CENTRAL DU RENOUVELLEMENT DES ÉLITES

Durant le discours qu’il a prononcé à Albi, Emmanuel Macron a ensuite eu cette phrase tout à fait centrale dans l’œuvre qu’il devra conduire dès le mois de mai :

Ce ne sont pas les forces classiques de la vie politique française qui reconstruiront le pays. J’entends ceux qui voudraient que les partis reprennent leurs droits. Non, nous recomposerons jusqu’au bout, nous renouvellerons jusqu’au bout

Gouverner sans les forces classiques de la vie politique français, recomposer, renouveler « jusqu’au bout »: ces mots sont évidemment prometteurs et, pour tous ceux qui souhaitent que les cartes soient rebattues en profondeur en France, ils sonnent de façon heureuse.

Ils soulèvent toutefois deux questions. La première est de savoir quel degré de sincérité les porte, de la part d’un candidat qui aime communiquer, mais qu’on est loin d’avoir vu à l’œuvre. La seconde est de savoir dans quelle mesure les institutions rendront possible ce renouvellement des élites.

SUR LA SINCÉRITÉ DU PRÉSIDENT MACRON

Premier sujet : dans quelle mesure Emmanuel Macron est-il véritablement porteur de cette volonté de renouvellement ? Chacun, à commencer par lui-même bien entendu, aura son opinion sur le sujet. En l’état, et en lui faisant par bienveillance le crédit préalable d’une sincérité intacte, il est néanmoins confronté au problème éternel de la rénovation démocratique : comment s’appuyer sur des gens nouveaux sans hérisser le poil de ceux qui sont aux manettes ? Et comment enjamber les « insiders » du pouvoir pour les remplacer par des nouveaux ?

C’est pourquoi l’ambition d’un renouvellement des élites « jusqu’au bout » connaît déjà de sérieux tempéraments. Le secrétaire général du mouvement, Richard Ferrand, est député socialiste (proche des frondeurs, d’ailleurs). Macron a intégré Bayrou dans son équipe, qui n’est ni un perdreau de l’année, ni un grand consommateur de renouvellement, sans quoi il aurait disparu depuis longtemps.

Ces concessions faites à l’écosystème de la Vè République montrent bien la difficulté à laquelle Emmanuel Macron va se heurter. On imagine déjà qu’elle a dû grandir rapidement depuis le premier tour, et que les bureaux de son cabinet doivent être recouverts de CV prestigieux envoyés illico par des candidats aux fonctions les plus alléchantes de la République (on retiendra comme face émergée de l’iceberg les dépôts de candidature à Matignon par voie de presse : Laurence Parisot, Christiane Taubira, Jean-Louis Borloo, Xavier Bertrand, notamment).

SUR LA CAPACITÉ D’UN RÉGIME FRANÇAIS À SE RÉNOVER DE L’INTÉRIEUR

En même temps qu’Emmanuel Macron devra résoudre la difficile équation de l’exercice du pouvoir avec des gens nouveaux, donc inconnus et peu aguerris, il devra surmonter l’autre difficulté : la capacité des institutions françaises en général, et singulièrement celles de la Vè République, à tolérer et permettre des renouvellements de ce type.

Sur ce point, Emmanuel Macron devra en faire l’expérience dès le mois de juin, avec les élections législatives. Renouveler jusqu’au bout signifie qu’il refuserait d’investir des élus de l’actuelle Assemblée comme candidats d’En Marche. Mais alors… 577 candidats totalement inconnus (dans leur immense majorité) qui commenceront à faire campagne le 8 mai pour des élections qui auront lieu six semaines plus tard, ça risque quand même d’être un peu court pour monter une mayonnaise et obtenir une majorité de gouvernement à l’Assemblée.

Là encore, le bon sens est que Macron fasse ce qu’il a discrètement commencé à faire : accepter des élus actuels comme candidats, à condition qu’ils concourent officiellement sous la bannière d’En Marche. Mais, dans ce cas, le candidat renonce à sa promesse de « renouvellement jusqu’au bout », et reprend les vieux produits en changeant seulement l’emballage.

C’est toute la difficulté d’un changement par l’intérieur.

LA QUESTION DE LA TECHNOSTRUCTURE

Reste un problème qu’Emmanuel Macron ne pourra contourner : les élites en France ne sont que marginalement politiques. Elles sont et demeurent majoritairement administratives. C’est ce qu’on appelle la technocratie. Macron s’est (et c’est un bien) prononcé pour un spoil system à la française, qui reste quand même très en-deçà du spoil system américain. Aucun haut fonctionnaire français ne terminera son parcours chez Pôle Emploi. Il sera juste reclassé dans un corps d’inspection à 10.000€ par mois, voire plus.

Mais jusqu’où Macron pourra-t-il renouveler les cadres de l’administration, tous protégés par leur statut ? En réalité, derrière les changements politiques apparents, les décisions de gestion, au jour le jour, continueront à être prises par un groupe d’hommes et de femmes qui demeureront immuables.

Et là, nous touchons probablement au problème le plus compliqué à résoudre, à périmètre égal d’intervention de l’État, pour un Président qui veut renouveler « jusqu’au bout ».

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6 mai 2017 6 06 /05 /mai /2017 09:30
Quand…le prochain président devra engager deux réformes urgentes

 

Le prochain président devra absolument se pencher sur deux secteurs en crise, l’éducation et l’agriculture, qui doivent être modernisées et libérées des contraintes réglementaires.

 

Changer de président et de parlement devrait faciliter les réformes. On peut toujours rêver. En voici deux qui sont urgentes.

ENSEIGNEMENT

Nos enseignants sont moins bien payés qu’ailleurs, notamment au Royaume-Uni et en Allemagne, et nos résultats sont moins bons. La France a encore perdu deux places dans le dernier classement PISA de l’OCDE et n’est qu’au 25e rang de cette enquête évaluant les performances des élèves de 15 ans.

Pourtant nous dépensons plus, et de plus en plus. En 2017, le budget de l’enseignement augmente encore de 3 milliards d’euros, alors qu’il est en baisse pour les autres ministères, notamment la Défense.

En fait, ce n’est pas de dépenses supplémentaires dont nous avons besoin en matière d’éducation, mais de réforme. C’est ce qu’a compris une jeune normalienne et énarque, Anne Coffinier qui, plutôt que de devenir ambassadrice de France comme elle le pouvait, a préféré lancer, en 2004, l’association Créer son école, à l’origine de 700 écoles libres hors contrat et d’un Institut libre de formation des maîtres. 93 écoles indépendantes supplémentaires ont ouvert en septembre 2016, soit une croissance annuelle de 12%.

AIDE AUX QUARTIERS DÉFAVORISÉS

Ces établissements se créent même au cœur des quartiers défavorisés. Le Figaro vient d’établir un palmarès des lycées hors contrat à partir des résultats du bac 2016. Les résultats y sont bien meilleurs que dans le secteur public.

Selon la Fondation iFRAP il y a 34,5 milliards d’euros de surcoût de production annuel de l’enseignement public par rapport à l’enseignement privé sous contrat. Quand les Français comprendront-ils que le communisme marche moins bien que la libre entreprise, même en matière d’éducation ?

Environ quatorze millions d’élèves sont scolarisés en France, largement aux frais de l’État, des collectivités territoriales et des caisses d’allocations familiales. La dépense moyenne par élève et par an est de 6.010 euros dans le premier degré (maternelle et élémentaire), 8.410 euros par collégien, 11.310 euros par lycéen général et technologique et 11.960 euros par lycéen professionnel, soit un coût moyen de plus de huit mille euros par élève et par an.

SUCCÈS DES ÉCOLES INDÉPENDANTES

Les parents qui mettent actuellement leurs enfants dans des écoles indépendantes ont de meilleurs résultats et pour moins cher. Ils font faire une substantielle économie à l’État, et donc au contribuable.

C’est en effet plus de huit mille euros que ceux qui scolarisent leur enfant dans des collèges indépendants font économiser chaque année à l’État. Il serait naturel qu’on rende à ces familles une partie au moins de la somme qu’elles font économiser à la collectivité, à l’instar de ce qui se fait pour les gardes d’enfants.

BONS D’ÉDUCATION

Cette ristourne pourrait prendre la forme d’un chèque que l’on pourrait appeler bon d’éducation, titre non échangeable, encaissable uniquement par une école. Chaque famille recevrait ainsi en début d’année un bon pour payer la scolarité de son enfant dans l’établissement de son choix.

Ce système existe déjà dans plusieurs pays, notamment aux États-Unis, aux Pays-Bas et en Suède. Dans ce dernier pays les parents reçoivent un chèque d’une valeur moyenne de 8500 euros par enfant, et ils choisissent massivement les écoles privées, au point que l’enseignement public risque de disparaître.

Supposons que les pouvoirs publics : État, collectivités publiques et caisses d’allocations familiales, donnent à chaque famille un bon d’une valeur de cinq mille euros pour un écolier du primaire, huit mille pour un élève du secondaire, et dix mille pour un étudiant.

RENDRE L’ÉCOLE EFFICACE

Le coût, pour la collectivité, serait à peu près le même qu’actuellement ; mais le but de l’opération serait moins de réduire la dépense globale, que de la rendre efficace et performante, grâce à la concurrence, qui permettrait un bien meilleur rendement du système éducatif.

Ce qui permettrait d’introduire dans les établissements scolaires la plus grande autonomie de gestion réclamée, non seulement par les proviseurs, mais aussi par beaucoup de professeurs. Ceux-ci souffrent en effet de la rigidité des règles qui les encadrent, qui les empêchent de s’adapter à un environnement et à des élèves de plus en plus divers.

Avec le bon d’éducation, l’État cesserait d’être le gestionnaire inefficace d’un système inadapté. Son intervention se bornerait à garantir un niveau minimum. Cela permettrait de supprimer les contraintes de la sectorisation, en rendant aux parents le libre choix de l’école, qui est un droit fondamental dans les pays libres.

LA FIN DU MONOPOLE DE L’ÉDUCATION

Ils pourraient, ainsi, faire jouer la concurrence dans un secteur actuellement monopolistique, où règne gabegie et irresponsabilité, comme dans tout monopole.

Faire éclater le carcan bureaucratique qui étouffe initiative et créativité chez les enseignants, donnerait à notre système éducatif la chance de pouvoir jouer un rôle moteur dans le libre espace européen de l’éducation qui est en train de se mettre en place.

Les bons d’éducation, donnés aux parents et aux étudiants, ne seraient évidemment pas revendables. Ils ne pourraient qu’être remis en paiement à un établissement d’enseignement reconnu et agréé.

L’instauration d’un tel système pourrait se faire progressivement, en commençant par des expérimentations volontaires dans certaines régions. Il n’y aurait pas de difficultés pour les écoles privées.

Pour ce qui est du secteur public, on pourrait donner à chaque établissement le choix entre lestatu quo et le changement, choix exercé démocratiquement, établissement par établissement, par un vote des enseignants.

AUX PROFESSEURS DE DÉCIDER

Il est évident que c’est aux enseignants de décider. Il ne faut pas refaire l’erreur consistant à faire élire les présidents d’université par une majorité de non enseignants.

Ces présidents sont contestés, car élus par un collège où ce ne sont pas les voix des professeurs qui sont prépondérantes, mais celles des personnels administratifs et des étudiants.

Sous cette réserve, chaque établissement devrait pouvoir décider en toute liberté, soit de ne rien changer, si c’est le vœu majoritaire, soit de créer une structure nouvelle, entreprise commerciale, coopérative, mutuelle, association, peu importe la forme juridique.

Champ libre serait ainsi donné à l’innovation et à l’imagination, à la seule condition de la transparence financière, contrôlée par les chambres régionales des comptes.

PLUS D’AUTONOMIE POUR LES ÉTABLISSEMENTS

Les établissements ayant opté démocratiquement pour rester dans le secteur public, retourneraient à l’État les bons reçus en paiement de la scolarité. Les chefs d’établissement auraient la plus large liberté de gestion, tout en continuant, comme leur personnel, à être payés par l’État et à faire carrière dans la fonction publique, sans donc perdre leur statut privilégié actuel.

Chaque établissement aurait simplement l’obligation de faire un bilan annuel, ainsi qu’un compte de profits et pertes, comptabilité virtuelle, mais indispensable pour connaître les coûts véritables.

Les établissements bénéficiaires, c’est-à-dire ceux où le coût pour la collectivité serait inférieur à la valeur globale des bons reçus, seraient récompensés par une participation aux bénéfices, permettant de distribuer des primes au personnel.

LA REVALORISATION DU MÉRITE

Les établissements déficitaires, où le total des bons d’éducation reçus serait inférieur aux dépenses engagées, se verraient pénalisés par une réduction proportionnelle de leurs crédits.

Les salaires statutaires des personnels y seraient maintenus, mais les structures durablement déficitaires devraient être fermées, par exemple après trois années consécutives de pertes, et leur personnel serait alors transféré vers les établissements bénéficiaires ayant besoin de se développer pour faire face à une demande accrue.

Les établissements publics ayant choisi le secteur concurrentiel pourraient s’organiser en toute indépendance ; sous réserve d’inspections, tout comme les établissements privés actuels ; mais le véritable pouvoir de contrôle appartiendrait en dernier ressort aux parents et aux étudiants.

EVALUER LES PERFORMANCES DES ÉTABLISSEMENTS

Consommateurs d’éducation, ils seraient les ordonnateurs du système, les véritables décideurs, par le simple fait qu’ils apportent, en toute liberté, leurs bons d’éducation aux établissements qu’ils jugent les meilleurs et les plus performants.

Comme cela s’est déjà produit au moment de la privatisation d’autres établissements publics, il pourrait y avoir des surprises, car rien n’est jamais joué d’avance.

Il n’est même pas sûr que la part des écoles privées augmenterait globalement, car les établissements réalisant des bénéfices seraient sans aucun doute choyés par les pouvoirs publics qui auraient intérêt à leur donner les moyens de grandir, de manière à économiser les fonds publics.

UN MEILLEUR SERVICE PUBLIC DE L’ENSEIGNEMENT

Il n’est pas exclu que, réveillé par la concurrence et motivé par l’autonomie, un grand service public de l’enseignement finalement prospère à tous les niveaux. Les droits acquis des personnels en fonction seraient préservés, mais les conditions d’emploi et de salaires des nouveaux recrutés seraient négociées par chaque établissement qui choisirait librement ses professeurs dans les universités devenues, elles aussi, autonomes.

Sans aucun doute, les meilleurs professeurs et chefs d’établissement verraient leurs salaires dépasser largement les plafonds actuels de la fonction publique.

(A suivre)

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6 mai 2017 6 06 /05 /mai /2017 07:41
Il ne sert à rien de vouloir « sauver » un peuple de l’immigration s’il n’existe plus. Comme dans toute action humaine il y a des risques à prendre, mais il y a aussi la certitude d’échouer si l’on se ferme.

 

On dit aux Français, aux Allemands et à bien d’autres : « votez pour moi sinon vous serez remplacés dans votre propre pays par des Barbares ». En France, Le Pen parle de « l’invasion » ou de « la déferlante ». C’est le fantasme du grand remplacement, une grave erreur car on tuerait la France sous prétexte de sauver son peuple. À moins que ce ne soit une simple arnaque électorale.

Un « remplacement par des Barbares » ? Certes, on ne le dit pas directement, législation française oblige. On évoque « des mœurs, des coutumes, le respect dû aux femmes, les conquérants qui nous assiègent » ou « nous serons étrangers sur notre propre sol ».

L’auditoire comprend parfaitement et lance des huées à chaque allusion. Le discours du Front National a été analysé par de multiples chercheurs, dont les conclusions sont résumées par l’historien Pierre Nora : « avec nous ou la mort ».

LE FANTASME DU « GRAND REMPLACEMENT »

Il y a aujourd’hui 66 millions d’habitants en France, dont autour de 5 millions originaires de pays musulmans, « deuxième génération » comprise, et non 10 à 15 comme l’affirment des rumeurs insistantes.

Certes, il n’y a pas de statistiques ethniques, mais une masse d’études et de sondages confirment ce chiffre. Un éventuel remplacement supposerait donc des mouvements (naissances, décès, immigration, émigration) dont le solde serait d’un grand nombre de dizaines de millions de personnes.

IDÉOLOGIE INVRAISEMBLABLE

Est-ce vraisemblable ? Concernant les naissances et décès, la différence avec le reste de la population est trop faible pour avoir un effet massif avant un, voire plusieurs siècles car il ne s’agit que d’une fraction d’enfants par femme (0,4 ?).

Rappelons que les plus féconds sont les Subsahariens, chrétiens ou musulmans, et non les Maghrébins ou les Turcs, qui viennent d’ailleurs de pays très moyennement féconds (2 à 3 enfants par femme).

Même fantasme pour les quelques milliers de polygames « couverts d’enfants » : ce qui détermine le futur, c’est le nombre d’enfants par femme et non par homme.

Mais, dira-t-on, il y aura l’immigration future, actuellement d’environ 200 000 par an. Certes, mais dans cette immigration il y a de tout, musulmans ou non, dont de plus en plus de personnes qualifiées et de femmes seules, dont beaucoup viennent chez nous pour échapper aux « coutumes » locales.

LOIN DU REMPLACEMENT

Il y a aussi 70 000 étudiants venant du monde entier, dont la plupart reviendront au pays, voire, de plus en plus souvent, nous quitteront pour aller en Grande Bretagne et aux Amériques.

Donc pas de calcul précis possible, mais remarquons qu’il faut 100 ans pour que 100 000 arrivées annuelles de supposés « remplaçants » totalisent 10 millions d’individus, et nous seront toujours loin du remplacement.

Remarquons au passage que l’immigration clandestine, très visible à certains endroits, ne change pas le calcul car elle est intégrée à l’officielle au fil des régularisations ou se termine par des retours : on ne reste pas clandestin toute sa vie, du moins en quantité significative.

ÉVITER L’ÉMIGRATION

Mais dira-t-on, des Français émigrent, ce qui précipite le remplacement. Oui, mais le même calcul montre qu’il resterait néanmoins très lointain. Et surtout, cette émigration est la conséquence de nos erreurs économiques : votons pour un candidat qui les évitera !

Voyons maintenant qui sont ces 5 millions de résidents « d’origine musulmane ». Ils sont très fractionnés en « nationalités » rivales (Marocains/Algériens, Turcs/Arabes/Subsahariens, Iraniens et Libanais chiites/sunnites etc. ), en comportements religieux (pieux, non pratiquants, athées et même chrétiens… ) et en sentiment national : fidèles au pays d’origine, patriotes français, comme les « Fils de France », « internationalistes » djihadistes, très remarqués mais peu nombreux. On est donc très loin d’un bloc.

DES REMPLAÇANTS QUI FONT PEUR ?

Finalement, qui sont ces « remplaçants » qui vous font peur ? Notre collègue informaticien ? La réponse est hésitante : « pas forcément, je parle de ceux qui ne sont pas intégrés, les banlieues, quoi, les assistés… vous voyez ce que je veux dire ». Très bien. Il y a effectivement un problème important, mais qui concerne beaucoup moins de monde.

Combien ? Je vous passe les détails et l’incertitude sur les chiffres, mais quelques centaines de milliers me semblent être un grand maximum. C’est beaucoup, mais pas de quoi remplacer 65 millions de personnes ! Rappelons-nous qu’en 1972 (oui 1972 !), le slogan du parti d’extrême droite était : « Avec nous, avant qu’il ne soit trop tard. »

Et si c’était l’inverse : s’ouvrir avant qu’il ne soit trop tard ?

L’IMMIGRATION EST VITALE MALGRÉ SES INCONVÉNIENTS

Pourquoi ? Parce que tout adulte de 60 ans sera retraité 10 ans plus tard, et en état de faiblesse dans les 15 années qui suivent. De même tout enfant non né en 2017 ne sera jamais un adulte. Tout trou dans la pyramide des âges est définitif, sauf immigration.

La question des retraites a mis en évidence le vieillissement de population, mais en se limitant trop souvent à l’aspect financier (cotisations/pensions). Or le vieillissement, c’est bien plus que les retraites : c’est l’extinction dans la misère ou la servitude.

Pourquoi ? Parce qu’il suffit d’environ 40 ans de faible fécondité pour que le mécanisme de disparition d’un peuple se mette en place, car le nombre de femmes pouvant être mères se met à diminuer.

LE PROBLÈME DE LA FÉCONDITÉ

Corrélativement il faut 40 ans pour relancer la machine, et les pays qui essaient de le faire (Chine, Allemagne) ont échoué pour l’instant à faire remonter significativement la fécondité.

Le Japon est le grand pays dans lequel le processus de disparition est le plus avancé, et l’Allemagne le serait sans sa politique d’immigration massive qui dure maintenant depuis 70 ans, donc indépendamment de la « crise syrienne ». Remarquons que cette immigration n’a pas gêné son développement économique, bien au contraire. Idem pour les États-Unis.

Or les conséquences du déclin démographique sont dramatiques car il ne reste que des vieux. Soit ils se coupent du reste du monde et ils crèvent de faim ou de misères physiques, soit ils acceptent alors l’aide de jeunes immigrants qu’ils sont alors trop vieux pour encadrer et contrôler.

LE DÉCLIN DÉMOGRAPHIQUE

Il aurait fallu les faire entrer 40 ans plus tôt quand les institutions étaient encore en place et tenues par suffisamment de « nationaux ». C’est encore aujourd’hui le cas de la France, et déjà moins nettement celui de l’Allemagne.

Cette dernière essaie de « compenser » son infériorité démographique par une vigoureuse politique d’intégration. Bref, il vaut mieux une immigration importante maintenant, que plus tard ou jamais.

Que cette immigration pose de graves problèmes, nous sommes tous d’accord. Mais il faut penser à l’alternative. Cela va bien au-delà des questions d’économie, de port du foulard et du menu des cantines.

FAUSSE PERSPECTIVE SUR LE TERRORISME

Et même au-delà du terrorisme qui frappe à juste titre l’opinion publique, mais qui reste extrêmement faible car il n’a pas de support dans la masse des musulmans français : une vingtaine d’acteurs d’attentats meurtriers en 2016 et quelques dizaines pour ceux qui ont échoué.

Et le vieillissement est d’autant plus dangereux que le début est insidieux : moins d’enfants, donc moins de charges. J’ai été particulièrement scandalisé par un haut fonctionnaire de Bruxelles qui déclarait « nous entretiendrons les vieux avec l’argent économisé sur les jeunes », oubliant qu’il s’agit d’êtres humains et non d’argent !

En conclusion, il ne sert à rien de vouloir « sauver » un peuple de l’immigration s’il n’existe plus. Comme dans toute action humaine il y a des risques à prendre, mais il y a aussi la certitude d’échouer si l’on se ferme. Mais il est plus simple de faire peur si on veut être élu !

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25 avril 2017 2 25 /04 /avril /2017 19:37

Pardon pour cette platitude mais le succès d’Emmanuel Macron c’est avant tout l’expression d’un désir de renouvellement de notre classe politique. Je ne crois pas, si vous me permettez cette hypothèse personnelle, que la plupart de ses électeurs aient voté pour son programme et je suis même convaincu que très peu l’ont lu.

Emmanuel Macron est avant tout l’incarnation de ce que nombre de nos concitoyens attendent : une nouvelle tête — un candidat dont les débuts en politiques n’ont pas été photographiés en noir et blanc— et, à tort ou à raison, une rupture avec le système politique hérité de la Libération.

Et c’est précisément ça qui a, je crois, tué la candidature de François Fillon. Face à Nicolas Sarkozy et Alain Juppé, lors de la primaire, il pouvait aisément passer pour le candidat du renouvellement de la droite et ce, d’autant plus qu’il tenait à l’époque un discours très libéral au regard de ce à quoi nous sommes habitués de la part des Républicains.

FILLON ET LE « SYSTÈME »

Seulement voilà : non seulement son discours s’est nettement normalisé dès sa désignation mais le flux incessant d’affaires le concernant n’a que trop rappelé aux électeurs ce « système » dont, justement, ils ne veulent plus.

Alors oui, sans doute y a-t-il dans la candidature d’Emmanuel Macron une dimension opportuniste : il a senti l’air du temps, il a tenté sa chance et ça a marché.

Vous pouvez le lui reprocher mais n’oubliez pas, toutefois, que c’est exactement ce qu’a fait François Fillon aux primaires de la droite, que Jean-Luc Mélenchon a suivi exactement le même plan d’action4 et que Marine Le Pen, en bonne héritière du business paternel, n’a pas eu à se donner cette peine. C’est ainsi : la politique est une affaire de marketing et il faut être d’une naïveté confondante pour y voir l’expression des convictions sincères des candidats.

LA FIN D’UNE ÈRE ?

S’il ne faut pas, dit l’adage, vendre la peau de l’ours avant de l’avoir tué, on est tout de même tenté de parier sur une fin prochaine des grands appareils politiques du XXème siècle — la SFIO et le RPF.

Si ce dernier pourrait encore se relever de la défaite de François Fillon au prix d’un aggiornamento spectaculaire — en clair : en renouvelant ses têtes de files et en cessant, une bonne fois pour toutes, de faire le grand écart entre son centre gaulliste et ses ailes conservatrices et nationalistes — le futur du Parti dit Socialiste semble bien sombre.

Beaucoup de commentateurs — souvent à droite — ont vu dans l’émergence d’En marche une stratégie géniale orchestrée par les éléphants du PS ou par François Hollande lui-même.

MACRON UN NOUVEAU HOLLANDE ?

L’idée, en substance, est que l’aile centriste du PS aurait délibérément abandonné le parti aux « frondeurs » pour mieux renaître, blancs comme neige, dans la formation d’Emmanuel Macron tandis que Benoît Hamon se partagerait le vote de la gauche de la gauche avec Mélenchon et quelques autres comiques troupiers. Je suis pour le moins dubitatif. De fait, personne n’a abandonné quoi que ce soit : Benoît Hamon a simplement remporté la primaire de gauche face à Manuel Valls.

Devinant probablement ce qu’il adviendrait de la candidature de Benoît Hamon, Emmanuel Macron s’est engouffré dans la brèche ; récupérant ainsi les suffrages de l’aile modéré du PS, d’une bonne partie du centre et même du centre-droit.

On peut bien sûr imaginer que les éléphants et même François Hollande l’aient encouragé en ce sens mais de là à présenter Macron comme un simple pion il y a un gouffre. À titre personnel, je pense que le fondateur d’En marche a réussi une OPA magistrale sur tout le centre gauche et que c’est une grave erreur de le sous-estimer.

Or, c’est une excellente nouvelle. Ça signifie que le paysage est désormais entièrement recomposé : les scories de la vielle aile gauche marxisante — principalement Mélenchon et ce qui reste du PS — font désormais leurs vies seules dans leur coin et qu’une gauche moderne (en espérant que ce ne soit pas la même quun parti qui a oublié son congrès fondateur de Suresnes) et potentiellement libérale est en train de voir le jour en France.

Enfin ! Avec un peu de chance et encore une fois si je ne me trompe pas En marche pourrait devenir notre New Labour et Macron, un véritable Tony Blair à la française. En soi c’est un motif de réjouissances.

LA STRATÉGIE DE L’IMMOBILISME

J’ai entendu plusieurs fois, depuis deux jours, des déçus du clan Fillon déclarer qu’ils voteraient le Pen au second tour. Leur stratégie, en substance, semble se fonder sur l’idée selon laquelle l’héritière de Saint Cloud n’aura aucune majorité parlementaire sur laquelle s’appuyer ce qui, selon eux, la forcera à l’immobilisme pendant 5 ans. C’est, à mon sens, de la folie pure et simple.

Qu’Emmanuel Macron ne soit pas un grand libéral, j’en conviens volontiers. Reste qu’il l’est nettement plus que le Parti Socialiste et même que les Républicains. J’entends bien vos commentaires sur le programme de Fillon que vous jugez meilleur mais, d’une part, j’ai quelques doutes sur la conversion tardive de votre candidat favori et, par ailleurs, il est désormais éliminé.

UN CANDIDAT DE CENTRE-GAUCHE RAISONNABLE

Le choix qui s’offre à nous, aujourd’hui, c’est un candidat de centre-gauche somme toute tout à fait raisonnable et une Marine Le Pen qui non seulement pourrait bien trouver suffisamment de soutiens pour mettre une partie de son programme délirant à exécution mais dont la seule élection suffirait à mettre le pays à feu et à sang.

Ne jouez pas, je vous en conjure, avec le feu et ce d’autant plus que les scores de Marine le Pen et de Jean-Luc Mélenchon ne sont pas, contrairement à ce que j’ai lu, le produit de la seule présidence de François Hollande mais celui de quatre décennies d’immobilisme, de reproduction endogame de l’élite politique et de compromis clientélistes.

De gauche, comme de droite. Une cohabitation — à supposer qu’elle ait lieu — avec Marine le Pen à la présidence, c’est la dernière chose dont nous ayons besoin : des deux candidats en lice, le seul à être capable de rassembler au-delà de son parti et de faire, comme on dit, bouger les lignes, c’est Macron.

Je vais donc voter pour Emmanuel Macron sans la moindre hésitation. Je vais le faire non pas parce que je crois en lui mais parce que dans l’alternative qui nous est offerte, c’est — et de très loin — la meilleure option.

Une chance, fût-elle infime, c’est toujours mieux qu’aucun espoir. Ma ligne de conduite sera celle de Frédéric Bastiat en son temps : peu importe qu’une politique soit labellisée de gauche ou de droite ; je soutiendrai les bonnes et m’opposerai aux mauvaises

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12 avril 2017 3 12 /04 /avril /2017 07:33

Les déboires judiciaires de François Fillon feront-ils enfin prendre conscience aux politiciens qu’il est judicieux de doter la France d’un véritable pouvoir judiciaire indépendant, car c’est parfois bien utile, quand on est dans l’opposition ?

 

Je m’empresse de préciser, à l’attention des suppôts de Fillon très actifs en ce moment sur le Net, que mon propos revêt un caractère général et que je l’illustre par la situation de leur champion seulement parce qu’il constitue un excellent révélateur de la nécessité réformer l’articulation des pouvoirs. Singulièrement d’organiser enfin l’indépendance des parquetiers.

FRANÇOIS FILLON VICTIME DE LA SOUMISSION DU PARQUET AU POLITIQUE

Depuis le 24 janvier dernier et les premières révélations par la presse du financement singulier de la PME Fillon ayant conduit à l’enquête du PNF puis à la saisie de trois juges d’instruction, François Fillon, par ailleurs incontestable « fashion victim », n’a eu de cesse de reconnaître ses « erreurs » passées (employer femme et enfants à prix d’or sur fonds publics, accepter des « cadeaux », des « prêts sans intérêts » fort tardivement remboursés), sans jamais tirer les conséquences pratiques de ses actes de contritions cathodiques. Parallèlement, François Fillon se déclare victime d’une « tentative d’assassinat politique », puis d’un « coup d’Etat institutionnel venu de la gauche ». Bref d’une justice partiale.

 

Force est de constater que lorsque, à l’inverse, François Fillon ambitionne de faire perdre le sommeil à tous ceux qui étaient à l’origine de la révélation de son mode de vie sardanapalesque, en se fondant sur quelques lignes d’un livre, Bienvenue Place Beauvau, le PNF s’empresse de refuser de se saisir. « Les affirmations du livre sont trop imprécises et manquent trop d’étai pour pouvoir justifier l’ouverture d’une enquête préliminaire », explique le procureur national financier, Éliane Houlette.

François Fillon découvre empiriquement qu’il n’est pas sain que le parquet ne soit pas indépendant du pouvoir politique.

FRANÇOIS FILLON BÉNÉFICIAIRE AUSSI DE LA SOUMISSION DU PARQUET AU POLITIQUE

Dans la famille Fillon, on aime les belles caisses. Papa craque littéralement pour les Ferrari– prêtée par de riches mécènes de son temps libre-, plus modeste, fifils se contente de jouer avec le 4×4 Toyota de papa. Le 9 mai 2009 sur la rocade de Rennes Fillon fils frôle un scooter et oblige sa conductrice à mordre le bas-côté pour éviter le choc. Le fils Fillon refuse de s’arrêter et gratifie la jeune femme d’un élégant doigt d’honneur.

Après la plainte déposée par Guylène G. aide-ménagère et mère de trois enfants qui s’est vue poussée par jeu et a cru “sa dernière heure arrivée”, le chauffard a été vite identifié. Et l’enquête encore plus vite classée.

Envoyé devant le délégué du procureur qui prononce un simple “rappel à la loi”, Fillon fils « accepte de payer le coffre à bagages du scooter endommagé, même s’il n’a pas le sentiment de l’avoir abîmé, et veut bien réfléchir à une indemnisation ». Et de préciser que “sa réponse parviendra sous huitaine avec ou sans chèque”.

Finalement, le fils Fillon bien élevé a envoyé une lettre à la victime. Il regrette de lui avoir fait peur, mais refuse le principe même d’une indemnisation car il y a eu dans les médias une utilisation de l’incident “qui n’est pas acceptable”. « Pour l’heure, le procureur de Rennes n’a rien trouvé à y redire, souligne le Canard ». En 2009, François Fillon était Premier ministre.

FRANÇOIS FILLON FAVORABLE À LA SOUMISSION DU PARQUET AU POLITIQUE

François Fillon candidat à l’élection présidentielle de 2017, s’était initialement déclaré en faveur d’une « justice indépendante ». Il prônait notamment « l’impartialité et l’indépendance des juges du siège », « une plus grande autonomie du parquet ». Il suggérait de « nommer les magistrats du parquet sur proposition du gouvernement avec avis conforme du CSM », ce qui a été la pratique constante des gardes des Sceaux du quinquennat Hollande.

Mais, si le candidat Fillon plaidait pour « une plus grande autonomie du parquet », il exposait dans le même temps qu’il faut « répondre en même temps à l’exigence de maintien d’un lien organique avec le pouvoir exécutif issu du jeu démocratique pour s’assurer que la volonté du peuple en matière de justice pénale soit appliquée et respectée ». C’est parfois bien pratique en effet un parquet qui devance les desideratas- exprimés ou implicites- du pouvoir du moment.

Nul ne peut évidemment se réjouir que les ennuis judiciaires du candidat « de la droite républicaine » contraigne aujourd’hui son épouse, Penelope, à devoir mettre son réveil à l’heure où la France qui travaille se lève. Toutefois, il est bon que, de temps en temps, un politicien de carrière, devenu « hors sol », car il a cessé de partager le sort des Français, touche du doigt la réalité de ses concitoyens. Pour rappel, François Fillon, à 63 ans, est élu depuis 35, « en politique » depuis 42, selon les calculs de Philippe Pascot (Allez (presque tous) vous faire…, p. 129).

Désormais, les justiciables du quotidien, dont le sort indiffère au plus haut point les hommes politiques, ne peuvent qu’espérer que les tribulations judiciaires de François Fillon feront enfin prendre conscience à l’ensemble du personnel politique (nos chères édiles) qu’il est judicieux de doter la France d’un véritable pouvoir judiciaire et d’un parquet indépendant, car c’est parfois bien utile, quand on est dans l’opposition.

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11 avril 2017 2 11 /04 /avril /2017 20:41
Un essai de sociologie électorale qui vous réserve des surprises sur les principaux critères qui expliquent le vote Front National en France.

 

QUELS SONT LES TERRITOIRES EN DIFFICULTÉ SOCIALE ?

Dans les villes, même les plus pauvres peuvent espérer rencontrer une opportunité qui les tirera de la misère. Du coup, le vote FN y est moins important.La carte des difficultés sociales de la France en 2013 montre qu’elles présentent de grandes similitudes géographiques. Ce sont à peu près les mêmes territoires où sévit le chômage, où les jeunes n’ont pas de diplômes, où la pauvreté est la plus élevée et où les familles monoparentales sont les plus nombreuses. Nul hasard à cela car ces problèmes font système en se renforçant les uns les autres : les jeunes sans diplôme risquent le chômage beaucoup plus que les autres, les chômeurs sont plus pauvres que la moyenne, le chômage est un ferment de dissolution des liens sociaux, en particulier des liens familiaux, ce qui entraîne des ruptures et donc la multiplication des familles monoparentales, dont 35 % sont au-dessous du seuil de pauvreté. En cherchant à venir à bout de l’une de ces difficultés, on rencontre inévitablement les autres.

 

ANGOISSE SOCIALE ET VOTE FRONT NATIONAL : UN ESPACE EN COMMUN MAIS PAS D’AUTOMATISMES

 

Les difficultés sociales vont souvent ensemble. On peut construire la carte d’un indice à partir des taux de chômage, pauvreté, jeunes sans diplôme et familles monoparentales, en donnant le même poids à chacun d’eux. Elle montre les zones les plus en difficultés : un grand Nord-est, une large bordure méditerranéenne et la vallée de la Garonne entre Bordeaux et Toulouse. Inversement, le grand Ouest, une partie du sud-ouest et le Massif Central connaissent moins de problèmes.

Cette géographie est assez proche de celle des suffrages obtenus par le Front national aux diverses élections depuis 1984. Il serait cependant inexact d’en déduire que ce vote est celui des pauvres et des laissés pour compte. Ces derniers s’abstiennent le plus souvent. On doit plutôt constater que c’est le vote des régions pauvres, celles où beaucoup craignent les accidents de la vie car ils voient leurs proches atteints par eux.

 

LES GRANDES VILLES MOINS ENCLINES AU VOTE FN MALGRÉ DES PROBLÈMES SOCIAUX AIGUS

C’est dans les petites communes (bandes verticales sombres), là où les difficultés sociales sont relativement moins fortes, que le FN fait ses meilleurs scores.

En comparant plus attentivement la carte des difficultés sociales et celle des votes FN, une importante différence apparaît : le vote frontiste est plus faible dans les villes et particulièrement dans les grandes agglomérations que dans leur périphérie alors qu’inversement, les problèmes sociaux y sont plus aigus. Le fait apparaît avec plus de clarté quand on dessine l’évolution des quatre difficultés cartographiées plus haut et celle du vote FN, selon le nombre d’habitants des communes : plus ce dernier est important, plus faible est le vote FN, mais plus répandues les quatre difficultés.

Ceci montre que les électeurs choisissent plus en fonction de leurs perspectives d’avenir que de leur situation réelle. Dans les zones éloignées du centre, les habitants se sentent oubliés et ont l’impression de ne pas pouvoir changer leur situation. Dans les villes, même les plus pauvres peuvent espérer rencontrer une opportunité qui les tirera de la misère. L’air de la ville rend libre disait-on déjà au Moyen-âge à propos des cités.

 

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9 avril 2017 7 09 /04 /avril /2017 15:57
En cette période d’élection présidentielle, révisez votre histoire politique française, avec un portrait de Vincent Auriol, président de la République de 1947 à 1954.

 

Vincent Auriol (Revel, Haute-Garonne, 27 août 1884 – Paris, 1er janvier 1966) devait être, quoi qu’ait prétendu François Mitterrand, le premier socialiste à devenir président de la République. Il était sans doute un socialiste plus sincère que son illustre successeur.

Candidat de la SFIO et du PCF, il fut élu au premier tour, le 16 janvier 1947, par 452 voix. Cette victoire couronnait une longue carrière politique.

Le communiste Jacques Duclos, présidant le Congrès de Versailles, déclara :

En vous la nouvelle constitution de la République Française, a désormais un gardien vigilant et respectueux de la souveraineté du peuple. Avec vous la République sera toujours placée sous le signe de l’union républicaine et sous le signe de tous les Français de bonne volonté…

Quelques mois plus tard, avec l’entrée dans la Guerre froide, socialistes et communistes se retrouvèrent dans des camps opposés.

En dépit de ce contexte international très tendu, Vincent Auriol sut redonner du lustre à une fonction présidentielle que d’aucuns souhaitaient abolir.

« J’ENTRE DANS UN PALAIS MAIS JE RESTE AVEC LE PEUPLE… »

Fils unique d’un boulanger républicain radical, il perdit un œil à 10 ans en jouant avec ses camarades. Éduqué d’abord par les frères des écoles chrétiennes, il fréquenta ensuite l’école laïque et le collège de sa bourgade natale. Devant sa réussite scolaire, son père renonça à en faire son successeur et lui permit de poursuivre ses études.

Son itinéraire fut ainsi des plus classiques sous la Troisième république. Après avoir fait son droit et s’être inscrit au barreau de Toulouse, il se fit élire député de Muret sans discontinuer pendant 26 ans, de 1914 à 1940. Son enracinement local se confirma par son élection comme maire de Muret et conseiller général en 1925.

Influencé par Jean Jaurès, son professeur de philosophie à l’université de Toulouse devenu député du Tarn, il était devenu socialiste très tôt. Avocat de la Bourse du Travail, Auriol avait épousé la fille d’un vieux syndicaliste en 1912. Orphelin de Jaurès, assassiné en 1914, il se tourna vers Léon Blum qui devint son maître à penser. Il devait participer à la reconstruction de la SFIO après la scission du Congrès de Tours (1920). Ce socialiste réformiste, cordial et sans agressivité, se fit ensuite connaître au sein du socialisme européen.

MINISTRE ET RÉSISTANT

Ardent partisan du Front populaire, il devait détenir trois portefeuilles ministériels. Il fut successivement ministre des Finances (1936-1937), de la Justice (1937-1938) puis de la Coordination des services ministériels à la présidence du Conseil (1938). Il devait ainsi évoquer son premier ministère :

Syndic de faillite plutôt que gérant d’un patrimoine, j’étais en présence d’une trésorerie vide, d’une inflation illégale et occulte de douze milliards, d’une monnaie dévaluée en fait depuis trois années, au témoignage même de tous les économistes d’une crise économique sans précédent, d’une violente agitation sociale et d’une France déchirée, d’une Europe déjà en état de guerre et d’urgentes nécessités d’armements modernes jusque là négligés et inexistants …

Un de ses principaux titres à la postérité était d’avoir été un des quatre-vingts parlementaires à refuser de voter les pleins pouvoirs au maréchal Pétain. Sous l’Occupation, il connût l’internement administratif puis la résidence surveillée à Muret. Un moment inquiété au moment du procès de Riom, Vincent Auriol obtint un non-lieu du tribunal de Muret.

À compter d’octobre 1942, il vécut en clandestinité dans les montagnes de l’Aveyron et les Causses du Tarn. Auriol y rédigea pour l’essentiel son livre Hier-Demain. Il était dédié « à Charles de Gaulle et à ses premiers compagnons, à Léon Blum et à mes camarades du parti socialiste, aux prisonniers de guerre et aux déportés… ».

Il participa activement à la Résistance en zone sud avant de gagner Londres en octobre 1943. À Alger, il devint, jusqu’au 25 juillet 1944, membre de l’Assemblée consultative provisoire dont il présida la Commission des Affaires étrangères. Il représenta la France lors de la conférence de Bretton-Woods.

SUPPRIMER LA PRÉSIDENCE DE LA RÉPUBLIQUE ?

Élu dans les deux assemblées constituantes (1945 et 1946), il fut ministre d’État dans le gouvernement provisoire dirigé par de Gaulle. Un de ses camarades lui reprocha de devenir plus gaulliste que socialiste. Lors de la démission du Général, il sut le convaincre de ne pas parler à la radio. Le grand Charles lui confia alors l’intérim de la présidence.

Il présida ensuite les deux assemblées constituantes où son talent de conciliateur fit merveille. Les socialistes rêvaient de supprimer simplement la présidence de la République. L’exécutif s’incarnerait dans un président du Conseil représentant la majorité de la Chambre. La peur du communisme, d’une part, et d’un pouvoir personnel de type bonapartiste, d’autre part, déboucha finalement sur un simple replâtrage de l’ancienne constitution.

La Quatrième république se voulait une refonte rationnelle de la Troisième république. Le Sénat que d’aucuns souhaitaient supprimer fut conservé et amoindri sous le nom de Conseil de la République. Le chef de l’État serait donc élu selon les mêmes modalités que sous la république précédente.

DES POUVOIRS PLUS CLAIREMENT DÉFINIS POUR LE PRÉSIDENT ?

Les pouvoirs du président furent définis en s’inspirant de la pratique mise en œuvre depuis 1876. Le chef de l’État demeurait chef des armées et présidait le conseil des ministres. Il conservait le droit d’adresser des messages au parlement et la possibilité de demander une seconde délibération sur les textes votés par le parlement.

Gardien de la Constitution, son rôle essentiel demeurait la désignation des candidats à l’investiture comme président du conseil.

Néanmoins tous ses actes devaient être contresignés par un ministre. L’importance réelle de ses pouvoirs allait donc dépendre de la pratique instaurée par le premier titulaire de la charge.

Or, Vincent Auriol, qui comme Jules Grévy autrefois, avait été un adversaire de la fonction présidentielle, n’avait nullement l’intention d’inaugurer les chrysanthèmes. Au rebours de la Troisième république, la Quatrième devait marquer la renaissance de la fonction présidentielle.

UNE NOUVELLE CONCEPTION DE LA PRÉSIDENCE : UNE MAGISTRATURE D’INFLUENCE ?

Vincent Auriol devait en effet préciser sa vision des choses :

Je regrette de contrarier ceux qui voudraient faire de la présidence de la République une magistrature passive, silencieuse, de pure représentation(…). Je ne serai ni un président soliveau, ni un président personnel. (…)Entre le mutisme et le laisser-aller, la décision et l’action effective réservée au Gouvernement responsable, il y a place pour une « magistrature morale » dont on a parlé, pour ce pouvoir de conseil, d’avertissement, de conciliation qui doit être celui du Chef de l’État, sensible et attentif au-delà des courants d’opinions superficiels et passagers et au-dessus des heurts de partis, à la volonté profonde et permanente du pays : Défendre l’État, sa constitution, ses institutions et en même temps les intérêts permanents de la France que cet État représente, c’est ainsi que je conçois mon rôle…

Pour lui, le président ne décidait pas mais avertissait et conseillait. Mais très à l’aise dans le « maquis parlementaire », Auriol n’hésitait pas intervenir énergiquement lors des conseils des ministres. La quasi-disparition des conseils de cabinet favorisaient son autorité face à des présidents du conseil à la personnalité un peu falote. Les procès-verbaux des séances du conseil, dont il était le seul détenteur, lui donnait par ailleurs une grande supériorité d’information.

Il apportait son point de vue qu’il défendait avec autorité et compétence sur tous les projets. La vivacité méridionale dépassait parfois chez lui les bornes de la politesse. Jacques Fauvet décrivit ainsi un chef de l’État « bousculant les fonctionnaires, présidant, voyageant, proclamant, parant beaucoup, écoutant plus rarement ».

UNE POLITIQUE ÉLYSÉENNE ?

Le président donnait toujours son avis sur toutes les nominations aux postes importants et exerçait une forte influence dans les Affaires étrangères et la Défense nationale. Ayant accès à la correspondance diplomatique, il bénéficiait de la pérennité alors que les chefs de gouvernement et les ministres passaient. Vincent Auriol sut user de ses voyages à l’étranger, pour affirmer les thèses qui lui étaient chères.

Opposé au réarmement allemand, il défendit le pacte atlantique et condamna vigoureusement le « rideau de fer ». Il n’était donc pas le président « indifférent », au-dessus de la mêlée, de la Troisième république. Vincent Auriol se consacra particulièrement à l’Union française, nouveau nom donné à l’Empire colonial. Il n’hésita pas à recevoir l’empereur Bao-Daï à propos de l’avenir du VietNam. Le président rédigea lui-même le message au bey lors de la crise tunisienne de mars 19521.

Président du Conseil supérieur de la magistrature, il eut le souci d’en assurer l’indépendance face au gouvernement. Il usa de son droit de grâce en toute liberté. Auriol ne suivait les avis du Conseil de la magistrature que pour les délits mineurs. Entre 1948 et 1953, ce sentimental devait gracier les 2/3 des condamnés à mort. Ce droit devait prendre une coloration politique marquée quand il en fit bénéficier les condamnés pour collaboration ou les députés malgaches compromis dans le soulèvement de 1947.

UN PRÉSIDENT ACTIF ET TRAVAILLEUR

Le président s’informait sans arrêt des événements nationaux et internationaux. Il suivait par la radio les débats à l’Assemblée Nationale. Il devait être le premier président de la République à prononcer des allocutions radiodiffusées.

Comme le notait André Siegfried :

Dans les trop fréquentes et surtout trop longues crises ministérielles, Auriol a plus d’une fois, par ses conseils, ses déclarations et même – ce qui était sans précédent – par ses communiqués de presse, dirigé les événements dans le sens souhaité par lui. Les constituants avaient voulu diminuer le Président ; on est heureux de constater qu’ils n’y ont pas réussi…

Les circonstances lui furent en effet favorables. Le Tripartisme, qui avait fondé la nouvelle république, s’effondra avec l’entrée dans la Guerre froide. Les communistes, un temps premier parti de France, choisirent de s’aligner sur l’URSS. La vieille SFIO pencha pour l’alliance atlantique. Le jeune MRP, parti démocrate-chrétien, rompit avec de Gaulle et perdit rapidement une grande partie de ses électeurs.

Avec la « Troisième force » qui rassemblait tous les partisans du régime, la composition de tout gouvernement relevait désormais d’une savante alchimie. Aucun parti n’étant majoritaire, les cabinets de coalition devinrent la règle.

« LE PARLEMENT EST À VOMIR »

En 1947, Vincent Auriol lui-même poussa Paul Ramadier à renvoyer les ministres communistes. Véritable chef de la « Troisième force », il dénonçait par ailleurs les attaques du RPF, le parti gaulliste.

Il fut dans doute le président de la République parlementaire qui sut le mieux faire triompher devant l’assemblée les candidats de son choix à la présidence du conseil. Auriol n’hésitait pas à faire pression sur les partis pour maintenir la cohésion de la majorité en place. Cette cohésion était loin d’être assurée. La « Troisième force » était en réalité une somme de faiblesses hétéroclites.

Violemment attaqués sur leur droite par les gaullistes et sur leur gauche par les communistes, les gouvernements devaient composer avec des petits partis du centre et s’appuyer sur les socialistes comme sur la droite modérée.

Il y avait parfois de quoi être découragé. « Le parlement est à vomir » devait écrire Auriol. Pas moins de dix-sept gouvernements devaient se succéder pendant sept ans ! Onze d’entre eux devaient tomber moins de six mois après leur investiture.

« On déposa sur mes épaules le lourd fardeau de la nation, et j’ai parcouru un dur calvaire. Sera-ce, finalement, au bout, la Croix ? »

VIE PUBLIQUE, VIE PRIVÉE

Levé au petit matin, Vincent Auriol faisait chauffer lui-même son petit déjeuner. À 6 heures, en pyjama et robe de chambre, il était à son bureau privé au premier étage, où personne ne devait le déranger jusqu’à 8 h 30, examinant les dossiers qu’il avait fait monter la veille.

S’il était attaché au respect du à la fonction présidentielle, il en favorisa aussi la démocratisation. L’habit de cérémonie fut peu à peu abandonné. Il n’hésita pas à aller en jaquette au grand prix d’Auteuil et à inaugurer les expositions en veston et sans chapeau. La simplicité, l’accent méridional, le visage rond, tout semblait rapprocher Auriol du populaire Doumergue. De son côté, son épouse, Michelle, restaurait la tradition de l’arbre de Noël et se montrait une maîtresse de maison distinguée et prévenante. Elle portait à la perfection les robes des grands couturiers.

Pour échapper aux services de sécurité, Auriol n’hésitait pas à quitter le palais en cachette pour aller au cabaret ou à la Comédie-française.

Amateur comme son épouse de peinture moderne (Rouault, Braque, Dufy) et de musique classique, Vincent Auriol jouait du violon. Mais ce pétanqueur d’occasion aimait aussi la pêche à la ligne. Il ne manquait pas d’assister à des compétitions de football ou de rugby.

TRAVAUX À L’ÉLYSÉE

Tout était à rénover, la maison n’avait guère bougé depuis bien longtemps. La première salle de bains datait de Deschanel. On ne pouvait plus fermer certains volets sous peine de les voir partir en poussière. Les peintures s’écaillaient, les fils conducteurs étaient visibles dans certains plafonds, les menuiseries se disloquaient, des bibelots multiples et disparates s’entassaient sur des meubles mal assortis…

Les Auriol n’avaient pas l’intention de vivre sept ans dans ce musée poussiéreux qu’ils furent les premiers à surnommer le «Château».

Quelques semaines après leur arrivée, ils commencèrent par arranger certaines pièces à leur façon. Ils y passèrent toute une journée en famille avant de s’endormir, fourbus mais satisfaits… pour se rendre compte que tout avait été remis à sa place le lendemain par le personnel !

Dès lors, de grands travaux furent entrepris. Cette réfection totale, avec mobilier assorti au style des pièces, entraina la suppression de la cage de verre dans la cour d’honneur et la création d’un appartement royal pour les invités de marque au premier étage du palais.

Enfin, Michelle Auriol décida de doter le palais de cuisines dignes de ce nom puisque les repas provenaient d’un traiteur depuis les débuts de la IIIe République. Cela permit d’offrir désormais un cassoulet à ses invités.

L’épouse du président devait avouer : « Après le septennat, ni mon mari, ni moi-même n’avons plus prononcé le nom de l’Élysée, qui a représenté pour nous une existence aussi pénible physiquement que moralement ».

UNE AUTRE VIE COMMENCE POUR VINCENT AURIOL

Trop populaire à la fin de son septennat, Vincent Auriol comprit qu’il n’avait aucune chance d’être réélu. S’il avait le soutien mitigé des socialistes, tous les autres partis lui reprochaient trop son activisme.

Tout en pratiquant une activité de journaliste politique, Vincent Auriol devait continuer à jouer un rôle public. Il présida la Conférence internationale des Nations unies contre les préjugés et la discrimination, réunie à Genève en 1955. Il contribua à faire accepter aux socialistes la nomination du général de Gaulle à la présidence du conseil en mai 1958.

Pourtant, hostile à la Constitution de 1958, il démissionna de la SFIO. Il refusa également de siéger au Conseil constitutionnel dont il était membre de droit. Son dernier acte fut de soutenir la candidature de François Mitterrand en 1965.

Sa tombe très simple se trouve au cimetière de Muret. Mais il laissait, à défaut de monument, un document historique de première importance à la postérité.

Le Journal du Septennat dont la publication posthume, commencée en 1970 achevée en 1983, connut quelques difficultés. François Mitterrand, devenu président, crut devoir empêcher la publication de l’année 1950 où son rôle n’était pas suffisamment mis en valeur. Vingt ans furent donc encore nécessaires pour lire enfin cette année 1950. Comme quoi, il convient de laisser le temps au temps…

 

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9 avril 2017 7 09 /04 /avril /2017 15:46
Louis-Napoléon Bonaparte

En cette période d’élection présidentielle, révisons notre histoire politique française, avec un portrait de Louis-Napoléon Bonaparte, premier président de la République française.

 

 

Le 20 décembre 1848, Louis-Napoléon (Paris, 20 avril 1808 – Chislehurt, 9 janvier 1873), en habit noir, prêtait serment devant l’Assemblée constituante :

« En présence de Dieu et devant le peuple français, représenté par l’Assemblée nationale, je jure de rester fidèle à la République démocratique, une et indivisible et de remplir tous les devoirs que m’impose la Constitution. »

Il déclarait ensuite :

« Nous avons une grande mission à remplir, c’est de fonder une république dans l’intérêt de tous et un gouvernement juste, ferme, qui soit animé d’un sincère amour du progrès, sans être réactionnaire ou utopiste. Soyons les hommes d’un pays et non d’un parti…»

L’Assemblée, qui lui était hostile, se montra froide et son adversaire de la joute électorale, le triste Cavaignac, ne crut pas utile de se lever quand le nouveau Président lui serra la main presque malgré lui.

Louis-Napoléon devait être le premier président de la République et en même temps le repoussoir des républicains français. Le spectre du coup d’État du 2 décembre a longtemps hanté la tradition républicaine. L’élection directe du chef de l’État par le peuple sera, pour un bon siècle, associée au césarisme et au péril dictatorial. Aussi, la présidence de la République allait devenir une fonction essentiellement symbolique et ce jusqu’en 1958.

LA CONSTITUTION DE LA SECONDE RÉPUBLIQUE

Tout avait commencé avec la promulgation de la constitution de la Seconde République le 4 novembre 1848. Partiellement inspirée de la constitution américaine, elle prévoyait l’élection d’un président de la République pour une durée de quatre ans au suffrage universel masculin. Disposant de larges pouvoirs, il ne dépendait pas de l’Assemblée qu’il ne pouvait, de son côté, pas dissoudre. Cette assemblée unique était l’héritière des grandes assemblées de la Révolution : la Constituante, la Législative, la Convention.

Néanmoins, cette synthèse maladroite de la tradition révolutionnaire française et du système présidentiel américain pouvait déboucher sur une impasse. Le Président sortant ne pouvait pas se faire réélire. Les actes de ses ministres étaient soumis à un contrôle tatillon de l’Assemblée. En cas de conflit entre l’exécutif et le législatif, le Président, qui n’avait rien à perdre, pouvait être tenté par la solution du coup d’État.

« UN CRÉTIN QUE L’ON MÈNERA »

Mais la création d’une présidence de la République ne s’était pas faite sans débats.

En effet, le nom de Louis-Napoléon était à l’esprit de tous les parlementaires. Mais si le nom inquiétait, l’homme lui même suscitait le mépris ou la moquerie. Élu en juin 1848 par quatre départements, il avait démissionné devant l’hostilité froide manifestée par l’Assemblée. Il n’avait, ainsi, pas été compromis dans les massacres de juin où la République avait fait tirer sur les ouvriers.

Réélu en septembre par cinq départements, il était arrivé avec la réputation sulfureuse d’être un des chefs de la démocratie sociale. Il devait d’ailleurs siéger sur les bancs de la gauche. Mais très vite, l’Assemblée s’était rassurée. Gauche, laid, apathique, mauvais orateur, s’exprimant avec un accent étranger indéfinissable, le neveu de l’Empereur n’impressionnait guère.

« Quel imbécile que ce monsieur Bonaparte » gloussait Ledru-Rollin, l’aigle de l’extrême-gauche. « C’est un crétin que l’on mènera » assurait de son côté Adolphe Thiers, la tête pensante de la droite ex-monarchiste qui se réunissait rue de Poitiers.

Le 12 octobre, il annonçait sa candidature à la présidentielle, se posant en champion de la réconciliation nationale. Tous les gens sérieux pariaient cependant sur Cavaignac, le chef du gouvernement provisoire. Ce dernier avait le soutien de la majorité des élus, des notables, des hauts fonctionnaires et des milieux d’affaires. La droite, qui n’avait personne à présenter, se rallia à Louis-Napoléon. Thiers était persuadé qu’il le manipulerait comme un pantin avant de lui succéder. Le fait est qu’il devait bien lui succéder… 23 ans plus tard !

LE PREMIER PRÉSIDENT

Sous ses allures imbéciles, qu’il soignait particulièrement à l’égard de toutes les intelligences qui le regardaient de haut, Louis-Napoléon allait être le seul à mener une campagne moderne. Son programme s’adressait à tous, chaque catégorie se voyant gratifier de promesses sans trop de souci de cohérence. Inversement, l’acharnement de la presse à le ridiculiser contribuait à faire de lui le personnage central de la campagne. Sa victoire devait être éclatante, montrant l’écart existant entre le peuple et les élites. Avec une forte participation (76% des inscrits), il recueillait plus de la moitié des voix des inscrits et les 3/4 des voix des votants. La France paysanne, méprisée par les républicains, s’était ralliée massivement à son nom.

Installé à l’Élysée, palais alors dans un triste état de délabrement, le Président devait s’apercevoir de la difficulté de composer un cabinet. Les républicains modérés le boudant, il dût se tourner vers les orléanistes appelant Odilon Barrot à la présidence du conseil. Les ministres ne faisaient guère de cas du Président qui confectionnait des cocottes en papier pendant les réunions du conseil. Une fois de plus, Louis-Napoléon feignait l’indifférence attendant son heure. Leperroquet mélancolique raillé par le général Changarnier avait l’habitude d’attendre.

LA VIE AVENTUREUSE DE LOUIS-NAPOLÉON

Né aux Tuileries prince impérial, il avait été tenu sur les fonds baptismaux par son oncle Napoléon. Fils incertain de son père Louis Bonaparte1 mais petit-fils incontestable de Joséphine, il était un Beauharnais par son flegme et la douceur de son caractère. Il avait connu l’exil dès l’âge de cinq ans, navigant entre la Suisse, l’Italie, les États-Unis et l’Angleterre. Sa connaissance du monde et des langues étrangères le distinguait de la plupart des Français de son temps.

Ayant l’âme d’un aventurier, il avait participé au soulèvement de la Romagne en 1831 et tenté à deux reprises de renverser le trône de Louis-Philippe. À Strasbourg en 1836 comme à Boulogne en 1840, l’opération avait tourné au fiasco. Emprisonné au fort de Ham, il occupa son temps à étudier, à réfléchir et à espérer. Il rédigea en captivité son Extinction du paupérisme qui connût, à sa publication en 1844, un certain succès. Louis-Napoléon se voulait socialiste, c’est-à-dire soucieux du sort des ouvriers : l’État devait à ses yeux corriger les excès du capitalisme libéral.

Il finit par s’évader, en mai 1846, de façon rocambolesque sous le déguisement d’un ouvrier. Il y gagna le surnom de Badinguet, dont l’origine reste encore obscure aujourd’hui. Apprenant la révolution de 1848, il aurait dit : « La République est proclamée, je dois être son maître. »

BLEU ENTRE LES ROUGES ET LES BLANCS

Les élections de mai 1849 voyaient triompher le « parti de l’ordre » composé d’anciens monarchistes, les Bonapartistes n’étant guère qu’une trentaine. Les républicains modérés avaient été laminés pris entre le marteau « montagnard » des démoc-soc et l’enclume conservatrice. La peur du péril rouge rapprocha cependant la majorité parlementaire du Président. Mais Louis-Napoléon se voulait bleu entre les Blancs et les Rouges.

Dénonçant l’intervention française en faveur du rétablissement de Pie IX à Rome, l’extrême gauche descendit dans la rue. Ce fut sa perte. Le Président à cheval se fit acclamer dans les rues de Paris. « Il est temps que les bons se rassurent et les méchants tremblent » pouvait-on lire sur la proclamation présidentielle. L’État de siège lui permit de soigner sa popularité, notamment auprès de la troupe. Il commençait, par ailleurs, une série de voyages en province appelant à l’union autour des institutions républicaines.

D’un autre côté, il n’avait pas l’intention de devenir l’otage de la droite. Mécontent de l’attitude du pape qui avait adopté une politique réactionnaire, alors même qu’il devait sa restauration à la république française, Louis-Napoléon rompit avec la majorité conservatrice. Sous prétexte d’écrire à son cher Edgar Ney, il fit publier dans la presse un texte sans équivoque : « La République française n’a pas envoyé une armée à Rome pour y étouffer la liberté italienne. »

LOUIS-NAPOLÉON CHAMPION DU SUFFRAGE UNIVERSEL

Odilon Barrot fut renvoyé et le nouveau cabinet dit ministère du 31 octobre 1849 se révéla plus malléable entre les mains du Président. L’absence d’un Président du conseil lui permettait enfin d’agir à sa guise. Le bonapartisme s’affichait plus ostensiblement :

« Le nom de Napoléon est à lui seul un programme ; il veut dire à l’intérieur ordre, autorité, religion, bien être du peuple, à l’extérieur dignité nationale. »

Très habilement, il laissa l’Assemblée voter le texte du 31 mai 1850 qui écartait du corps électoral la « vile multitude » comme disait Thiers. Comme il devait le confier à une amie :

« Quand l’Assemblée sera au-dessus du précipice, je couperai la corde. »

Il pouvait désormais se présenter comme le champion du suffrage universel. Dans le même temps, il ralliait des catholiques, satisfaits d’une politique favorable à l’enseignement catholique et au contrôle du clergé sur l’Université, tout comme les monarchistes fatigués de la rivalité stérile entre les Bourbons et les Orléans.

LA RÉVISION IMPOSSIBLE

Le Président multipliait les voyages : en quatre années, il devait visiter une cinquantaine de départements. Il inventait ainsi le rituel du voyage présidentiel avec son cortège de journalistes et ses visites organisées. L’accueil n’était pas toujours enthousiaste mais il subissait les cris hostiles avec philosophie et savait s’adapter à ses auditoires. Il avait le sens de la formule, déclarant à Saint-Quentin :

« Mes amis les plus dévoués ne sont pas dans les palais, ils sont sous le chaume ; ils ne sont pas dans les lambris dorés, ils sont dans les ateliers, dans les campagnes. »

Si à Lyon, il se souciait des ouvriers malades ou trop âgés, à Cherbourg, il tenait le discours d’un homme d’ordre.

La bêtise provocatrice du général Changarnier, commandant militaire de Paris, lui permit de le révoquer le 9 janvier 1851. Il pouvait ainsi contrôler plus soigneusement l’armée. L’Assemblée votait aussitôt la défiance à l’égard du cabinet. Sans trop s’émouvoir, le prince-président constituait un nouveau cabinet de « techniciens » dont Eugène Schneider à l’Agriculture et au Commerce.

La perspective de l’élection présidentielle de 1852 était désormais dans tous les esprits. Faute de candidats crédibles, qui pouvait s’opposer à Louis-Napoléon, l’homme le plus populaire de France ? Ne fallait-il pas réviser la constitution pour éviter qu’elle ne soit bafouée par le suffrage du peuple ? La quasi-totalité des conseils généraux n’avait-il pas émis des vœux pour la réélection du Président qu’interdisait la constitution ?

Persuadé que la crainte du « spectre rouge » pousserait l’Assemblée à la révision, Louis-Napoléon espérait se maintenir au pouvoir légalement. Mais si une forte majorité s’était prononcée, le 19 juillet 1851, en faveur de la révision, elle était insuffisante. Aussi, quand Morny suggéra la voie du coup d’État, le Président répondit à son demi-frère : « J’y songe sérieusement. »

LE PRINCE-PRÉSIDENT

Pour mieux perdre l’Assemblée dans l’opinion, Louis-Napoléon demanda le rétablissement du suffrage universel mis à mal par la loi du 31 mai 1850. Le rejet, mais à une faible majorité, le convainquit définitivement de la nécessité du coup d’État. Il savait d’ailleurs ses adversaires déterminés à l’éliminer. Une partie de la droite songeait très sérieusement à une arrestation du Président combinée avec le retour des princes d’Orléans.

Le plan « Rubicon » déclenché le 2 décembre surprit cependant tout le monde. L’insurrection dans la capitale fut écrasée impitoyablement. Divers soulèvements en province, surtout dans le Centre et le Midi, subirent le même sort. Le sang avait coulé, ce que n’avait pas souhaité le prince-président soucieux d’unir sur son nom tous les Français. D’un autre côté, les conservateurs, vite effrayés par les récits des scènes de violence des « Rouges » en province, se rallièrent en masse au pouvoir.

Un plébiscite organisé dans une atmosphère de terreur, les 20 et 21 décembre 1851, légitima le coup de force. Une fois de plus, les campagnes votèrent massivement oui. « Plus de sept millions de suffrages viennent de m’absoudre » déclara Louis-Napoléon reconnaissant ainsi sa culpabilité.

Inspiré par la constitution de l’an VIII, la constitution du 14 janvier 1852 maintenait le régime républicain. Louis-Napoléon se voyait octroyer la présidence pour dix ans. Néanmoins le Président quittait l’Élysée et s’installait aux Tuileries, le palais des rois.

Un pas de plus vers l’Empire ? Mais Louis-Napoléon hésitait :

« Conservons la République ; elle ne menace personne, elle peut rassurer tout le monde. »

Cette république était autoritaire : la presse était mise sous surveillance. Le scrutin de liste était remplacé par le scrutin d’arrondissement. L’administration se chargeait de l’élection des candidats officiels. Il n’y eut que trois opposants élus en février 1852 mais l’abstention avait été très forte dans les grandes villes ouvrières comme Lille et Saint-Étienne.

EMPEREUR MALGRÉ LUI

Cependant, son fidèle complice des mauvais jours, Persigny, était résolu à le faire empereur malgré lui. Il organisa un grand voyage dans le Centre et le Midi, là où la résistance au coup d’État avait été la plus forte, pour mieux démontrer la volonté des Français de revenir à l’Empire.

Pourtant le voyage devait commencer tièdement, notamment à l’entrée dans le département de la Loire, le berceau de Persigny. Roanne reçut froidement le chef de l’État. Mais, à Saint-Étienne, tout changea et désormais les cris de « Vive Napoléon, Vive l’Empereur » allaient ponctuer le parcours présidentiel qui prit l’allure d’un cortège triomphal s’achevant en apothéose à Bordeaux où le préfet Haussmann avait fait les choses en grand. « La France semble vouloir revenir à l’Empire » constatait Louis-Napoléon.

La république était morte, pour la seconde fois, sous les coups d’un Bonaparte.

 

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8 avril 2017 6 08 /04 /avril /2017 14:45
Deuis quelques jours, toutes les options semblent possibles pour la présidentielle, d’un Le Pen – Macron à un Fillon – Le Pen ou un Fillon – Mélenchon !

 

À deux semaines du premier tour de l’élection présidentielle, les sondages se suivent et se ressemblent, actant tous un resserrement net des écarts entre les leaders historiques (Marine Le Pen & Emmanuel Macron) et les challengers (François Fillon au premier chef et, éventuellement, Jean-Luc Mélenchon). Au point de rendre tous les scénarios possibles pour le second tour.

QU’ANNONCENT LES SONDAGES SUR LA PRÉSIDENTIELLE ?

Si l’on prend la dernière livraison des sondages BVA, le duel annoncé avec insistance par les médias entre Marine Le Pen et Emmanuel Macron reste d’actualité, puisqu’ils sont tous deux à 23%. Mais en baisse notable en une semaine, -1% pour Le Pen, -2% pour Macron. À l’inverse, les challengers François Fillon et Jean-Luc Mélenchon restent stables ou montent, à 19% tous les deux. Seul BVA met Mélenchon aussi haut (16% environ pour les autres instituts) mais avec les marges d’erreurs, 4 candidats peuvent rêver d’accéder au second tour.

Si l’on analyse la sûreté du choix mesurée par l’Ifop pour Fiducial, les électeurs de Marine Le Pen et de François Fillon sont les plus convaincus d’aller voter pour leur candidat, à respectivement 85% et 74%. À l’inverse, ils ne sont que 62% à être certains de leur choix pour Emmanuel Macron, le même niveau que pour Jean-Luc Mélenchon.

 

CE QUI POURRAIT BOULEVERSER L’ÉLECTION DANS LES PROCHAINES SEMAINES

Jamais sous la Ve République les sondeurs ne se sont trompés sur l’affiche du second tour à une distance aussi courte du premier tour (en prenant en compte les marges d’erreur bien sur). Autant dire que les probabilités d’un duel Macron – Le Pen au second tour restent majoritaires.

Mais… ce scrutin est aussi inédit, dans le sens où aucun des deux candidats en tête actuellement n’est issu des partis de gouvernement historiques en France, et aucun ne se réclame des deux camps classiques en France, la droite et la gauche. Tous deux représentent un saut dans l’inconnu qui pourrait effrayer beaucoup de votants.

Enfin, les sondeurs n’ont pas de point de comparaison pour redresser aussi finement que d’habitude leurs résultats. Cela n’invalide pas totalement les sondages, mais cela invite à prendre ces sondages avec un peu plus de prudence et de distance que d’habitude.

3 RISQUES EN VUE POUR EMMANUEL MACRON

La position d’Emmanuel Macron semble la plus précaire entre les deux candidats en tête actuellement. S’il a perdu 2 points en une semaine, c’est même 3 points en 15 jours selon BVA. Cela alors que le candidat bénéficie d’un alignement des planètes idéal, avec un candidat PS quasiment d’extrême gauche et un candidat LR englué dans les affaires. Il est aussi selon le même sondeur le candidat le plus souvent choisi « par défaut », par 33% de ses électeurs potentiels contre 23% pour la moyenne des candidats.

Les résultats électoraux des derniers mois, du Brexit à Donald Trump en passant par la « droitisation » de l’électorat en France ne plaident pas non plus pour lui, comme le notait très bien le journaliste Éric Dupin sur Slate : Emmanuel Macron est de facto le candidat des diplômés, des gens qui gagnent bien leur vie, des Parisiens, etc., de la France privilégiée en somme. Cet électorat qui a perdu dans la bataille Remain contre Leave pour le Brexit, cet électorat qui préférait Hillary Clinton à Donald Trump, etc. Même dans l’hypothèse d’un duel Le Pen – Macron au second tour, il y a fort à parier que la victoire facile annoncée à Macron par tous les médias depuis des mois ne sera pas si facile que ça.

Enfin, plus le scrutin se rapproche, plus la question des idées devient importante.

UNE POLARISATION DE L’ÉLECTORAT EN BONNE VOIE

Autre élément qui pourrait rebattre toutes les cartes de la présidentielle, les électeurs reviennent à leurs camps historiques : si François Fillon progresse, c’est surtout que ses électeurs « naturels » (sympathisants des Républicains) lâchent progressivement Emmanuel Macron et retournent à leur vote historique de centre droit. Il regagne du terrain chez les sympathisants LR, au détriment d’Emmanuel Macron. À 72% des intentions de vote chez les sympathisants LR, il fait une progression marquée de +5%. À cet égard, les soutiens de moins en moins voilés d’une large partie du PS à Macron semblent peser négativement sur ses intentions de vote.

Les militants fillonistes usent et abusent ainsi de l’argument, comme par exemple la page Facebook « Ridicule TV » animée par des soutiens du candidat LR et qui attaque régulièrement Macron comme héritier direct de François Hollande, avec un certain succès (1,4 million de vues pour cette vidéo) :

De même, une autre page anti Macron, « Emmanuel Micron », attaque l’ancien ministre de Hollande sur la base de ses soutiens majoritairement à gauche, jusqu’au PCF (Robert Hue) :

ET MÉLENCHON ALORS ?

Suite aux débats télévisés, la hausse de J-L Mélenchondans les sondages est indéniable. Mais peut-elle suffire pour perturber le duo (voire le trio) de tête Le Pen – Macron – Fillon ?

 

 L’exercice de prédiction est de haute voltige mais différents éléments plaident contre cette théorie. Au premier chef le fait qu’il faudrait que Mélenchon prenne au moins 3% à Benoît Hamon pour arriver aux niveaux des deux premiers. Ce qui mettrait Benoît Hamon à 5% des suffrages, un niveau difficilement concevable. Enfin, à 59% de sûreté dans le choix, l’électorat de Jean-Luc Mélenchon est le plus instable des 4 premiers candidats selon BVA. Il a donc bien plus à perdre qu’à gagner dans les jours qui vont précéder le 1er tour…

 

Une seule chose est sûre, les Français nous réservent des surprises, et ne devraient pas accepter si facilement le duel vendu avec insistance par Saint-Germain-des-Prés depuis des mois ! Fin du suspense dans deux semaines…

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